Plaine du kanto (la) Vol.3 - Actualité manga
Plaine du kanto (la) Vol.3 - Manga

Plaine du kanto (la) Vol.3 : Critiques

Kanto Heiya

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 05 Août 2011

"La Plaine du Kantô où j'ai été évacué à la fin de la guerre n'est pas si éloignée de Tokyo et on peut s'y rendre en une heure. Pourtant, je n'y suis jamais retourné en vingt ans depuis que j'habite à Tokyo. Pourquoi ? Parce que je crains d'être accablé de tristesse si je devais revoir les épis de riz vibrer dans le soleil couchant."

Cette phrase, qui clôt la belle postface de Kazuo Kamimura, résume à elle seule l'atmosphère de la Plaine du Kantô, définitivement grande oeuvre parmi les grandes oeuvres de l'auteur.

Dans ce dernier volume, nous retrouvons Kinta, sorte de représentation autobiographique de l'auteur, progressant dans l'art du dessin et découvrant à chaque fois un peu plus les affres du sexe.
Après son amour d'enfance qui s'est achevé dramatiquement, il a retrouvé sur sa route Ginko, son ami d'enfance gay et travesti, qui continue de mener une vie que tout occidental qualifiera de débauchée, et il fait à présent la rencontre de Kyôko, une jeune femme indéchiffrable, qui prend plaisir dans le sexe mais dont les sentiments profonds restent un mystère total. Est-elle sincère ou manipulatrice ? Dans tous les cas, on sait déjà que Kinta a largement appris à se méfier des pièges féminins, pourtant si attirants. Malgré tout, a-t-il seulement la force de lutter contre ?
Quant à la carrière du jeune homme, elle se poursuit non sans quelque amertume, partagée entre une société nouvelle, en pleine mutation, et des valeurs parfois plus vieilles que lui a transmises le vieil Ogumo, son maître, celui qui l'a élevé après la mort de son grand-père. Quoi qu'il en soit, on assiste aux prémices de la lente percée du garçon dans le milieu artistique.

Partagé entre différentes facettes du sexe, du monde du travail, du monde humain en général, Kinta nous renvoie en pleine figure la propre expérience de Kazuo Kamimura. Les personnages semblent sans cesse un peu perdus, mélancoliques, ressassant leurs souvenirs comme on pourrait le voir dans toute autobiographie pure et dure. Certains personnages se livrent de plus en plus face à leurs expériences et leurs souvenirs, et l'on se surprend parfois à avoir envie de les accompagner dans leurs émotions, comme les pleurs d'un Ginko qui symbolise à lui seul toute l'essence du manga. Et quand arrive la fin tout en subtilité et en mélancolie de l'oeuvre, quand l'heure arrive de découvrir la postface percutante de l'auteur, à la fois crue et sincère, on comprend tout de suite mieux le rapport si particulier que celui-ci a avec le sexe et le monde en mutation qu'il a connu, des thèmes ayant toujours été au coeur de ses oeuvres.

Pour autant, comme toujours, le ton de Kamimura ne se veut jamais critique sur le moindre point. Les affres de la vie se poursuivent, le sexe est présenté sans tabou, dans tout ce qu'il peut avoir de négatif et à la fois de fascinant, certains personnages sont capables d'arriver moralement très bas, mais le mangaka se contente toujours de raconter son histoire comme un témoignage d'une époque, de l'époque qu'il a connue, avec une infinie mélancolie, sur un ton qui emprunte à la tristesse, à la bienveillance, au regret. Et pour tout ça, son trait fin et élégant conserve toute sa force.

Au fil de ces dernières années, à travers plusieurs oeuvres, nous avons pu découvrir en Kazuo Kamimura un auteur unique et infiniment intéressant. Aujourd'hui, après tout ceci, l'arrivée en France de la Plaine du Kantô sonne comme un sommet dans la découverte de ce mangaka parti trop tôt. La Plaine du Kantô résonne comme une oeuvre semi-autobiographique puissante et sincère, comme le titre dans lequel son auteur se livre le plus et touche le plus. Si vous ne devez posséder qu'un seul manga de Kazuo Kamimura, c'est celui-ci.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
19 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs