Noise  (Tetsuya Tsutsui) Vol.3 - Actualité manga
Noise  (Tetsuya Tsutsui) Vol.3 - Manga

Noise (Tetsuya Tsutsui) Vol.3 : Critiques

Noise

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 30 Mars 2021

Chronique 2 :

Mutsuo Suzuki, l'assassin qui a brisé tant de vies, n'est plus: dès lors qu'il a envisagé de s'en prendre à la femme et à la fille de Keita, une violente dispute s'est enclenchée et a abouti au meurtre involontaire du serial killer. Keita Izumi, son ami de toujours Jun Tanabe et l'agent de police Moriya se sont alors retrouvés unis par ce même drame, et par la volonté de cacher le cadavre avant tout pour préserver le village de Shishikari et leurs proches... mais dans quelle spirale infernale sont-ils alors tombés ? Bientôt rongé par le sentiment de culpabilité, Moriya n'était pas à l'aise, a perdu pied, et a fini par essayer de se suicider. Qui plus est, s'il est assez facile de cacher le cadavre d'un tueur qui était détesté de tous et dont tout le monde se fiche un peu, il risque d'être beaucoup moins aisé de camoufler la mort d'un autre homme: l'agent au maire, un homme corrompu qui a essayé de faire du chantage à Keita. Face au toujours très suspicieux inspecteur Hatakeyama venu de la préfecture, Keita et Jun vont alors devoir adopter une stratégie risquée, stratégie vouée à leur faire prendre des décisions cruciales, pour protéger le bourg bien sûr, mais aussi voire surtout Kana et Erina...

Il s'est fait attendre pendant quasiment un an et demi depuis la parution du volume 2 en avril 2019: le troisième tome de Noise est finalement sorti en septembre dernier, en ayant la lourde charge de conclure efficacement (du moins l'espère-t-on) un thriller jusqu'à présent assez classique mais vraiment sympathique. Alors, le résultat est-il là ?

Dans les faits, pas de surprise à l'horizon concernant l'issue de l'histoire: on s'en doutait depuis déjà un moment, car il ne pouvait en être autrement. En revanche, la manière dont Tetsuya Tsutsui nous y amène est assez intéressante, car côté ambiance et rebondissements le mangaka, pendant la majeure partie du tome, ne cède pas aux sirènes du grand spectacle: son ton reste réaliste, il tâche de ne pas en faire trop, ce qui lui permet de conter une histoire encore plus déstabilisante par certains aspects. On pense ici à l'ambiguïté de la justice des personnages, sur lesquels il est difficile de se prononcer: si Tsutsui semble quand même pencher un peu d'un côté en attirant l'empathie sur Keita, Jun et leurs proches et en rappelant que les deux morts étaient des salopards (surtout le tueur en série Mutsuo, et d'autant plus que ce dernier envisageait de s'en prendre à Erina et Kana), il reste que nos deux héros ont deux cadavres sur les bras, et qu'ils se montrent assez froids et calculateurs (contrairement à Moriya qui a perdu pied) pour protéger le village et leurs proches. Et les habitants du village le leur rendent assez bien, en évitant eux-même de remuer les choses.

Et tout ceci se cristallise particulièrement dans la confrontation entre deux personnages. D'un côté, le brigadier Okazaki: l'agent de campagne a bien compris le mensonge de Keita et de Jun, qu'il a pu cerner au gré de différents détails troublants... mais va-t-il déclarer quelque chose pour autant ? Est-ce dans l'intérêt du village ? Et de l'autre côté, l'inspecteur Hatakeyama qui, même s'il comprend bien les motivations de Keita et des autres, est déterminé à simplement mener son enquête à bien, quitte à se retrouver isolé.

Il y a alors de quoi intriguer, questionner également, même si les thématiques ne sont pas nouvelles. Le tout, jusqu'à une fin qui est donc celle que l'on attendait, la plus logique dans une situation pareille, et au bout de laquelle Tsutsui fait ressortir quelques bonnes choses On y appréciera la loyauté, la fiabilité du fidèle ami Jun, un homme sur qui Keita peut décidément compter jusque dans les moments les plus sombres, Jun dégageant alors encore plus d'ambivalence. Tout comme on soulignera la belle symbolique du rapport entre père et fille, entre Erina qui se remémore une chose que son père lui a apprise (siffler avec une feuille, ce qui lui sauve la vie), et Keita qui ne peut que faire le choix qui s'impose pour sauver sa fille, celle pour laquelle il avait précisément agi jusqu'à présent afin de la préserver. Enfin, les toutes dernières pages font le choix de rester assez ouvertes, peut-être pour nous laisser imaginer ce qu'il adviendra des personnages après ces drames, ce qui peut être frustrant mais n'est pas forcément un mal, dans la mesure où le but de Tsutsui semblait surtout de bel et bien interroger notre vision d'un tel cas, de la justice et des décisions des personnages.

Alors, la dernière ligne droite de Noise est-elle à la hauteur des attentes ? Eh bien... malheureusement, pas tout à fait. On regrettera éventuellement le rôle finalement moindre, dans ce tome, de certains personnages-clés comme le vieux Yokota et même Moriya. Mais surtout, il y a comme un goût de bancal dans la manière dont toute la dernière partie a lieu. Déjà, les chose vont si vite, tellement à l'essentiel, qu'il y a beaucoup de raccourcis de mise en scène et de narration: les années qui défilent ne se ressentent pas vraiment, certains instants (comme la chute d'Erina, occultée) sont tellement rushés qu'ils ne dégagent pas la moindre petite tension... et, avant tout, le mangaka cède à un petit paquet de facilités pour arriver à ses fins. Comment Jun peut-il laisser échapper ce bout de papier du feu sans le voir, alors que c'est forcément un indice potentiel (surtout qu'en prime, Erina le repère direct) ? Comment peut-il se laisser avoir si bêtement par ce "piège" du téléphone, piège par ailleurs un peu gros et aléatoire ? Et surtout, pourquoi diable n'a-t-il jamais cherché à justifier ses voyages mensuels en camion avec un colis, à trouve rune explication valable pour ça ? Car forcément, au bout d'un moment, ça ne peut qu'intriguer les autres... On se demande même comment un élément aussi mystérieux a pu ne pas titiller Kana et Erina plus tôt.

Dommage, donc, car Noise ne passe pas loin de la franche réussite malgré son manque d'originalité (qui, de toute façon, n'est jamais un défaut). Il aurait fallu un construction un peu plus travaillée dans la dernière ligne droite en particulier. Reste malgré tout une oeuvre assez immersive, et cherchant à soulever certaines interrogations pertinentes chez ses lecteurs et lectrices.


Chronique 1 :

Maintenant qu'ils ont commencé à mentir pour se protéger, Keita et Jun, s'enlisent dans leurs mensonges, la situation devenant de plus en plus compliqué à gérer: l'agent Moriya ne supportant plus ces mensonges tente de se suicider, ce qui ne fait que lever encore davantage d'interrogations. Et maintenant, c'est l'adjoint au maire, un homme corrompu, qui va tenter de faire chanter Keita, le menaçant de lui faire perdre la garde de sa fille...
La situation empire encore lorsqu'un villageois tue ce dernier pour protéger Keita, le verger et le village!

On peut dire qu'il se sera fait attendre ce troisième et dernier opus de Noise, le dernier titre du talentueux et prolifique Tetsuya Tsutsui... C'est donc avec une grande satisfaction qu'on accueille cette conclusion assez surprenante mais tellement logique et cohérente!

Je vais essayer de spoiler le moins possible...je m'excuse par avance si cela devait arriver!

Lorsque le volume précédent s'est terminé, on avait laissé nos héros dans la pire des situations possibles, maintenant cacher la mort d'un ancien criminel ne suffisait plus, il allait aussi falloir maquiller la mort d'un fonctionnaire...et là, la problématique était toute autre: un criminel qui ne manque à personne c'est une chose, un adjoint au maire, relativement apprécié qui disparaît du jour au lendemain c'est autre chose...impossible de cacher sa mort!
Keita prend alors une terrible décision qui va bouleverser sa vie à jamais, ainsi que celle de ses proches...mais comment faire autrement? Impossible de revenir en arrière!

Le principal reproche qu'on pouvait faire aux deux premiers opus c'est le manichéisme qui s'en dégageait: dans le premier volume tome la mort d'un assassin, bien qu'acte irréparable, nous était presque présenté comme un acte de justice. Dans le deuxième volume, l'adjoint nous a été dépeint comme une ordure manipulatrice, ce qui faisait qu'en aucun cas le lecteur ne pouvait être attristé par sa mort, voire au contraire la trouver légitime!
Mais Tsutsui nous fait bien comprendre que la justice ce n'est pas le tribunal populaire, aux yeux de la police (et donc de la justice), un crime est un crime et que ce n'est pas aux citoyens de décider s'il y a des circonstances atténuantes ou pas!
Ainsi deux visions de la police vont se confronter, symbolisée par l'agent de campagne et l'inspecteur de la ville: le premier ne veut que l’intérêt de sa petite bourgade et de ses habitants et considère qu'il vaut mieux fermer les yeux si la sanction apporte plus de soucis qu'autre chose. L'inspecteur de son coté, bien que comprenant les motivations des personnages, souhaite aller au bout de son enquête...
Tsutsui ne tranche pas et laisse au lecteur sa libre appréciation, même si le point de vue qu'on va suivre le plus souvent dans cette conclusion sera celui de l’inspecteur!

Jusqu'où est on prêt à aller par amitié, par loyauté? Cette question c'est par le biais de Jun que l'auteur va nous la poser! Elle est était déjà sous-jacente dans les précédents opus, mais ici, elle sera au centre de toute la conclusion! La décision que va prendre Keita, ne peut fonctionner, peut importe ce que cela implique, que si Jun accepte de jouer le jeu et de garder le secret...un secret lourd à porter qui va forcément le hanter toute sa vie!
Plus encore que garder son secret, Jun va se dévouer, toute sa vie durant, à la famille de Keita...il va épouser son ex femme, s'occuper de sa fille...on ne saura pas s'ils fonctionnent comme une vraie famille recomposée où uniquement si Jun fait son devoir d'ami!

Par ce biais l'auteur nous démontre comment une mauvaise décision peut impacter la vie de plusieurs personnes, peut détruire la vie de plusieurs personnes!

Le mensonge et la dissimulation sont donc au centre de ce tome, mais l'inspecteur ne se laisse pas berner: il est intimement convaincu qu'on lui cache quelque chose...mais il lui faudra attendre des années pour le prouver...
Et la conclusion sera douce amère, c'est par le biais de la personne que Keita voulait le plus protéger qu'il va devoir se dévoiler, comme une terrible ironie!

Un dernier tome vraiment prenant, moins passionnant peut être que les précédents, l'enquête étant reléguée au second plan pour mettre davantage en avant les sentiments humains et l'esprit de sacrifice des protagonistes.
Tsutsui maîtrise toujours autant son sujet, il reste le maître du suspens et parvient à nous délivrer des messages sur nos sociétés tout en nous proposant des histoires fortes tenues par des personnages attachants et incroyablement humains (et donc faillibles).

Pour ma part je ne savais pas trop à quoi m'attendre pour la conclusion mais elle ne pouvait être différente, elle est juste et logique!

Un très bon dernier tome pour une série de qualité...et on attend la prochaine œuvre de Tsutsui avec impatience!
  

Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

14.25 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Erkael
16 20
Note de la rédaction