Métamorphose - Actualité manga

Métamorphose : Critiques

Henshin

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 24 Janvier 2019

Saki Yoshida est une jeune fille sérieuse, couvée par sa mère, un peu geekette sur les bords, mais également plutôt solitaire, timide et effacée, si bien qu'en trois années de collège elle n'a jamais su se faire la moindre amie, et qu'elle le regrette... Si bien que pour son entrée au lycée, elle a décidé de changer du tout au tout ! Désireuse de se sociabiliser et de s'embellir, elle se dit logiquement que pour commencer elle doit abandonner son ancien look ringard, se faire plus belle, et pour ça elle a même l'aide de sa mère pour des séances de maquillage et de shopping ! Au final, pour son entrée au lycée, c'est une Saki métamorphosée qui se présente à ses nouveaux camarades de classe: même si intérieurement elle n'a pas vraiment changé, sa nouvelle apparence pousse les autres à venir plus facilement vers elle, et rapidement Saki a enfin le sentiment d'être appréciée et aimée, au point d'en pleurer. Est-ce le début du bonheur pour elle ? Pas si sûr, car l'apparence ne peut pas tout faire. Pire, elle peut même attirer les pires garçons, à commencer par Hayato, un étudiant qui la drague en pleine rue, lui dit qu'elle est belle et qu'il l'aime. Emue par ces mots qu'elle n'avait jamais entendus de sa vie, la naïve jeune fille finit par le suivre dans un karaoké, où une drogue discrètement administrée par le jeune homme a vite raison d'elle. Il s'agit là du premier arc sordide d'un avenir où Saki s'éveillera intensément aux plaisirs du sexe auquel elle est très sensible, tout en connaissant en parallèle une horrible chute psychologique et physique où elle ira de mal en pis, sans le moindre espoir de retour en arrière...

En ce début d'année 2019, le manga X fait peau neuve aux éditions Taifu Comics avec le lancement d'un nouveau label: NihoNiba, bâti sur les reste de la très éphémères collection Peach dont il reprend les spécificités, notamment l'apparition en 4e de couverture de tags. Avec cette collection, l'éditeur semble vouloir mieux détacher Taifu Comics des mangas X, puisque le logo de Taifu n'apparaît nulle part sur la jaquette. NihoNiba marque également les débuts d'une collaboration de prestige avec Wanimagazine, un éditeur japonais de hentai qui est peut-être le plus réputé, grâce à ses auteurs reconnus et à ses oeuvres se voulant très qualitatives autant côté histoire que côté dessins (disons-le clairement: on est très loin des daubes de l'éditeur nippon Kaiôsha sorties en France aux éditions Hot Manga). Pour inaugurer tout ça sous les meilleurs auspices, l'éditeur a choisi un récit-choc, une histoire complète en 7 chapitres et 240 pages: Métamorphose, de son nom original Henshin, l'un des titres les plus réputés de Shindo L, un mangaka connu pour ses récits loin d'être tendres et exploitant souvent en toile de fond un portrait sombre de la société.

Et c'est totalement le cas ici, avec une histoire de plus en plus dure, tant elle n'épargne rien à la jeune Saki, adolescente dont le désir de se transformer va très vite virer au cauchemar... mais un cauchemar où elle finit très rapidement par se complaire, en se jetant à corps perdu dans le sexe à outrance et toujours plus brutal comme pour tenter d'échapper aux horreurs qui lui tombent dessus sans qu'elle puisse rien y faire: la drogue et et les mauvaises intentions de hommes (comme Hayato et les garçons du lycée) bien sûr, mais aussi la difficulté de s'adapter aux conversations de ses "amies" qui ne parlent que d'apparence et de marques, la prostitution pour gagner facilement de l'argent, les actes odieux d'un père se soulageant sur elle pour évacuer ses propres pressions concernant le travail, l'exploitation, la situation de SDF... Mine de rien, Shindo L brasse au fil des pages un paquet de tares et de vices de sa société, ce qui amène une réelle consistance à son manga en arrière-plan. Crue et dure dès le départ, Métamorphose ne fait alors que s'assombrir toujours plus, choquer à plusieurs reprises, jusqu'à une issue tragique et implacable qui frappe un grand coup, tant on n'a pas l'habitude de voir ça dans le paysage hentai français.

Tout ça est donc emballé dans un rendu pornographique où l'auteur n'épargne rien, puisque Saki va vivre beaucoup d'expériences très différentes, ce qui d'emblée rend les scènes de sexe très variées. En plus de cela, le dessinateur offre un coup de crayon à la fois charmant dans la beauté de Saki (une beauté que l'on voit s'effriter au fil des pages), brutal dans tout ce que la jeune fille traverse, et viscéral dans sa représentation des nombreuses scènes hot. D'autant plus viscéral que la narration, en passant exclusivement par Saki, nous présente tout ce qu'elle ressent, toute sa métamorphose, rendant alors l'oeuvre d'autant plus dérangeante. L'auteur joue également très bien sur les changements de look de l'héroïne, qui sont à chaque fois les parfaits témoins de sa chute. Enfin, le trait de l'auteur est, en lui-même, d'une grande beauté, riche, expressif avec des expressions faciales exagérées qui renforcent le malaise, mis en valeur par une mise en scène très variée, et également soignée dans les décors qui rendent les choses encore plus immersives.

Au final, Métamorphose n'a pas volé sa réputation. Crue, sombre et dérangeante, l'oeuvre ne manquera pas de diviser, mais dans tous les cas il s'agit d'une vraie réussite dans sa catégorie.

Côté édition, on retrouve sensiblement les mêmes caractéristiques que pour les précédentes collections hentai non censuré de Taifu: grand format, bonne qualité de papier et d'impression, première page en couleur, et traduction efficace de Nicolas Pujol dont les choix de langage collent bien.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs