Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 18 Octobre 2023
Après la publication des deux tomes jusque-là inédits en France de la série Sky High, premier volet de la saga éponyme de Tsutomu Takahashi, les éditions Panini nous font le plaisir d'offrir au deuxième volet Sky High Karma une nouvelle édition française en ce mois d'octobre, 17 ans après la première édition dont les deux tomes étaient parus pendant l'automne 2006. A l'époque, Karma fut la seule publication française de cette saga qui compte, à l'heure où ces lignes sont écrites, six volets, chaque volet étant indépendant mais ayant pour point commun la figure d'Izuko, gardienne de la Porte du Ressentiment, quelque part entre la vie et la mort.
Notez que votre serviteur étant un grand fan de Tsutomu Takahashi depuis les années 2000, il possède déjà la première édition française de Sky High Karma, et se basera donc sur celle-ci pour cette chronique. C'est pour cette raison que vous ne trouverez pas ici notre habituel paragraphe sur la qualité de l'édition.
Initialement prépublié au Japon à rythme hebdomadaire dans le magazine Young Jump de Shûeisha pendant la première moitié de l'année 2003, Sky High karma nous raconte une histoire complète en deux tomes (contrairement à la première série qui se composait d'histoires courtes), à savoir celle de Maï Takamaru, jeune fille de 16 ans qui n'a, en théorie, pas trop à s'en faire dans la vie: fille d'Ayame Jomaru, une chanteuse qui était très populaire une quinzaine d'années auparavant, elle souhaite elle-même s'engager dans une carrière d'actrice, et vient d'ailleurs tout juste d'obtenir son premier rôle dans un drame horrifique (même si elle n'aime pas l'horreur) sous l'impulsion de son manager Morita. mais sur la route du retour, dans la voiture conduite par Morita, l'adolescente est victime d'un accident de la route. Si elle s'en sort indemne, les radios effectuées à l'hôpital par la docteur Ishida laissent apparaître quelque chose d'invraisemblable, surtout pour un scientifique comme lui: une main semble, en permanence, faire pression sur le crâne de la jeune fille. D'où vient-elle ? A qui appartient-elle ? A-t-elle un rapport avec les étranges rêves de serpent gigantesque et de sang que Maï fait régulièrement depuis un bon moment ? Sans compter qu'après son accident, elle se met à avoir des visions fantomatiques et à entendre des voix, entre autres événements surnaturels et inquiétants...
Dans ce premier volume où il prend efficacement le temps de susciter l'inquiétude et l'angoisse en s'appuyant sur son dessin noir et charbonneux ainsi que sur les détails surnaturels entourant Maï, Tsutomu Takahashi offre un début de récit aux allures d'enquête paranormale où le premier enjeu, pour Maï et son entourage, est de comprendre ce qui arrive à la jeune fille, et pourquoi ça lui arrive. En exploitant de bonne manière l'univers du spiritisme via la médium Kishu Komatsubara puis certaines croyances liées notamment au bouddhisme et à l'hindouisme avec le concept de karma que l'on retrouve dans le titre (ce karma étant, en gros, les dettes que l'âme contracte vis-à-vis de la vie, chaque acte odieux devant être compensé par une vertu), l'auteur nous fait arriver jusqu'à de premiers éléments de vérité prenants qui sont, en très grande partie, liés aux secrets de la naissance de Maï, cette dernière n'étant que la pauvre victime totalement innocente d'une malédiction qui perdure depuis des décennies et qui fait revenir un mort parmi dans le monde des vivants jusqu'à ce qu'il ait fini d'accomplir sa tâche. Rien de foncièrement originalement dans le fond, mais tout le talent de Takahashi est de savoir susciter en permanence un climat d'angoisse, ainsi qu'une menace que l'on ressent en permanence sur Maï, jeune fille qui veut simplement mener une vie normale. Mais alors que les spécialistes du paranormal affirment avec effroi que l'adolescente devrait déjà être morte depuis longtemps au vu de la puissance de la malédiction pesant sur elle, a-t-elle une faculté spéciale lui permettant de survivre malgré les assauts de l'être qui veut sa mort ?
C'est à partir de là qu'intervient la figure commune à tous les volets de la saga Sky High: Izuko. Une Izuko encore différente des deux premières gardiennes de la première série, l'auteur s'appliquant, d'ailleurs, à faire la transition entre la deuxième et la nouvelle Izuko, tout en révélant brièvement les traumatismes du passé de cette dernière. Et ces traumatismes la pousseront précisément à se sentir proche de Maï jusqu'à, peut-être sortir de la neutralité qu'impose normalement son statut de Gardienne... mais pour quelles conséquences ?
Bien différent de la première série, Sky High Karma, dans cette première moitié, nous offre un début d'histoire paranormale et inquiétante qui, sans être très originale, est rondement menée par un auteur dont le style visuel colle parfaitement à ce genre d'ambiance. On se laisse happer sans la moindre difficulté par la sombre aventure surnaturelle vécue par la jeune Maï pour échapper à sa malédiction, en attendant avec plaisir de (re)découvrir la suite et fin de celle-ci dans le prochain tome.