Ile errante (l') Vol.1 - Actualité manga
Ile errante (l') Vol.1 - Manga

Ile errante (l') Vol.1 : Critiques

Bouken Erekitetou

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 13 Septembre 2017

En cette rentrée 2017, la collection Latitudes des éditions Ki-oon accueille un mangaka aussi talentueux que trop rare en France. Surtout connu dans notre pays pour les mangas Spirit of Wonder (sorti chez Casterman en 1999) et Forget-Me-Not (paru en 2004, là aussi chez Casterman), Kenji Tsuruta est un artiste touchant à plusieurs domaines, adorant également la photographie, et ayant mis ses talents au profit du studio Gainax côté animation en concevant le character design original d'Abenobashi. Ses oeuvres sont généralement marquées par des décors invitant à la contemplation et par des héroïnes aussi séduisantes que fortes, et l'on retrouve bien ces éléments dans L'île errante.


L'île errante nous invite à suivre Mikura Amelia, jeune femme qui a fait le choix d'exercer le métier de pilote d'hydravion, chargée de livrer des colis entre les différentes petites îles éloignées de la préfecture de Tokyo. Elle habite essentiellement à Oshima, et son travail lui permet de nouer des liens avec certains habitants de ces ilots, et de faire des rencontres inattendues comme celle de Sanjuro, un dauphin équipe d'un collier émetteur. Mais qu'on se le dise, sa vie se partage avant tout entre l'océan pacifique et le ciel. 


Mais son quotidien bascule un peu lorsque son grand-père, qui l'a élevée, s'éteint, en lui laissant un étrange héritage : d'abord sa maison à Hahajima, mais surtout ce qu'elle y déniche à son attention, à savoir des carnets de recherches s'étalant sur 30 ans et visant à localiser une île légendaire du nom d'Electriciteit, l'île électrique. A cela s'ajoute un mystérieux colis à livrer sur cette île, et dédié à une certaine Mme Amelia... "L'île errante", comme on la surnomme chez certains habitants des îles de la préfecture, n'est présente sur aucune carte, certains disent qu'elle apparaît dans l'océan aussi vite qu'elle disparaît, et personne ne peut vraiment témoigner de son existence. Mikura est pourtant décidée à reprendre le flambeau de son grand-père, en se mettant à son tour en quête de cette île...


L'histoire de L'île errante est on ne peut plus simple : avec pour seules armes les recherches de son grand-père, certains témoignages récoltés, ses tentatives d'analyse des indices et surtout sa détermination, Mikura fera tout pour dénicher Electriciteit, qui voguerait quelque part sur l'océan pacifique, en cycles, inlassablement... Quand elle pense la repérer et pouvoir s'en approcher, il semble que ce ne soit qu'une illusion puisqu'elle est retrouvée inanimée avec son hydravion à moitié sous l'eau. Et quand elle pense récupérer de précieux témoignages, pour certains d'entre eux il ne semble s'agir que d'élucubrations incertaines. Pourtant, la quête de cet insaisissable bout de terre l'obsède, au risque de parfois sacrifier un peu son travail et de ne plus être en forme... doit-elle passer à autre chose ?


Ce serait mal connaître Mikura, car elle est une héroïne typique de Tsuruta : une femme forte et déterminée, voire têtue ! A l'image d'une Mariel Imari de Forget-Me-Not, Mikura est le genre de femme qui ne lâche rien et qui séduit beaucoup pour ça... mais son côté séduisant ne s'arrête pas là, car elle est également une héroïne qui ne manque pas de charme. Tsuruta a déjà largement démontré dans ses précédents travaux son talent pour croquer des femmes délicieuses, et il le prouve à nouveau ici en dépeignant constamment les charmes d'une jeune femme dont on croirait qu'il est lui-même épris, tant il sait en faire ressortir le beauté fine sans jamais être racoleur. Mikura apparaît d'autant plus charmante qu'au fil de ses investigations, on a l'occasion de brièvement découvrir certaines facettes de son passé : elle a souvent changé de nom à cause de ses parents, a étudié à Hawaï, a un ancien amour pour le défunt M. Ryugo qui fut son enseignant... mais est-il réellement mort ? Elle semble toujours avoir l'espoir du contraire.


Mais l'oeuvre est avant tout un parfait prétexte pour que l'auteur s'adonne à ce qu'il adore : une immersion dans une quête qui se veut très contemplative. D'emblée le cadre de ces petites îles apporte quelque chose de dépaysant, le partage de Mikura entre ciel et mer ne fait qu'accentuer la rêverie, et la quête peut-être impossible de cette île amène un parfum d'aventure et d'évasion.


Tout cela, l'artiste sait le sublimer à travers ses dessins d'une beauté folle. La jolie silhouette de Mikura ne cesse de se promener dans des décors sublimes, entre les vues du ciel et de l'océan avec en point de mire son très détaillé hydravion, ses vues insulaires ou parfois continentales qui sont photographiques et s'avèrent très bien travaillées... On peut aussi évoquer certains intérieurs très immersifs, on pense notamment à l'intérieur de la maison où vit Mikura, que l'on voit sous de nombreux angles et avec de nombreux détails au point de pouvoir la reconstituer. Les décors ont autant d'importance que les personnages eux-mêmes, et pour les mettre en valeur autant qu'il le souhaite Tsuruta emploie quasiment toujours de grandes cases (on dépasse très rarement les 4 cases par planche).


Sur ce premier volume, L'île errante est un superbe voyage contemplatif, aux côtés d'une héroïne de charme et de caractère, à la quête de ce qui est peut-être une simple chimère, un simple rêve... On se laisse happer avec plaisir.


Du côté de l'édition, on appréciera beaucoup le grand format typique de la collection Latitudes, qui permet de profiter comme il se doit des talents visuels de l'artiste. La traduction de Géraldine Oudin est soignée, le papier allie souplesse et épaisseur, l'impression en Italie chez Lego est excellente, et sur la couverture le logo-titre s'offre un bel embossage.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs