Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 06 Août 2024
Le long témoignage de Shichisaburo Ikeda est désormais achevé, et comme pour chaque nouvel arc/nouveau témoignage Takumi Nagayasu, dans son adaptation de l'oeuvre d'origine de Jiro Asada, commence par un nouveau petit focus sur les derniers instants de Kan'ichiro Yoshimura, le tout ponctué de plusieurs pages en couleurs, pour notre plus grand plaisir. Les souvenirs de sa mère, sa pauvreté, son désir d'offrir le meilleur à ses enfants, ou encore la tentative de suicide de son épouse Shizu reflétant encore certaines difficiles réalités de l'époque, ou encore la désertion de son domaine, le tout avec ce qu'il faut de regrets, de fiertés et de valeurs, sont autant de choses qui consolident de plus belle les raisons humaines pour lesquelles il avait beaucoup d'intérêt pour l'argent, et a décidé de se consacrer aux études et au sabre ainsi que de ne pas abandonner ses enfants en se vouant à une mort inutile... Les contradictions entre l'humain et le samouraï restent ainsi savamment dosées, avant que ne débute le quatrième témoignage.
Ce nouveau témoignage, il voit le journaliste suivre les conseils d'Ikeda et se rendre auprès d'un certain Gorô Fujita, en 1914 dans le quartier de Hongô à Tokyo. Là, il fait la connaissance d'un homme dédaigneux voire agressif, qui est d'abord totalement récalcitrant à l'idée de raconter quoi que ce soit, tout du moins jusqu'à ce qu'il entendre le journaliste prononcer le nom de Kan'ichirô. Car Fujita garde un souvenir exécrable de Yoshimura, à l'époque où il le fréquenta au sein du Shinsengumi, quand il se faisait encore appeler Hajime Saitô...
Evidemment, le nom de Hajime Saitô parlera à quiconque est un peu habitué aux oeuvres de sabres nippones, tant ce ce célèbre assassin a été maintes et maintes fois exploité par nombre d'auteurs(rien qu'en manga,n on pourrait notamment citer Kenshin le Vagabond, Chiruran, Gintama ou encore Peacemaker Kurogane). Et afin de mieux comprendre pourquoi le Hajime Saitô version Mibu Gishi Den exècre Kan'ichirô, il convient d'abord, pour les auteurs, d'exposer leu vision du célèbre personnage servant de quatrième témoin: son parcours, quel homme il était, son regard sur l'art du sabre, ses ambitions, son statut d'assassin... Via la découverte des origines du Shinsen Gumi qui est né selon lui sur fond de manipulations et de conspirations, on cerne rapidement un homme acerbe et dédaigneux, sans états d'âme vis-à-vis des autres, et cela pour une raison: son aversion généralisée pour le genre humain, ce qui en fait un type de personnage jusque-là assez inédit dans la série et donc à-même d'apporter une vision de Yoshimura bien différente des précédentes. Car quand bien même, au fil de sa rencontre avec Kan'ichirô, du combat qu'il a pu effectuer contre lui et de certaines de leurs oppositions, Saitô est en mesure de reconnaître le talent au sabre et l'éloquence de cet homme, sa haine à son égard découle de valeurs totalement incompatibles en termes d'humanité. Néanmoins, Saitô fait aussi partie de ces personnes ayant pu observer avec surprise les différentes facettes de Yoshimura, l'homme réservé et débonnaire pouvant à nouveau laisser place à quelqu'un de plus enflammé pour défendre sa vision des choses, voire à quelqu'un de plus impitoyable quand il s'agissait de tuer pour ne pas être tué.
Comme quasiment toujours dans la série, l'aspect "succession de témoignages" rend certains éléments un peu répétitifs et certaines séquences très bavardes et plan-plan, mais l'ensemble reste résolument rigoureux et passionnant, d'autant plus qu'il reste toujours ponctué de plusieurs anecdotes annexes, par exemple ici sur le cas de Sanjûrô Tani. Ce quatrième témoignage de la série démarre donc sur des bases suffisamment solides pour nous promettre une suite intéressante.