Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 23 Novembre 2018
Suite à l'hospitalisation de Ran et à la détresse d'Una, Kuko, malgré l'interdiction de Ran, a tout de même choisi de faire revenir Outa à Kobe... mais pour qui a-t-elle fait ça exactement ? Désemparée, la jeune fille, incapable de s'endormir, a appelé Sazuku en pleine nuit pour qu'il la rejoigne, mais elle regrette amèrement cette décision, en ayant une nouvelle fois l'impression de se servir des autres. Car Kuko est-elle si forte qu'il y paraît ? Suffisamment forte pour tout endosser seule comme elle a toujours cherché à le faire depuis la mort de sa mère ? La réponse est désormais évidente, et c'est en la voyant en larmes que Sazuku, troublé, décide lui aussi de se "servir d'elle" en l'embrassant...
Nagamu Nanaji gère toujours aussi bien son récit, avec un profond réalisme et un désir d'aborder la psychologie de son héroïne avec toujours autant de subtilité, dans sa complexité, en laissant bien voir à quel point cerner les émotions humaines peut être compliqué. Ainsi, le baiser impulsif, mais sincère de Sazuku, loin de calmer les choses, risque fort de plonger encore plus Kuko dans un mal-être profond. Et ce n'est sans doute pas en revoyant Outa après que ce mal-être va s'estomper...
"J'suis pas assez forte... pour être gentille."
Qu'est-ce qu'être fort ? La question est au centre de tout le volume. Kuko a toujours semblé forte aux yeux des autres, c'est l'image d'elle qu'elle voulait renvoyer. Une Kuko toujours souriante, toujours positive... Mais désormais, son masque n'est plus simplement effrité: il est complètement brisé. L'adolescente ne sait plus du tout quel visage montrer aux autres, alors peut-être lui faut-il enfin se montrer à nu, si tant est qu'elle y parvienne...
Et dans cette optique, ce volume est aussi très bon pour le traitement des personnages gravitant autour de la jeune fille. Kuko est en plein mal-être, elle a sans doute besoin de plus de soutien que jamais, mais il reste à savoir si ses proches le remarqueront à temps... Nagamu Nanaji va alors travailler avec le même soin l'entourage de son héroïne, des personnages qu'elle n'a jamais négligés jusque-là. En particulier ce sont les personnages d'Ibu et de Kiyo qui y gagnent, tout d'abord pour les sous-entendus sentimentaux d'Ibu qui ne peuvent que chambouler un peu Kiyo, mais aussi pour le parallèle qui est fait entre ces deux amoureux transis, et surtout pour la manière dont ils remettent en question la vision qu'ils ont de leur plus proche amie. Pourquoi donc ont-ils toujours voulu de leur Kuko reste la fille "forte" qu'ils ont toujours connues ? N'est-il pas temps devoir au-delà ?
Les planches de Nagamu Nanaji restent un régal de mise en scène et de non-dits, et ses différents mots et pages bonus sont toujours aussi plaisants à suivre. En particulier, Nanaji sait toujours aussi bien exploiter ses décors réels pour ancrer son histoire dans un cadre très crédible. A un volume de la fin, la série reste très pertinente dans son traitement complexe des personnages et très prenante dans son déroulement, et il est difficile de ne pas attendre avec beaucoup d'intérêt la suite et fin de l'histoire de Kuko...
"Je voulais peut-être qu'on me trouve... Qu'on trouve... la vraie moi..."