Ron Kamonohashi - Deranged Detective Vol.1 - Manga

Ron Kamonohashi - Deranged Detective Vol.1 : Critiques

Kamonohashi Ron no Kindan Suiri

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 26 Avril 2023

Akira Amano a eu de belles heures de gloire avec Katekyo Hitman Reborn, manga de baston en milieu mafieux, qui fut publié dans le Shônen Jump, et achevé en 42 volumes. Mais depuis, si l'artiste a bien développé sa carrière, elle ne fut que peu présente chez nous. Entre 2013 et 2019, elle dessine la comédie SF elDLIVE, récit intégralement en couleur, comptant 11 opus. Nous ne découvrirons l'œuvre que par le prisme de son adaptation animée, diffusée en 2017, mais le manga demeure toujours inédit chez nous.

C'est à l'automne 2020 que l'autrice revient avec un nouveau manga, d'un registre encore différent. Nommé Kamonohashi Ron no Kindan Suiri et prépublié sur la plateforme Shônen Jump+, celui-ci fait dans le polar, en revisitant la formule Sherlock Holmes par le prisme d'un jeune duo que tout oppose. Pendant plusieurs mois, aucun éditeur ne donnera signe d'un quelconque intérêt. C'est finalement Mangetsu qui s'est penché sur le titre, optant pour son intitulé international Ron Kamonohashi: Deranged Detective, tandis qu'une adaptation animée a été annoncée dans la foulée. Pour les fans d'Akira Amano, c'est un réel soulagement, d'autant plus que Mangetsu compte sur ce titre, qui marque sa première grosse collaboration avec Shûeisha, et notamment avec l'écurie « Jump ». Preuve de ce challenge, la proposition d'une édition collector d'entrée de jeu, regroupant les deux premiers tomes avec quelques goodies, une box sur laquelle nous reviendrons en fin de chronique...

Totomaru Isshiki est enquêteur au sein de la police tokyoïte. Mais, plutôt maladroit, il peine à faire ses preuves, au point que son avenir soit déjà remis en question. C'est sur conseil d'un supérieur, afin de faire grandir sa réussite, qu'il se rend à la demeure d'un certain Ron Kamonohashi, un détective privé qui serait le seul capable de résoudre l'affaire en cours. Et effectivement, c'est à un personnage bien particulier et excentrique que Isshiki aura à faire. Mais une fois convaincu de remettre son nez dans une enquête, Ron Kamonohashi pourrait bien être l'élément qu'il fallait à l'enquêteur novice. Ainsi se forme un duo presque improbable, qui chamboulera le travail d'Isshiki. Ce dernier découvrira au fil des affaires qui est véritablement ce détective privé sociopathe...

Akira Amano s'essaie donc au manga d'enquête, en revisitant d'une certaine manière la formule de Sir Arthur Conan Doyle, construite autour d'un binôme dont l'un des membres est un détective en parfait décalage avec son environnement, mais doté d'un esprit de déduction unique. Une recette simple, réutilisée à bien des reprises, ce qui va de pair avec le schéma narratif choisi par la mangaka. Dans un certain classicisme, Ron Kamonohashi: Deranged Detective (ou du moins, ce premier tome) se développe autour de plusieurs enquêtes qui se succèdent, et mettront en évidence le talent du protagoniste comme la singularité du duo central. C'est alors dans la manière de l'artiste de croquer l'ensemble que dépend la saveur de cette amorce, particulièrement alléchante.

Car derrière un classicisme apparent, ce premier opus se dote d'un certain relief, grâce à des tons propres à Akira Amano, et une façon bien particulière d'amener de l'humour dans sa série. Dans Ron Kamonohashi, il se dégage une énergie toute particulière, basée sur les interactions détonantes entre les personnages. C'est une marque de fabrique de la mangaka, les fans de Reborn le savent bien. Les histoires de l'autrice ont toujours opposé des figures bien différentes, et tout particulièrement un héros ordinaire face à des individus extraordinaires. C'est le cas avec Totomaru Isshiki, sans cesse dérouté par le comportement de Ron au milieu des affaires, quand le détective privé facétieux se plaît à s'attirer toutes sortes d'intérêts de la part de son entourage. Cette dynamique façonne une grande part de l'humour du titre, très présent pour le moment. Et pour l'honorer, un bon texte français était indispensable. C'est là qu'intervient Alexandre Fournier, qui a su saisir l'énergie de l'œuvre, et nous propose des échanges savoureux dans la langue de Molière (là où, malheureusement, nous ne pouvons pas toujours en dire de même de la traduction de Reborn). Pour les amoureux de cette patte très libérée et déjantée d'Akira Amano, les retrouvailles se font sous les meilleurs hospices.

Mais alors, que vaut Ron Kamonohashi en tant que manga policier ? Il faudra sans doute un moment pour rendre un verdict, tant on se rend compte que la mangaka pose ses bases et s'adapte à ce genre, en trouvant ses repères au fil des histoires. Dans son œuvre, elle ne cherche pas à créer un suspense que pourrait dénouer le lecteur, contrairement à certains autres polars de la BD nippone. Son style est davantage ancré sur une forme de sensationnel, le côté volontairement nébuleux des affaires basculant vers une résolution inattendue créant un réel effet de surprise. En ce sens, le parti-pris est déjà appréciable, mais il faut y ajouter le rôle de Ron, dont une particularité vient autant créer un enjeu que former une sorte d'intrigue autour du jeune détective. Levier humoristique du titre, le protagoniste est aussi le point d'orgue d'une trame principale qui semble s'installer doucement, mais sûrement, et évolue déjà sur ce premier ouvrage. On attendra donc de voir comment la suite explore cette voie, aussi il est judicieux pour les éditions Mangetsu de proposer les deux premiers opus en simultanée.

Au final, le principal piège sera une tentative de comparer ce premier tome à la formule proposée par Gosho Aoyama dans Détective Conan. Les deux mangas dressent le polar de manières différentes, et il n'y a pas lieu de les mettre en compétition pour l'heure.

Jolie surprise que ce Ron Kamonohashi, donc, de vraies retrouvailles avec le style de son autrice, tant sur l'humour absurde et spontanée que sur sa patte graphique plus belle que jamais. Le tout sans oublier un polar prenant, dont mes éléments méritent de gagner en densité, mais qui présente déjà de quoi piquer notre curiosité.

La cerise sur le gâteau, que nous avons évoqué en début de chronique, c'est la déclinaison des deux premiers opus en une coffret collector de lancement. Outre des goodies que chacun jugera, ou non, anecdotiques (bien que le stand en acrylique designé par Luchisco rende particulièrement bien), la box qui accueille l'ensemble est particulièrement jolie et élégante. Un très sympathique objet pour collectionneur ou fan de l’œuvre d'Akira Amano, donc.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
15 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs