Dragon Pink Vol.1 - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 27 Avril 2022

Depuis la parution chez elles du tentaculaire Urotsukidoji en 2018, les éditions Black Box semblent s'être trouvées un certain goût pour la publication d'oeuvres ayant une part d'érotisme plus ou moins prononcées, que cet érotisme soit gentiment grivois ou plus brutal et sombre. L'éditeur a notamment continué sur d'autres séries de Toshio Maeda (le célèbre La Blue Girl en tête), a accueilli et accueille encore des titres anciens du maître U-Jin... Et en ce mois d'avril, l'érotisme prend encore ses quartiers avec l'arrivée d'une série qui, rien que par son nom qui était assez célèbre il y a plus de 20-30 ans, rappellera peut-être quelques souvenirs à ceux qui ont vécu leurs premiers émois adolescents dans les années 90.

Ce nom, il s'agit donc de Dragon Pink, une série interdite aux moins de 18 ans, qui fut publiée au Japon entre 1990 et 1994. Il s'agit de l'un des tout premiers mangas de la carrière d'Itoyoko, un auteur actif au Japon depuis la toute fin des années 1980, et que l'on connaît déjà brièvement en France pour Dynamite Milk, un hentai sorti dans notre pays en 1998 chez feu Le Téméraire. Et si l'on dit que Dragon Pink a connu sa popularité à une époque, c'est bien grâce à son son adaptation animée en 3 OAV datant de 1994-1995 qui a pu en faire fantasmer plus d'un.

Ce récit nous immisce dans un univers de fantasy totalement inspiré des J-RPG à l'ancienne, avec leurs équipes de combattant(e)s complémentaires, leur bestiaire dangereux, leurs quêtes à accomplir... En compagnie du costaud guerrier Bobo et de la charmante mage Pierce, le héros Santa forme l'une de ces équipes. Mais dans leur petit groupe, il y a une quatrième personne qui, elle, a un statut plutôt particulier: la jolie mais malchanceuse Pink s'est vue affublée du statut de servante. Et pour Santa, qui dit "servante" dit surtout "esclave sexuelle", visiblement...

Dans cette histoire, Itoyoko part donc d'une idée toute simple: imaginer une classe de servante dans un RPG, ce qui suffisait à l'époque pour apporter une part d'originalité à l'ensemble dans le vaste univers du manga érotique. Et pour essayer de rendre son récit encore plus particulier pour l'époque, Itoyoko a pris soin de répondre à certains codes des RPG, notamment en imaginant chaque début et fin de chapitre comme un point de sauvegarde. Mais cela peut-il suffire à faire une histoire érotique vraiment immersive ? Eh bien pas du tout, et malheureusement ce premier tome de Dragon Pink souffre pas mal de ça. Il faut bien l'avouer, les premières quêtes et les premiers combats sont minimalistes et aucunement intéressants, sauf pour servir de temps à autre l'érotisme.

Et parlons-en donc, de cet érotisme, qui est, de ce fait, le principal leitmotiv du manga. A chaque fois, les très vagues quêtes de notre petit groupe ne sont vraiment qu'un prétexte pour ensuite très vite partir vers le sexe, ce qui est parfois vraiment dommage puisque travailler un peu plus ce background RPG (ne serait-ce que pendant 2-3 pages à chaque chapitre) aurait assurément renforcé l'immersion et permis de mieux contextualiser les moments coquins. Ici, l'auteur balance finalement les choses un peu à l'arrache, malgré plusieurs idées sympathiques, à l'image de certains monstres eux-mêmes très lubriques, ou encore du fait que la semence de Bobo soit très utile à Pierce pour gagner des forces. Enfin, il y a une chose à signaler: le personnage de Santa ne plaira vraiment pas à tout le monde, le "héros" de cette histoire étant particulièrement odieux avec cette pauvre Pink qu'il malmène sans cesse. Quant à cette dernière, au-delà de son indéniable charme physique, elle reste pour l'instant très, très creuse, en alternant entre le rôle de pauvre fille dominée/maltraitée par Santa et des élans où elle-même vient presque quémander la chose à son maître. C'est peut-être sa classe de servante qui provoque cette dualité, mais le mangaka ne donne aucune précision là-dessus.

Sur le plan visuel, Dragon Pink a un charme typique de son époque, avec un dessin assez simple, un peu rond et très expressif qui fait très 90s. un côté old school qui se retrouve aussi dans les quelques créatures au design assez efficace, et bien sûr dans les moments de sexe souvent simples dans leur mise en scène mais où Pink et Pierce ont de quoi rivaliser en charme. Enfin, notons que Black box a tâché d'offrir la version la moins censurée possible, à l'image des oeuvres de Toshio Maeda et d'U-Jin, ce qui donne quelque chose de très variable alternant entre absence totale de censure, petites bandes blanches ou parties génitales totalement cachées par la mise en scène.

A l'arrivée, ce premier volume de Dragon Pink déçoit un peu. Si le dessin très 90s donne un cachet et un charme indéniables à l'ensemble, il y a de quoi regretter qu'Itoyoko n'exploite finalement qu'en surface les quelques particularités de son concept de base, d'autant que cela nuit aussi au côté immersif des nombreux moments coquins. Espérons que l'auteur aura pu rectifier ça dans les tomes suivants.

En revanche, là où il ne faut avoir aucun espoir, c'est dans l'idée d'avoir une réelle fin à la série. Dragon Pink est effectivement une série qui a été abandonnée au Japon après 4 tomes, et pour laquelle il n'y aura donc jamais de conclusion. C'est un fait qui est assez connu quand on suit d'assez près le genre, mais le fait que les éditions Black Box n'aient évoqué nulle part cette vérité pourra être vécu comme un bel entubage (sans mauvais jeu de mots) auprès d'une partie du lectorat qui ne serait pas au courant. mais ça, on aura l'occasion d'en reparler quand l'heure de la chronique du tome 4 sera venue...

Enfin, quelques mots sur l'édition française, qui est dans la droite ligne de ce que fait habituellement Black Box, avec un grand format sans jaquette mais avec rabats, ainsi qu'un papier bien blanc, souple et sans transparence permettant une bonne qualité d'impression. Malgré 2-3 discrètes coquilles ayant échappé à la relecture, la traduction d'Alexandre Fournier fait plutôt bien son office. On laissera chacun(e) juge de certains choix de police, qui pourront, au choix, apparaître totalement dépassés ou alors en adéquation avec le côté "90s/rétro" de l'oeuvre. Enfin, la couverture reste assez proche de l'originale japonaise.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
11.5 20
Note de la rédaction