Kiriko - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 29 Septembre 2016

Dans un collège aujourd'hui fermé, six anciens élèves se retrouvent, seize années après avoir quitté les lieux sans jamais se revoir. Ils ont été invités par l'énigmatique K à venir déterrer une capsule temporelle, mais aussi à commémorer le seizième anniversaire de la mort de leur camarade de classe Setsuko, leur idole de l'époque qui s'est suicidée. Mais si les premiers instants de la réunion se déroulent de façon plutôt conviviale, c'est bientôt l'angoisse qui apparaît lorsque se met à flotter dans les lieux un parfum de mort... Car les six trentenaires ne sont pas seuls dans l'établissement, et l'énigmatique septième présence semble résolue à les abattre violemment les uns après les autres... et sans échappatoire possible. Qui cherche à les massacrer les uns après les autres ? Qui est ce K qui leur a envoyé la lettre ? Pour quelle raison les choses prennent-elles une telle tournure ? Y a-t-il un rapport avec la mort de Setsuko 16 ans auparavant ? Et dans ce cas, que s'est-il réellement passé à cette époque ?

Après le très fun Ping Pong Dash!! aux éditions Doki-Doki puis un délicieusement gore Hakaiju de très bonne facture chez Tonkam, c'est désormais aux éditions Komikku que l'on retrouve le mangaka Shingo Honda avec Kiriko, un récit de 5 chapitres pour un total de 190 pages, qui fut publié au Japon de 2014 à début 2015 chez Nihon Bungeisha dans le magazine Goraku (le magazine d'Inspecteur Kurokôchi, de Hitman, ou de la Photographe).

Dans sa brève préface, l'auteur avoue avoir voulu créer un manga proche d'un film d'horreur japonais, mais qui a fini par prendre une tournure un brin différente. Et cela, on le ressent bien. En effet, l'aura de mystère autour de l'entité meurtrière, si elle possède bien un look horrifique bien typé (une grande silhouette tout en longueur, ayant le visage soigneusement camouflé par le mangaka pendant une bonne partie du tome, un peu à la façon d'un slender), se voit très vite mise de côté tant on devine une bonne partie des choses, et tant finalement l'auteur ne cherche pas à instaurer un climat d'angoisse forte. Le gore fait très vite son apparition, les morts sont brutales et bien montrées, nous ne sommes finalement pas dans de l'horreur suggérée comme l'aiment si souvent les Japonais.

Passé ce premier constat, il faut bien avouer que les différents rebondissements du récit sont quasiment tous de gros poncifs du genre. Les six personnages sont des stéréotypes (le personnage principal a priori bien sous tous rapports qui veut lever le voile sur le soi-disant suicide de Setsuko, le colérique violent, la bimbo peu fréquentable, la beauté un peu potiche, l'asocial, le bohème) qui ont évidemment tous leurs petits secrets, la majeure partie des révélations ne surprend pas (notamment concernant ce qu'est l'entité meurtrière, l'identité de K, ou le rôle final de la capsule temporelle)... Quant au twist final, il reste un bon classique même si elle pourra surprendre un peu les moins habitués du genre, et tire bien parti des différentes situations visant tout au long du tome à embellir Setsuko. Sur ce dernier point, Honda évite d'ailleurs habilement les quelques incohérences que ça aurait pu créer, notamment les déclarations de Kazuya et Rio au début concernant Setsuko (une fois la fin connue, les rires et les canettes d'alcool prennent un autre sens).

Cela fait-il de Kiriko un one-shot décevant ? Hé bien pas du tout, car Shingo Honda n'a certainement à aucun moment la prétention d'apporter du neuf, et s'accapare un scénario ultra classique avant tout pour une chose : se faire plaisir ! Et là-dessus, l'auteur a tout compris !
Il paraît vite évident que ce huis clos en forme de chasse à l'homme sera avant tout un petit jeu de massacre gore où les personnages mourront les uns après les autres, et de ce côté-là on retrouve toute la virtuosité trash que l'auteur montrait déjà dans Hakaiju. Les mises à mort sont bien disséminées, et chacune d'elles bénéficie d'un soin délectable dans le gore poussé, un brin ridicule (il faut voir l'état des deux premiers cadavres, où la façon dont certaines parties des corps volent en charpie) et donc assez jouissif pour qui aime le genre, d'autant que la mise en scène est bien appliqué dans ces moments-là et que la patte de Honda s'y montre bien dense. Honda alterne efficacement ces instants gores avec les moments de peur des personnages et les différentes révélations, le tout étant suffisamment bien huilé afin d'offrir un divertissement sans temps mort. Pour bien porter tout ça, la narration claire et constamment tendue est réussie, tout comme certains instants totalement cinématographiques (à l'image de la page 97, voyant les personnages parler tandis que derrière eux l'ombre meurtrière approche peu à peu de la fenêtre).

Au bout du compte, Kiriko est one-shot qui doit beaucoup à l'expérience de Shingo Honda pour ce style, mais aussi au plaisir évident que le mangaka a pris en dessinant ces cinq chapitres. L'oeuvre, sans prétention, est d'un total classicisme qui semble assumé, mais sait offrir un divertissement rythmé et un brin gore qui se lit tout seul.

Qui plus est, on retrouve ici les habituels standards de qualité des éditions Komikku. L'imprimeur Aubin offre un papier souple et suffisamment épais qui absorbe bien l'encre et rend honneur au travail parfois très dense de l'auteur. Le sous-titrage des onomatopées est soigné, et Yohan Leclerc livre une traduction vivante et rythmée.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
14.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs