Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 28 Juillet 2023
Nana Komatsu a découvert un nouveau monde, celui de sa colocataire, Nana Osaki. Ainsi, l'ancien groupe de musique reprend forme, et un nouveau bassiste est même recruté en la personne de Shin-ichi, un jeune garçon vagabond dont l'objectif fixé sera désormais de dépasser Ren. Malgré cet enthousiasme débordait, le quotidien de Hachi est constitué de hauts et de bas. Et à tant fricoter du côté de sa nouvelle amie, elle ignore ce qui se passe du côté de Shôji, son compagnon.
"C'est peut-être la première fois de ma vie que j'ai le cœur qui bat comme ça."
Après deux volumes, les bases du récit phare d'Ai Yazawa sont posées, et elles sont solides. Nana "Hachi", par cette vie nouvelle en colocation, découvre tout un univers de musique et de rock, bien loin du quotidien étudiant simple et douillet qu'elle comptait rejoindre avec Shôji et ses amis de longue date. La jeune fille va-t-elle jouer l'équilibriste entre ces deux univers, ou rejoindra-t-elle l'un d'eux ? La réponse commence à nous être donnée.
Sur cet opus, Nana répond à une nouvelle opposition. Si le manga lui-même brille par ce tout complémentaire que forment les deux héroïnes au même prénom, ce troisième tome se façonne autour de deux environnements distincts et qui ne feront que se séparer : la découverte passionnée de l'environnement musical de sa colocataire d'une part, et sa vie sentimentale avec Shôji, existante, mais qui réunit se moins en moins les deux tourtereaux. De par ce fossé se forme deux sentiments contraires chez le lecteur, l'euphorie et le désespoir, chacun montant au fil des pages, selon le point de vue traité par Ai Yazawa.
Il est donc difficile de ne pas s'enivrer, à l'instar de Hachi, de la reformation du groupe de Nana, Nobu et Yasu, auquel vient se greffer l'intrigant Shin. La mangaka développe superbement cette optique d'un point de vue émotionnel, tandis que l'alchimie entre les deux colocataires se fait de plus en plus fort. Malgré les quelques mauvaises nouvelles qui attendent Hachi, rien n'efface l'enthousiasme qu'on peut éprouvant face à tous ces moments. Et pourtant...
Car en parallèle à ces moments de bonheur pour la Nana coquette, Shôji voit son quotidien évoluer tel un destin pour lui, et telle une malédiction pour l'héroïne et pour le lecteur. C'est par un certain personnage que tout bascule, et on ne met pas longtemps à comprendre que ce chamboulement est inéluctable. C'est bien là où Ai Yazawa fait preuve de génie : le jonglage entre les ambiances est maîtrisé, et l'artiste sait jouer avec nos émotions en nous mettant témoin d'évolutions douloureuses, et qui se présentent comme une bombe à retardement. Si le basculement est assumé, qui sait ce qu'il pourra advenir de Hachi.
"Cette nuit-là, si tu n'avais pas été avec moi, Nana, je pense que je me serais jetée à l'eau et serais actuellement au fond du fleuve Tama."
C'est par cette réplique que s'achève ce troisième tome qui apporte énormément à l'oeuvre, présentant un programme frétillant tout en créant le désespoir progressivement. Après une telle fin, difficile de ne pas vouloir se jeter sur la suite, tout en la redoutant.