Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 26 Août 2025
Nous avons pu découvrir Sawako Arashida avec sa toute première série, Fullmetal Knights Chevalion, aux éditions Akata. Si la mangaka a continué son bonhomme de chemin au Japon, c’était silence radio de notre côté. Du moins… jusqu’à ce que Panini jette son dévolu sur l’actuelle série de l’autrice !
En cours depuis 2022 dans le magazine Harta des éditions Enterbrain (affiliées à Kadokawa Shoten), sous son titre original Kirakira to Giragira, La Belle et le Badass compte à ce jour quatre volumes dans son pays d’origine. De nouveau, Sawako Arashida aborde une comédie parodique, cette fois autour de deux types de mangas aux antipodes l’un de l’autre : le shôjo de romance face au furyô hardboiled.
Belle et douce, la jeune Lulu Himeji quitte la superbe académie Kira Kira suite au déménagement de ses parents. Une nouvelle page de sa vie se tourne, certainement pleine de chaleureuses rencontres, mais ce qui l’attend déjoue complètement ses espoirs. Le lycée Gokumon est un repaire de voyous, de durs à cuire et de demoiselles aux tempéraments bien trempés. Pourtant, un visage lui est presque familier, celui d’un élève du fond de classe qu’on surnomme « le caïd ». Celui-ci semble être Zen Gokurakuji, ami d’enfance de Lulu autrefois chétif et candide. Malgré un changement improbable chez le jeune homme, les indices ne trompent pas. En plus de ce nouveau climat lycéen presque hostile, Lulu doit faire face à ce caïd qui, pour l’heure, lui ferme son cœur…
D’entrée de jeu, ce premier tome de La Belle et le Badass nous emporte avec sa proposition. Sawako Arashida ne cherche nullement à faire traîner les choses pour nous présenter l’unicité de son titre, aussi l’histoire s’ouvre comme une caricature volontaire de shôjo romantique vintage, pur et naïf, avant de créer une rupture avec l’environnement furyô du titre. La mangaka a comme excellente idée de développer une opposition scénaristique via les caractères des personnages, mais aussi graphique. Ainsi, les traits ronds et innocents qui forment la jeune Lulu sont en contraste total avec le taciturne lycée Gokumon et, surtout, avec les camarades de classe de l’héroïne dont les allures massives et les traits carrés du visage nous renvoient au style de Tetsuo Hara, avec Hokuto no Ken notamment. On sent bien que l’autrice s’est inspirée des designs si marqués de l’œuvre culte de Hara et de Buronson, série où se côtoient de vrais colosses sur pattes et de jeunes femmes à la beauté typique du manga d’époque presque irréelle. L’opposition est bien pensée et amuse très rapidement. Seulement, est-ce suffisant pour créer une amorce réussie ?
Car la crainte était de voir l’efficacité de cette proposition retomber rapidement et le récit devenir répétitif dans son humour. Pourtant, Sawako Arashida parvient à entretenir la saveur de son œuvre en plongeant davantage dans l’ambiance du lycée Gokumon, plantant quelques rivalités ci et là, poussant au maximum les clichés pour garder une aura kitsch, mais aussi aborder davantage la relation entre Lulu et Gokurakuji. Mieux encore : ce qui aurait pu n’être qu’un simple ressort comique est enrichi par des éléments de teasing qui pourraient justifier le contraste entre l’héroïne et son nouvel environnement, un ressort absurde de l’ordre du fantastique qui a sa place dans une série aussi barrée.
Pour l’heure, il y a donc de quoi être satisfait par La Belle et le Badass. La mangaka semble avoir suffisamment d’idées pour ne pas tomber dans la répétition en plus d’introduire quelques « mystères », ce qui laisse de bons espoirs pour une suite efficace. Un début au charme indéniable, donc pour un résultat unique.