Frau Faust Vol.1 - Actualité manga
Frau Faust Vol.1 - Manga

Frau Faust Vol.1 : Critiques

Frau Faust

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 06 Novembre 2017

Jusqu'à présent, nous ne connaissions de la mangaka Kore Yamazaki que The Ancient Magus Bride, publié chez nous par Komikku, véritable fable humaine et contemplative qui a rapidement séduit le public, aussi bien au Japon qu'en France, et qui a actuellement droit à une hausse de popularité grâce à son adaptation animée par WIT Studio. Pourtant, l'autrice est à l'origine d'une poignée d'autres récits. Sa première œuvre reliée s'intitule Futari no Renai Shoka (que l'on pourrait vaguement traduire par « La bibliothèque de notre amour »), débuté en 2012 et achevé en deux volumes. Un an après le début de The Ancient Magus Bride, en 2014, la mangaka démarre Frau Faust dans les pages du magazine Itan de l'éditeur Kôdansha, une série contenant cinq tomes au total.


Etant donné le petit succès de Kore Yamazaki en France, il était peu étonnant que d'autres de ses œuvres atteignent nos étalages. On s'attendait donc à voir Komikku se pencher sur les deux autres titres, voire les futurs récits, de l'autrice, mais c'est sans compter Pika qui nous propose le premier opus de Frau Faust en ce début d'automne 2017.


En des temps passés, au sein d'un petit village, le jeune Marion fait la connaissance de Johanna Faust, une femme un poil excentrique, mais qui a sauvé le garçon après avoir été pris en flagrant délit de vol. Un marché est négocié entre eux : pendant quelques jours, Johanna restera aux côtés de Marion et veillera même à l'éducation qu'il n'a plus depuis des années, à condition que l'adolescent lui rende un précieux service lors de la nuit de la Nouvelle Lune. Le soir venu, Marion apprend la réelle identité de sa nouvelle compagne : elle est le Docteur Johanna Faust, celle dont parlent les légendes et qui noua un pacte avec le démon Mephistopheles. Mais l'entité démoniaque a été démembrée, et Johanna voyage dans le but de reconstituer celui avec qui elle a pactisé autrefois... Évidemment, l’Église ne peut rester impassible face à l'éventuel retour du Démon.


Frau Faust, terme allemand traduisible par « Mme Faust », est inspiré du mythe allemand éponyme. Les origines de ce récit sont complexes, car nées d'un alchimiste qui a existé, le Docteur Johann Georg Faust, avant d'être reprises, d'abord par Christopher Marlowe en 1604, puis par Johann Wolfgang von Goethe au XIXe siècle. Avec The Ancient Magus Bride, nous avons appris que Kore Yamazaki est particulièrement friande des mythes et légendes occidentaux, sa série phare elle-même contenant une belle quantité de références. Voir la mangaka s'intéresser au célèbre mythe de Faust n'a donc rien de bien étonnant, au contraire même, son œuvre globale restant ainsi très cohérente.


Toutefois, ce premier tome de Frau Faust nous montre que la série n'est pas partie pour être un ersatz de son récit phare. Avec ce premier volume, Kore Yamazaki pose les bases d'une histoire qui semble effectivement très inspirée du mythe de Faust tel que l'a écrit Goethe, mais reprend différents éléments à sa sauce dans l'optique de créer une histoire fantastique autour du célèbre savant, et des liens qui l'unissent au démon Mephistophélès. Ce premier opus instaure alors bien des éléments pour ce récit en cinq tomes : la reconstitution du personnage de Faust qui est ici présenté comme une femme espiègle, mais humaine, son lien encore très flou avec l'entité démoniaque, sa quête pour le faire revenir, et surtout un grand mystère autour de la disparition de Mephistopheles, il y a longtemps. Alors, connaître le mythe de Faust n'est pas nécessaire pour apprécier ce premier volume. Les débuts de l'intrigue se chargent d'évoquer, dans les grandes lignes, ce que conte cette légende, avant de simplement s'orienter vers sa propre trame sans chercher à tout prix à rappeler au lecteur ce qu'est le mythe de Faust réellement.


Si dans The Ancient Magus Bride, le fantastique est traité sous l'optique d'une certaine poésie et avec beaucoup de contemplation, Frau Faust se présente comme une série différente dont le seul point commun sera de puiser dans le folklore européen. Ce premier tome plante alors le voyage de deux êtres, le jeune Marion et l'intrigante Johanna, un duo classique de prime abord, mais réussi dans leur humanité. Marion se présente comme un compagnon loin du simple faire-valoir qui, à l'instar du lecteur, va découvrir les mystères qui entourent le personnage de Johanna. Et là aussi, Kore Yamazaki évite les stéréotypes dans la fiction du pacte entre un humain et un démon. Loin d'être un personnage cliché, Johanna est captivante, mystérieuse pour ce qu'elle cache, amusante par son tempérament, mais aussi touchante par son humanité et par les dilemmes qui l'ont marquée au cours de son existence. Les personnages de Frau Faust fonctionnent donc à merveille, les figures secondaires sont du même acabit, à l'instar de Nico qui, aussi énigmatique, livrera plus vite les vérités qui la concernent.


Frau Faust a donc quelque chose s'envoutant pour ses personnages, mais aussi son univers. L'intrigue ne perd pas de temps et présente vite ses mystères ainsi que la quête de Johanna. Au terme de la lecture de ce premier opus, le voyage fantastique semble loin d'être conclu et en garde assez sous le coude pour nous intriguer. Qu'est-il arrivé à Mephistopheles ? Comment le registre démoniaque sera-t-il exploité sur la durée ? Et quel destin pour Johanna ? Les bases de l'histoire sont plantées, aussi on suivra la suite avec grand intérêt.


Pourtant, le récit ne repose par sur cette libre adaptation du mythe de Faust. Kore Yamazaki façonne, ici, un univers qui lui est propre, elle s'inspire alors de différentes notions mythologiques et historiques pour étoffer son monde, tout en les reliant au personnage de Faust, gardant alors une certaine cohérence. On trouvera alors des histoires d'Homonculus, par exemple, une mécanique qui se greffe particulièrement bien au récit et rend l'univers bien plus dense.


Le premier tome de la série est aussi intéressant pour sa représentation du style de Kore Yamazaki, peu après les débuts de The Ancient Magus Bride. On retrouve alors un trait moins abouti que celui qu'elle démontre actuellement, mais non moins saisissant. La mangaka parvient à créer des designs de personnages assez typiques, si bien qu'on reconnaitrait les figures dépeintes par l'autrice entre mille, tandis qu'elle s'efforce régulièrement de créer quelques designs hybrides quand le scénario lui permet, une de ses spécialités.


Là où ce premier tome pourrait apporter une déception, c'est sur sa longueur. En effet, ce premier volet ne propose que trois chapitres, et se conclut sur une histoire courte de Kore Yamazaki : Le Musée Invisible. Si ce genre de pratiques est courant, à la fois pour meubler du contenu, mais aussi apporter des versions physiques à des récits qui ne pourraient être édités individuellement, il est plutôt rare de les voir pratiquées sur un tome un.


Pourtant, Le Musée Invisible est un petit récit typique de la patte de la mangaka, et véhiculant un joli message d'espoir. Depuis le divorce de ses parents, Asaki semble ne vouloir qu'une chose : s'échapper. Alors qu'elle cherche un petit boulot qui lui permettrait de prendre son indépendance, elle atterrit dans un lieu, vide, mais tenu par un homme bien plus âgé qu'elle et assez taquin. L'homme explique à Asaki qu'il est le conservateur de ce musée, un lieu qui regroupe des choses et des êtres invisibles, car ils ne veulent plus être perceptibles aux yeux de tous.


A travers cette histoire, la mangaka aborde globalement le désespoir, le fait de ne plus vouloir être vu, à l'instar du personnage d'Asaki dont la situation familiale lui donnerait bien envie de disparaître. Outre le message, Kore Yamazaki a aussi profité de l'occasion pour faire ce qu'elle adore : créer des créatures de fantasy, afin d'apporter un certain émerveillement à son récit. Alors, même si on regrette d'abord que la continuité de Frau Faust soit rompue par la présence de ce one-shot, la qualité du récit fait bien vite disparaître notre frustration, sans compter qu'apprécier une histoire courte de la mangaka est un plaisir que les fans de l'autrice ne se refuseront pas.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs