Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 19 Décembre 2024
Frères adoptifs semblant au départ si différents, Shinobu et Takezô se sont enfoncés dans une relation charnelle passionnée où ils se passent de tout mot, après de nombreuses années faites de reproches et de non-dits. Sous l'oeil de Kaname, le fils précoce de Shinobu, qui est la seule autre personne à être au courant, le sexe est peut-être le meilleur moyen pour eux deux de vivre leurs sentiments interdits et d'évacuer ce qu'ils ne peuvent extérioriser, en gardant alors toujours ça pour eux, comme si ça n'existait pas vraiment, chose que les yeux bandés de Shinobu symbolisent fortement. mais il y a toujours un moment où la réalité nous rattrape, et dans le cas de nos deux protagonistes cela se fera de façon difficile, lors d'un voyage entre adultes où Haruka, une amie de Mariko,fait une découverte qu'elle n'aurait jamais dû voir...
Après un premier volume aussi malsain que fascinant dans son genre, ce deuxième et dernier tome de la série se dresse alors, en quelque sorte, comme celui d'une inévitable chute, celle de deux hommes dont la passion réciproque sera passée par plusieurs étapes: le déni dans leur jeunesse, la frustration, et enfin du sexe sans mots et toujours plus brutal pour évacuer tout ce qu'ils ressentent. Asumiko Nakamura a beau parfois faire trop durer ses scènes érotiques, elles ont bien leur place ici, tant elles ont du sens pour cristalliser le ressenti des personnages. Et tout en nous amenant petit à petit jusqu'à une issue qui ne pouvait pas être autre, la mangaka reste maîtresse de son dessin, de sa mise en scène, de ses nombreuses petites idées graphiques symboliques (certains jeux d'ombre, le fait qu'on ne voit jamais les yeux de Mariko avant un certain moment décisif...), et de sa narration non-chronologique qui continue petit à petit à nous faire retracer le parcours des personnages, leurs douleurs contenues et certaines vérités supplémentaires sur leur lien.
A l'image des personnages principaux, il sera quand même possible d'avoir aussi, du côté du lectorat, certaines légères frustrations une fois ce volume refermé: une dernière ligne droite un peu trop rapide car les choses s'enchaînent vite (même si les toutes dernières pages sont intelligemment pensées pour nous laisser sur un dernier choc et un dernier moment d'émotion tragique), et un manque d'approfondissement sur la façon d'être de Kaname. Néanmoins, cela n'entache que très peu les qualités graphiques, narratives et scénaristiques d'un manga de haute volée dans sa catégorie. Redisons juste encore une fois que Les vestiges d'un parfum reste un manga réservé à un public très averti, et qu'il ne faut vraiment pas commencer par cette oeuvre pour découvrir tout le talent d'Asumiko Nakamura, au vu de ses partis-pris qui pourraient très facilement déranger.