Nirvana Vol.1 - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 07 Avril 2017

Dans le Japon de 2016, la jeune Yachiyo est une fille qui a le coeur sur la main, ne cessant d'aider les autres au point d'être surnommée le "nouvelle Mère Teresa". Rêvant de marcher sur les traces de sa mère, elle s'engage ainsi pleinement dans le bénévolat, jusqu'à accepter de participer à une mission bénévole à l'étranger. Mais à l'heure de partir, sa vie va basculer...
En plein vol, l'avion dans lequel elle se trouve subit une avarie et s'apprête à s'écraser. La demoiselle se pense déjà morte... et pourtant, quand elle rouvre les yeux, elle a la surprise de se retrouver au sein d'un palais, dans un monde qui lui est complètement inconnu ! Rapidement, un jeune garçon lui affirme qu'elle est en réalité "Sakuya", réincarnation de la déesse de l'harmonie, et qu'elle va devoir entreprendre un voyage dans les différents royaumes de ce monde étrange afin de réunir ses 12 compagnons. Sa mission : rétablir l'ordre.

Première nouveauté shônen de 2017 chez Doki-Doki, Nirvana se place d'emblée comme un titre à part dans le parcours de l'éditeur, qui nous propose ici son premier manga bénéficiant d'un lancement international, ce tome 1 étant paru en France et au Japon à la même date. Collaborateur de longue date de Doki-Doki avec bon nombre de séries comme Iris Zero, The Rising of the Shield Hero, Taboo Tattoo ou encore 7 milliards d'aiguilles, la maison d'édition nippone Media Factory semble beaucoup compter sur ce lancement qu'il a plutôt poussé au Japon, et son choix de confier Nirvana à Doki-Doki témoigne sûrement de la confiance qu'a acquise la branche manga de Bamboo Édition.

A la conception de cette série, on découvre au scénario le nom de Jin, connu au Japon pour être l'auteur original du light novel Kagerou Days. Il est épaulé sur l'histoire de Nirvana par Sayuki qui en est aussi la dessinatrice. Si ce dernier nom vous dit quelque chose, ce ne serait pas étonnant : nous avons pu découvrir Sayuki il y a quelques mois, déjà chez Doki-Doki, avec son autre série en cours Les Six Destinées, une oeuvre d'aventure fantastique sympathique et décollant petit à petit au fil des volumes. Espérons d'ailleurs que Nirvana suivra ce même gain d'intérêt, et sur ce premier volume on a bon espoir que ce soit le cas !

La base de Nirvana est pourtant on ne peut plus classique, et son tout début pourrait décontenance quelque peu. Très très rapides, les premières pages dans notre monde peuvent paraître un peu bizarre, avec une collégienne embarquée dans une mission bénévole à l'étranger sans que personne ne l'épaule vraiment. Mais au moins, cela témoigne d'emblée de sa personnalité volontaire, sur laquelle nous reviendrons par la suite. Et une fois notre jeune héroïne propulsée dans cet autre monde, on part sur un schéma pour l'instant on ne peut plus classique, où la jeune fille va démarrer sa quête des douze compagnons. Mais alors, si la série démarre sur des bases aussi convenues, d'où vient son charme qui fait facilement son effet ?

Hé bien, en premier lieu, de son héroïne, qui s'avère plutôt bien campée dans son genre. Mignonne à souhait, vive et très volontaire, Yachiyo étonne dans un premier temps dans sa façon de se poser peu de questions et de s'habituer très vite à devoir combattre, mais cela colle bien à une jeune fille que l'on découvre vraiment combattive. Ayant un sens pointu de la justice et se souciant beaucoup du sort des autres (ce n'est pas pour rien qu'elle faisait dans le bénévolat dans notre monde), elle semble bel et bien avoir les qualités requises pour être la réincarnation de la déesse de l'harmonie... Mais il lui faudra le prouver. Après tout, elle reste une adolescente, collégienne de surcroit, certaines de ses premières rencontres ne manquent pas de mettre en doute le statut divin qu'on lui promet, mais peut-être changeront-elles vite d'avis à son contact... Une chose est sûre, Yachiyo est le genre de jeune héroïne que l'on devrait prendre plaisir à suivre, de par le dynamisme et les valeurs qu'elle incarne.

Suivre Yachiyo dans son périple devrait promettre au lecteur la découverte, petit à petit, d'un monde dont les différentes contrées (deux dans ce premier tome, pour deux premiers compagnons de route aux côtés de la jeune fille) s'annoncent assez différentes, que ce soit dans leurs décors ou dans leurs problèmes respectifs. Problèmes que notre héroïne devra évidemment résoudre. Mais les différentes contrées de cet univers ont un point commun intéressant et prometteur : un ancrage dans une atmosphère s'inspirant du bouddhisme et de l'hindouisme (un univers qui semble bien plaire à Sayuki, qui s'inspirait déjà des destinées bouddhiques pour Les Six Destinées). Certains décors et costumes sont là pour nous en montrer un peu de temps à autre, mais ces inspiration passent surtout par d'autres choses. Les 12 compagnons à retrouver évidemment, qui seront des représentations des 12 signes du zodiaque chinois (pour l'instant, le sanglier et le singe). Mais aussi le système de transfert des âmes et de réincarnation, les nombreux noms à connotation hindouiste... sans oublier l'une des grosses spécificités de la série.

Cette spécificité, c'est la possibilité qu’a Sakuya de pouvoir fusionner avec chacun de ses compagnons, afin de dévoiler des "personnalités" alternatives, aux tenues et capacités propres, et s'inspirant directement de figures. Ainsi, dans le cas de ce premier tome, le singe lui permet de venir la figure bien connue de Hanuman, tandis que le sanglier peut faire d'elle Varâha, une figure peut-être un peu moins connue chez nous : dans l'hindouisme, Varâha est le troisième avatar de Vishnou, s'incarnant en sanglier pour vaincre Hiranyaksha, un démon qui avait entraîné la terre dans les océans.
Dans Nirvana, en plus d'offrir à Yachiyo des capacités spécifiques, les différents compagnons devraient visiblement tous avoir leur propre spécialité. Dans le cas du sanglier la maîtrise de la terre, et dans le cas du singe celle du vent. Ici aussi, les scénariste prennent soin de se rattacher aux figures hindouistes qu'ils reprennent (rappelons que dans l'hindouisme, Varâha a sauvé la terre, et que Hanuman est le fils du dieu du vent).
Evidemment, pour l'heure rien de très original dans les "pouvoirs", mais l'intérêt pourrait venir d'un grand éclectisme et de nombreuses possibilités, qui devraient amener de la variété dans les combats. En tout cas, de la variété, il y en a déjà au niveau des deux premières contrées visitées, tirant totalement parti de leur spécialité terre/vent.
Les combats eux-mêmes sont pour l'instant assez brefs, et ont le mérite de ne pas se reposer uniquement sur l'action pure, et, surtout, d'oser quelques morts marquantes pour les personnages, ce qui donne d'emblée une tonalité assez prometteuse.

Visuellement, Sayuki rend une jolie copie. Son trait expressif et dynamique offre des choses claires et bien vivantes. Bien qu'offrant un découpage des cases assez académique (elles sont quasiment toujours bien délimitées et espacées), l'artiste varie beaucoup le format des cases-elles-mêmes, ne se limite pas, et s'offre régulièrement des petites "sorties" qui accentuent le côté vif. C'est, en somme, soigné et facilement prenant. On appréciera également les quelques pages iconiques lors des phases de combat, ainsi que certains petits clins d'oeil (par exemple celui à Kazuo Umezu en page 102, qu'on ne voit pas venir et qui fait plaisir).

Sur une mise en place classique, Jin et Sayuki parviennent alors à offrir une entrée en matière pleine de jolies promesses, avec un univers qui s'installe bien et qui propose pas mal de possibilités, le tout étant porté par le genre d'héroïne facilement attachante grâce à son caractère très volontaire et empathique. Une affaire à suivre, mais pour l'heure Nirvana a tout en main pour proposer un bon petit divertissement.

En ce qui concerne l'édition, c'est du tout bon pour Doki-Doki. Les quatre premières pages en couleurs sont fort plaisantes, l'impression en Italie chez Lego est faite sur un papier souple et suffisamment épais qui ne laisse pas l'encre baver, la traduction de l'expérimentée Fédoua Lamodière fait bien ressortir toute la vivacité du récit et est parfaitement appliquée sur les différents noms souvent spécifiques. N'oubliez pas de retirer la jaquette, pour trouver sur la couverture de petites présentations de la déesse de l'harmonie, du pays du Sanglier et du pays du Singe.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
13.5 20
Note de la rédaction