Ghost in the shell Vol.1 - Actualité manga
Ghost in the shell Vol.1 - Manga

Ghost in the shell Vol.1 : Critiques

Koukaku Kidoutai

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 17 Octobre 2011

Aux environs de l’année 2030, le monde a connu des innovations scientifiques sans précédent. Il est désormais possible de mécaniser l’homme partiellement ou complètement. Ces personnes sont ainsi appelées cyborgs et représentent une part non négligeable de la population mondiale. À côté de cela, les inventeurs sont même parvenus à créer des androïdes, des robots qui ne sont pas issus de corps humains, et qui sont utilisés pour des tâches de gestion courante. En plus de la biomécanique et de la robotique, l’informatique s’est immensément répandue, et l’alliance des cyborgs, des androïdes, et de l’informatique forme un monde où la mécatronique est au centre des préoccupations. En conséquence, les gouvernements ont mis en place des sections spéciales visant à lutter contre la cybercriminalité.
Au Japon, c’est la section 9, aux commandes du chef Aramaki et du major Motoko Kusanagi, un cyborg femelle complet, qui est chargée des affaires de cyber-terrorisme, la plupart des interventions étant physiques, violentes et même au bord de la légalité.

Ghost in the Shell est un manga communément admis comme appartenant au genre de science-fiction cyberpunk. En effet, l’aspect sous lequel Shirow Masamune décide de raconter son histoire donne l’impression au lecteur que l’ultra-vulgarisation des nouvelles technologies représente un danger permanent : le lavage de cerveaux, le hacking à grande échelle, les virus qui rendent les machines sanguinaires… L’ambiance se prête parfaitement à la définition de ce style. Et c’est à travers les missions de la section 9 que cet aspect froid du futur est présenté. Chaque chapitre du manga met en scène une mission de la faction. Pour ce tome un, il sera question de mettre fin aux activités d’un foyer d’orphelin qui met en place un programme éducatif des plus illégaux, d’identifier le coupable du piratage du cerveau d’un interprète politique, d’arrêter un virus qui rend fous certains modèles d’androïde au point de dévorer des humains et de retrouver un cyborg de combat russe introduit illégalement sur le territoire nippon.

Ces histoires en elles-mêmes forment un divertissement tout à fait satisfaisant. Les chapitres offrent leur lot de rebondissements, mais force est de constater que l’intérêt du manga n’est pas là. Il faut savoir qu’il est difficile d’établir un lien entre les chapitres, il n’y aucune intrigue de fond dans ce tome un. Et pour aller de pair, on entre rarement pleinement dans le subconscient et la vie personnelle des protagonistes. On sait que le major est une cyborg complète, que Batou vient de l’armée et est un cyborg partiel, que Togusa était dans la police et à une femme et un enfant, mais cela n’ira guère plus loin dans les détails.

En réalité, Shirow Masamune a opté pour un manga de courte longueur, mais offrant des thématiques variées et surtout poussées. L’auteur est un mordu de sciences, et il nous fait partager son savoir, ses théories et ses avis personnels dans Ghost in the Shell. Il le fait bien sûr en l’intégrant dans l’histoire, à travers les évènements, mais aussi de manière plus abrupte, par le biais de notes qui apparaissent au fil des pages. Elles sont nombreuses et riches en informations, ce qui peut poser un souci de fluidité dans la lecture, mais elles donnent au manga une dimension intellectuelle. Pour vérifier si ses théories ainsi que la façon dont il les intègre dans l’histoire sont plausibles, il faut avoir beaucoup de notions en informatique, en mécanique et en biologie. L’univers apparait au lecteur comme tout à fait cohérent, voire envisageable, il en ressort donc une sensation d’immersion totale au cœur d’un futur qui nous parait loin mais qui pourrait être le nôtre. Shirow Masamune a d’ailleurs son propre propos au sujet de ce qu’il appelle "Ghost" et qui a donné son nom au manga. C’est un concept assimilable à l’âme, à la faculté de penser, qu’on peut imputer aux humains et aux cyborgs mais pas aux androïdes et aux intelligences artificielles. Et en plus des sciences, le cadre des missions la section 9 emmène les personnages à rencontrer des hommes politiques japonais et étrangers, qui offre une variation supplémentaire aux thématiques et qui se rattache bien souvent au présent (ou plutôt au moment où l’auteur a écrit le manga, c’est-à-dire en 1989). S’il y a bien toutefois un reproche à faire à cette volonté de créer un univers cohérent plutôt que de favoriser l’intrigue, c’est qu’il est parfois difficile d’appréhender certains éléments clés propres à chaque histoire. Les personnages réagissent en fonction de qu’ils voient et savent et il y a très peu d’apartés avec les lecteurs pour recadrer les clés de compréhension, notamment sur tout ce qui est scientifique. Bizarrement, ce ne sont pas les notes de l’auteur qui arrangent vraiment les choses, car lui-même ne pose pas de base sur ses thématiques et expose ce qu’il sait, il ne clarifie que ce qu’il ne trouve lui-même pas clair.

D’un point de vue graphique, Shirow Masamune n’est peut-être pas le meilleur dessinateur de son époque. Il n’y a pas de réel défaut de proportion, mais trop souvent des simplifications. Par moment, les personnages prennent des expressions étonnées et le trait devient plus basique, pas fin du tout, pas de détail. On notera aussi que le design des personnages est relativement instable. Il suffira que Batou mette des lunettes pour qu’on ne le reconnaisse pas ! Le découpage des actions est quant à lui satisfaisant.

En ce qui concerne l’édition, il y a des choses à dire. Sorti en 1996, il semblerait que Glénat ait voulu vendre Ghost in the Shell comme une BD plus que comme un manga : grand format, couverture cartonnée, sens de lecture occidental. À cette époque, Glénat est passé par les Américains de Dark Horse Comics pour obtenir les droits de la licence, ce qui signifie que l’ouvrage est basé sur la version américaine du manga. Pour conséquence, la traduction est faite à partir de l’Anglais, or une double traduction peut déformer les vrais propos de l’auteur, et des planches à caractère érotique du chapitre Junk Jungle ont été supprimées à titre de censure (sinon, le manga aurait été interdit aux moins de 18 ans aux États-Unis). Malgré tout, il n’y a pas vraiment de quoi se plaindre. Les pages sont imprimées sur papier glacé, les paroles des protagonistes ne sont pas guindées malgré la double traduction. Le vrai bémol concerne la couverture, l’idée de mettre un dessin découpé du manga sur un fond de synthèse ne rend pas très bien.

Ghost in the Shell est donc réservé à un public à la recherche d’une lecture dense. Shirow Masamune a une vraie vision du futur, et peut se définir comme un grand auteur de science-fiction.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Raimaru
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs