DSP Romeo Vol.1 - Actualité manga
DSP Romeo Vol.1 - Manga

DSP Romeo Vol.1 : Critiques

DSP Romeo

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 28 Décembre 2018

La fantasy et les récits de l'imaginaire restent plutôt rares dans le paysage boy's love français, et c'est donc avec beaucoup de curiosité que l'on voit arriver aux éditions Taifu Comics un titre du genre: DSP Roméo. Toujours en cours au Japon où elle est publiée à rythme assez lent, cette oeuvre nous permet de découvrir en France Asia Watanabe, une mangaka très active depuis le début des années 2000, essentiellement dans le domaine du boy's love mais pas uniquement. La série nous vient tout droit de l'éditeur japonais Magzine Magazine, un éditeur qui, jusque-là, n'avait jamais été publié en France. Et histoire de bien souligner l'unicité de ce manga, signalons qu'il a d’abord été entamé par Watanabe à titre expérimental, l'autrice l'ayant imaginé en piochant des éléments dans une autre de ses histoires écrite en parallèle. Enfin, soulignons que l'oeuvre a été citée parmi les titres BL les plus populaires en 2016 dans le Kono BL ga Yabai 2017, et a été présente dans le top 10 des meilleurs yaoi mangas érotiques aux Chil Chil BL Awards 2016.

Cette série nous plonge dans un monde où vivent les Lycans, des hommes mi-humains mi-bêtes qui ont été créés par les humains pour être des créatures surpuissantes habiles autant au combat qu’au lit, essentiellement afin d'éliminer les menaces potentielles. Kôyô est l'un de ces Lycans, et fait partie d'une espèce rare qui, plus encore que ses congénères, a un lien très étroit avec le sexe: il dégage des phéromones si puissantes qu'il devient irrésistible aux yeux de ses partenaires Lycans, pourtant déjà très prompts à céder à leurs incontrôlables pulsions sexuelles. Néanmoins, le seul Lycan que Kôyô aime réellement le regarde à peine: le capitaine Jade, encore et toujours, résiste à ses avances et à ses pulsions, car pour lui Kôyô appartient déjà au dénommé Diager, et il lui apparaîtrait alors immoral de coucher avec lui. Ces deux êtres finiront-ils, un jour, par céder l'un pour l'autre ?

Etonnante lecture que ce premier volume, dans la mesure où la mangaka, plus que de construire vraiment proprement un scénario, se laisse plutôt porter par les désirs (très souvent charnels) de ses personnages, qui semblent presque prendre vie d'eux-même et échapper à son contrôle de par leurs actes. L'autrice est-elle alors en roue libre ? On pourrait être tenté de dire oui, tant elle s'écarte des carcans d'un récit classique, et d'autant plus que l'essentiel de la lecture se focalise sur les désirs de ces êtres sans vraiment chercher à présenter un univers de fond bien défini (pour dire les choses simplement: on ne sait quasiment rien de l'univers exact). Clairement, tout le monde n'accroche pas, car on a une lecture qui peut décontenancer très facilement. Et pourtant, on ne peut pas dire que l'univers créé par Watanabe soit pauvre. Simplement, elle a fait un choix qui, lui aussi, peut décontenancer: plutôt que de distiller les informations sur son univers au fil du récit lui-même, elle préfère proposer des sortes de "databases" où elles explique textuellement de nombreuses choses sur le fonctionnement et les spécificités de son univers. Ce que l'on retient de cet univers à la lecture du manga lui-même se résume à trois fois rien: les Lycans peuvent difficilement résister à leurs pulsions sexuelles, pour se transformer et devenir puissants ils doivent boire leur sang, pour redevenir normaux ils doivent ingérer leur semence... Mais on a également plutôt hâte de voir quel avenir attend exactement Kôyô et Jade dans leurs sentiments et leurs idéaux. Dans un univers où l'amour véritable ne semble pas avoir sa place puisque les Lycans cèdent facilement à leurs pulsions, Kôyo est pourtant épris d'un être en particulier, et Jade se refuse à s'emparer d'un congénère qu'il considère comme appartenant déjà à un autre, ce qui lui donne des valeurs de fidélité qui jurent avec l'univers global. Alors dans un monde pareil, quelle place auront ces sentiments, ces valeurs ?

Visuellement, Asia Watanabe s'applique beaucoup moins sur les décors que sur la mise en valeur des corps, ces derniers occupant vraiment l'essentiel de son attention. Et de ce côté-là aussi, l'autrice divisera selon les goûts: il y a des exagérations dans les courbes et dans le cambrage des corps qui pourra ne pas plaire, mais il reste que le trait de l'artiste est souvent assez magnifique, avec des silhouettes souvent peu vêtues, très sexy et intenses, ainsi que des visages et chevelures extrêmement soignées. Les scènes érotiques, elles, sont assez nombreuses, ne font plutôt pas semblant (on a vu largement plus hard, mais ça dégouline pas mal quand même)... et elles brillent plus d'une fois pour leur mise en scène, Asia Watanabe offrant de nombreux angles de vue différents et parfois très originaux, et alternant parfois entre gros plans et vues un peu plus éloignées.

Avec ce premier volume, DSP Romeo se présente donc typiquement comme le genre de titre voué à diviser: globalement, soit on adorera, soit on détestera, et à partir de là il s'agit du genre d'oeuvre à laquelle donner une note relève un peu de l'ineptie, donc ne tenez pas compte de celle qui est donnée par votre serviteur, même si elle n'a pas été mise au hasard. Il s'agit vraiment d'une expérience de lecture assez unique et étonnante, qui vaut facilement le coup qu'on l'essaie par soi-même pour se faire une idée. Dans tous les cas, que l'on aime ou pas, Asia Watanabe dégage quelque chose de très personnel et d'assez artistique, qui donne envie de voir à quoi ressemblent d'autres de ses oeuvres.

Taifu Comics livre une très bonne édition, avec un papier bien épais et souple, une excellente impression, une première page en couleur, et une traduction très claire signée Nicolas Pujol.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
14.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs