Shigurui - 1re édition Vol.13 - Vol.15 - Manga

Shigurui - 1re édition Vol.13 - Vol.15 : Critiques

Shigurui

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 04 Septembre 2013

Revenu d'entre les morts en octobre 2012 sous la forme d'un volume triple, Shigurui trouve enfin sa conclusion via un dernier pavé regroupant les tomes 13, 14 et 15, pour un grand final qui restera dans les mémoires de tous ses (trop rares) lecteurs.

Ce sont donc quasiment 600 pages qui composent ce dernier tome, où Takayuki Yamaguchi nous replonge dans la quête vengeresse et cruelle des deux ennemis autrefois proches, Gennosuke Fujiki et Seigen Irako, destinés à s'affronter une dernière fois au bout du tournoi organisé par l'infâme et dérangé Tadanaga. Mais avant d'en arriver là, l'auteur s'applique une nouvelle fois à préparer le terrain via une immersion saisissante dans tous les à-côté du combat qui se prépare. Des bribes de passé à la préparation du duel, Takayuki Yamaguchi nous immerge dans un véritable portrait d'époque, où les samouraï ne sont pas forcément aussi reluisants que ce qu'on peut voir dans d'autres récits du genre, comme l'atteste par exemple le sort que Sasahara est contraint de réserver à un couple et leur bébé (encore dans le ventre de sa mère) pour sauver sa propre tête de la folie de Tadanaga. D'un bout à l'autre, à travers ce genre de petits apartés, l'auteur fait bien ressortir la folie émanant de Tadanaga et l'aspect résolument malsain de cet univers.
Surtout, Yamaguchi brille dans la mise en valeur de ses héros et de leurs sentiments. Et tandis que l'on voit se dessiner en l'infâme et ténébreux Seigen de vrais sentiments humains cachés derrière son ambition, laissant ainsi transparaître vaguement plus d'humanité chez cet impressionnant guerrier, on reste surtout bluffé par les changements qui se sont effectués chez Gennosuke, le samouraï autrefois si noble et droit étant désormais totalement rongé par l'envie de vengeance au point de négliger quasiment tout le reste... hormis sa seule lueur d'espoir, la belle et douce Mie, qui s'est promise à lui dès que la vengeance sera terminée.

Pour permettre une immersion totale dans cet univers, on peut alors, comme toujours, compter sur les talents narratifs et visuels d'un auteur qui enrichit les choses de nombreuses anecdotes historiques (surtout autour des nombreux personnages secondaires, bien que ceux-ci ne fassent souvent qu'apparaître), et qui peut s'appuyer sur un travail visuel d'orfèvre, véritable claque où le moindre bâtiment d'époque, le moindre intérieur, le moindre costume est croqué avec précision et détails, où les visages d'une profondeur inouïe font ressortir parfaitement les émotions de protagonistes en proie au désir de vengeance, à la folie ou à la douceur contenue, où la mise en scène brille grâce à un découpage savamment orchestré, à quelques métaphores visuelles saisissantes, et à une mise en valeur brillante des corps - que ceux-ci, musclés ou féminins, soient joliment exposés dans leur nudité ou tout simplement meurtris, déformés et ensanglantés.

Alors, certes, on pourra toujours rester sur sa faim face à de nombreux personnages qui ne font qu'apparaître et à des éléments juste esquissés (les prémices du complot politique, notamment), mais ici, tout est fait pour renforcer l'immersion et rendre plus crédible l'univers où Gennosuke et Seigen s'apprêtent à livrer leur dernier duel l'un contre l'autre. Et cet ultime duel, savamment préparé, peut alors venir conclure brillamment la série, au fil d'une petite centaine de pages où l'on retrouve tout le talent de l'auteur pour la mise en scène, avec un combat orchestré à la façon d'une danse macabre, la mise en valeur de l'obsession que les deux guerriers ont si longtemps entretenue l'un pour l'autre, la beauté pure des corps... Chacun est déterminé à exploiter les faiblesses de l'autre, et on sait que l'issue sera cruelle. Elle le sera encore plus que prévu dans des dernières pages à couper le souffle, qui viennent conclure l'oeuvre sans laisser le temps à la tension de retomber, marquant alors profondément le lecteur.

Il faut alors le dire : après nous avoir conquis d'un bout à l'autre en offrant une autre vision des samouraï et en proposant ce qui est incontestablement l'une des plus incroyables claques graphiques du genre, Shigurui offre une dernière ligne droite à la hauteur des espérances et érige bel et bien le manga de Takayuki Yamaguchi comme un incontournable de sa catégorie, dont l'insuccès en France est profondément injuste.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
18 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs