Mon mari dort dans le congélateur Vol.1 - Manga

Mon mari dort dans le congélateur Vol.1 : Critiques

Watashi no Otto wa Reitôko ni Nemutte Iru

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 13 Septembre 2022

Mon mari dort dans le congélateur... Derrière ce titre qui semble sortir tout droit de la collection WTF?! d'Akata, se cache pourtant un récit on ne peut plus sérieux, qui rejoint la collection Large de l'éditeur. A l'origine, cette oeuvre, nommée en japonais Watashi no Otto wa Reitôko ni Nemutte Iru (dont le nom française est une traduction au mot près), est une nouvelle écrite par Misaki Yazuki qui fut publiée dans son pays d'origine sur le site Everystar. Repérée par les éditions Shôgakukan, celle-ci est rapidement adaptée en manga par Hyaku Takara à partir de 2020, avec une prépublication sur plusieurs plateformes numériques (Manga One, Ura Sunday) avant une publication en 2 tomes brochés en 2021. Fort de son succès, ce récit a également été adapté en série live au Japon, la particularité de chacun des trois formats étant de proposer une conclusion assez différente.

Dans ce manga, tout commence par un meurtre: celui d'un homme, Ryô, par son épouse Nana. Froide, impassible, se mettant même à chantonner juste après son acte, la jeune femme fait une étrange impression d'emblée, et ça ne s'arrange pas forcément quand elle avoue qu'elle savait depuis longtemps qu'elle finirait par tuer son mari, puis quand elle décide de cacher le corps dans le vieux congélateur professionnel hérité de son grand-père et se trouvant dans la remise. Mais au bout de cette entrée en matière glauque à souhait, on finit par apprendre que Nana avait une raison de vouloir en finir avec Ryo: celui-ci ne cessait de ruiner son existence, en la rouant de coups, en la forçant à des actes dont elle n'avait pas toujours envie, et en la maltraitant de bien des façons. Mais cette situation ambiguë et glaçante est loin de s'arrêter là puisque, le lendemain matin, nana a la surprise de voir ressurgir devant elle un Ryô bien vivant, alors que dans le même temps le cadavre de ce dernier est toujours dans le congélateur...

Une fois les premières pages malaisantes passées, le récit ne s'arrête donc aucunement là, en allant toujours plus loin dans la psychologie de son héroïne grâce à une narration très introspectives où tout passe par ses pensées. Autant dire, donc, que l'on vit les troubles de nana au plus, à commencer par ses nombreuses interrogations. Comment peut-il y avoir un Ryô vivant et un autre mort dans le congélateur ? Son mari est-il vraiment décédé ou pas ? Si ce n'est pas le cas, qui a-t-elle tué, sachant que le cadavre du congélateur ressemble exactement à Ryô ? Ou alors, est-elle simplement en train de sombrer dans la folie en peinant à accepter son acte ? Les interrogations sont nombreuses, et pour le moment le récit prend soin de ne répondre à rien pour mieux nous embrouiller et nous intriguer, ce qui est encore plus le cas quand finissent par intervenir des personnages extérieurs au couple comme la "paonne" et surtout Kamata.

Tandis que le récit nous tient en haleine de par son aura aussi nébuleuse que glauque, on suit également avec intérêt et inquiétude, en oscillant entre empathie et effroi, les raisonnements de Nana face à cette situation, tant on sent que la jeune femme est elle-même en proie à la perdition pour diverses raisons: la redécouverte d'un "nouveau" Ryô qui semble bien plus attentionné que l'ancien (comme il pouvait l'être au début de leur relation) si bien qu'elle ne sait pas si elle doit le "re-tuer" ou non, son impossibilité de lui pardonner ses tromperies qui semblent perdurer, son besoin de se débarrasser du corps du congélateur qui la poussera à des décisions particulièrement malsaines... Mais si Hyaku Tanaka montre un grand talent pour entretenir ce côté glauque grâce à un gros travail de mise en scène tout en gardant une certaine pudeur, cela n'empêche aucunement l'oeuvre d'entamer, en réalité, pas mal de petites réflexions sur différents sujets: les relations de couples, les violences faites aux femmes, l'égalité entre les sexes dans un ménage, les raisons pouvant pousser quelqu'un à tuer, les sentiments difficiles pouvant naître d'un meurtre (sentiment de culpabilité, impossibilité de se détacher de l'acte...), etc.

On semble alors se diriger vers une bonne petite claque autant thématique que narrative et visuelle, et dont on attendra impatiemment la deuxième amitié, en espérant que l'excellente surprise se confirmera. En attendant, ce premier tome frappe fort en offrant un récit riche, à l'ambiance très travaillée, et dont il est impossible de prévoir la chute.

Côté édition, c'est du tout bon également avec une jaquette de Clémence Aresu proche de l'originale japonaise, un lettrage très propre de Tom "spAde" Bertrand et Adrien S., une traduction impeccable de la part de Claire Olivier, un papier assez épais et souple ainsi qu'une bonne qualité d'impression.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.75 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs