Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 12 Septembre 2012
Deux à trois années sont passées depuis le bannissement d'Irako Seigen. L'horrible Tadanaga Tokugawa voit son territoire agrandi et continue ses atrocités sans jamais être dérangé par des fidèles n'osant guère s'opposer à un Tokugawa, et le passage de Kakegawa sous sa domination attire nombre de bandits décidés à se faire un nom en chassant les Tigres. Mais on ne vient pas à bout de ces derniers si facilement : au fil de ces trois années, Gennosuke Fujiki a encore fait des progrès au point de s'imposer comme l'un des maîtres de l'école Kogan, et vient à bout sans difficulté de ses adversaires. Au coeur d'une contrée plus sauvage que jamais, où l'humanité des combattants est souvent impossible à entrevoir, ce début de volume est l'occasion de replanter le décor autour d'un Gennosuke qui a encore évolué, le tout via quelques affrontements qui permettent de maintenir le rythme est laissent toujours pleinement entrevoir les talents de narrateur, de metteur en scène et de dessinateur de Takayuki Yamaguchi : si les affrontements ne durent jamais longtemps, les gestes sont de nouveau parfaitement découpés, les textes descriptifs immersifs, et le souci de réalisme dans l'horreur sanglante et les déformations physiques particulièrement réussi.
Pourtant, une menace bien plus dangereuse que les simples bandits ne tarde pas à arriver : les uns après les autres, et quel que soit leur âge, les Tigres de Kogan sont sauvagement assassinés, leur tête étant retrouvée ici ou là, dans une mise en scène soignée. Au-delà de sauver les apparences auprès de la population, il s'agit surtout pour les survivants de l'école Kogan d'une affaire de vengeance, car au fil de l'enquête et des indices laissés par le meurtrier lui-même, le doute n'est bientôt plus permis : Seigen Irako est de retour, rongé par l'envie d'éliminer ses anciens camarades et tortionnaires...
Quand les personnages de Shigurui sont rongés par la haine, l'auteur nous livre des horreurs plus percutantes et viscérales que jamais : sous son coup de crayon ultra-descriptif, où chaque assassinat est décrit précisément et en arrive à fasciner dans sa conception et son implacable et sanglante conclusion, tout le monde y passe, y compris les plus jeunes, et l'oeuvre marque plus que jamais dans sa représentation de la cruauté et de cette époque trouble, époque elle aussi bien mise en avant par de nombreux détails historiques et sur les moeurs.
Le retour de Seigen Irako est aussi sanglant qu'insondable et fascinant, et amène avec lui son lot d'horreurs, de craintes et de cruelles trahisons. Toujours aussi immersif, Shigurui prépare le terrain pour une suite qui s'annonce toujours pire, sans jamais refaire tomber l'ambiance.