Planetarium Ghost Travel Vol.3 : Critiques

Le sort de la touchante Kinku, qui est à son tour tombée dans le sommeil sans réveil, n'est pas sans conséquences sur 303: la jambe paralysée, la vague à l'âme, il voit surgir devant lui une silhouette fantomatique énigmatique pour le lecteur mais que lui-même semble bien connaître: Tobias, qui semble alors avoir un lien étroit avec les arbres du même nom, mais aussi avec notre héros. Entre 303 et cet être nimbé de mystère, une nébuleuse conversation à coeur ouvert démarre, avant que Tobias n'emprunte le corps de notre cher voyageur, pour un voyage qui sera bien différent de ceux fait à travers l'espace...

Ce voyage, il s'effectue, cette fois-ci, plutôt à travers le temps, ou plus précisément à travers les souvenirs, les songes, les rêves du passé que Tobias va avoir en occupant temporairement le corps et donc la mémoire de 303. Tout naturellement, ce procédé amène constamment dans ce tome une atmosphère très onirique, poétique à sa manière, mais aussi souvent assez nostalgique et douce-amère, au fur et à mesure que l'on remonte, en même temps que Tobias, nombre d'éléments liés au parcours de 303 jusque-là. Egalement, cette idée du corps de 303 occupé par Tobias permet à l'autrice de jouer sur une narration extrêmement introspective, immersive, cherchant à nous plonger à la place même de ses personnages, comme en attestent plusieurs séquences où, côté mise en scène, Sakatsuki nous place directement à la position de ses personnages.

Ambitieux et dans l'ensemble maîtrisé (même si l'on sent que parfois la mangaka tâtonne en tentant des choses, comme elle l'avoue elle-même dans sa postface), le procédé est, alors, impeccable en terme d'immersion et d'atmosphère pour nous permettre de découvrir, de confirmer ou de comprendre nombre de choses sur 303 et sur son entourage: l'origine de sa jambe prothétique, son statut de rebut, la nature de son corps, ses origines, ses évolutions auprès de son <grand frère>, le concept même de grand frère et de petit frère ici, ses liens avec certains proches comme Jiri ou Tobias lui-même... mais ce sont aussi bien d'autres choses qui s'éclairent également, par exemple autour de Tobias, du secret des arbres portant son nom, ou encore de ce qu'il est advenu de la planète bleue.

Enfin, en filigranes, il est toujours question de thématiques humaines et relationnelles assez universelles, telles que le souvenir, les regrets, de la préciosité des moments qui sont à première vue les plus futiles (comme pour la scène des œufs avec 505)... Et l'artiste emballe toujours l'ensemble dans son style visuel collant parfaitement à son récit et gardant toujours les mêmes qualités, ne serait-ce que ses nombreux jeux sur les lumières nocturnes et ses doubles-pages aux compositions captivantes.

Plus épais encore que ses deux prédécesseurs avec ses 300 pages, ce troisième volume, assez différent des premiers tomes, se révèle alors à la fois très riche dans ses approfondissements introspectifs, captivant dans son ambiance, saisissant dans son rendu narratif et visuel, touchant dans ses thématiques et dans ce que l'on entrevoit de nouveau sur 303 et sur les autres personnages... Belle et généreuse, l'oeuvre confirme encore un peu plus toutes ses grandes qualités.