Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 31 Juillet 2024
Chronique 2 :
Alors que les événements étranges se multiplient, Mina fait la rencontre du professeur Van Helsing, ce dernier étant à la recherche d'une créature des ténèbres qu'il appelle Dracula...et cette créature serait à l'origine de tout ce qui s'est produit récemment autour de l'école accueillant nos jeunes héros...
Suite à un premier volume aussi séduisant que déroutant, voilà que le deuxième opus poursuit son œuvre, mais est pour le coup bien plus déroutant que séduisant...
L'adaptation très personnelle de l’œuvre de Bram Stoker, Dracula, par Shin'ichi Sakamoto se poursuit et on est clairement ici bien plus proche de ce que proposait l'auteur à la toute fin de Ascension que dans Kiomaru... avec un trait éthéré correspondant parfaitement à l'ambiance du titre, mais surtout avec une conceptualisation des événements, une plongée dans les méandres de l'esprit humain, à savoir ici des esprits torturés, voire pervers... bref un tome déstabilisant pour pourrait bien ne pas plaire à tous...
Et pour ma part je suis sceptique ! Ais je aimé ce que j'ai lu... ? Je n'en suis pas sur...
Certes c'est beau, certaines planches sont absolument magnifiques, le trait de l'auteur est absolument incroyable, on peine à croire qu'un homme soit capable uniquement armé d'un crayon de proposer un rendu pareil...mais malheureusement cela ne fait pas tout...mais pas du tout !
La narration est bordélique, l'ensemble du récit est beaucoup trop abstrait, certains événements demeurent incompréhensibles, et surtout, le tout est porté par des personnages qui n'ont absolument rien d'attachant; ils sont même carrément détestables! Pour ma part je n'ai pas lu le roman de Bram Stoker, je ne sais pas si les personnages sont présentés de la sorte dans l’œuvre, mais le fait est que Sakamoto met en scène des personnages si insupportables qu'on n'a pas en vie de les suivre et de les voir évoluer.
Pourtant, alors que je reproche à ce tome d'être trop abstrait, la menace à l'inverse devient un peu plus concrète, Dracula (puisqu'on sait tous qu'il s'agit de lui), ne nous est plus présenté sous la forme d'un virus informe mais bien comme une créature palpable pouvant prendre bien des formes...mais le problème ne vient pas de lui.
Un deuxième tome vraiment déstabilisant, qui peut tout autant finir de séduire ceux qui avaient accrochés au premier tome comme déstabiliser voire dégoûter ceux qui attendaient de voir comment cela évoluait pour se faire un avis... et j'ai peur de me rapprocher davantage de la seconde catégorie que de la première.
Chronique 1 :
Le quotidien de Whilelmina est bouleversé depuis l'incident survenu suite à l'arrivée du Demeter. Si elle a pu sauver sa camarade Lucy (qui présente l'identité de Luke auprès de ses pairs masculins) d'une bête géante, le cauchemar ne semble pas terminé. Étroitement surveillé, Luke n'est désormais plus le même. De son côté, c'est grâce au professeur Abraham van Helsing, fraichement arrivé à l'académie, que Mina en apprend plus sur le Mal qui s'est abattu sur les lieux.
Même pour un amoureux du style de Shin'ichi Sakamoto, le premier tome de #DRCL midnight children avait de quoi être déroutant. Plus que jamais, le mangaka se servait de l'amorce de son récit comme terrain d'expérimentations visuelles et narratives tandis que le jonglage entre les points de vue apportait un côté décousu à l'ensemble. Il y avait donc de quoi être aussi intrigué qu'émerveillé et chamboulé, l'approche du deuxième tome laissait alors l'espoir d'une suite qui saurait nous apaiser, ou au moins nous resituer en terrain connu. Il y a un peu de ça, oui, mais il semble indéniable que le mangaka cherche à poursuivre dans cette lecture dépaysante, bien que narrativement innovante.
Alors, dans les diverses séquences qui composent cet opus, Shin'ichi Sakamoto ne se prive jamais d'enchaîner les chorégraphies visuelles par des moments de vraies métaphores graphiques pour dépeindre les fors intérieurs de personnages, voire narrer des séquences purement psychédéliques, via un exercice qu'il pousse bien plus loin qu'il ne le faisait sur Innocent et Innocent Rouge. Loin de résulter à un simple caprice de la part d'un artiste excentrique qui cherche avant tout à imposer sa patte (quand bien même il en aurait le droit tant cela fait partie de son style), touts ces moments racontent différentes bribes qui se complètent les unes entre les autres, que ce soit l'état actuel de Luke/Lucy pour en faire un personnage insaisissable et véritablement "contaminé", ou bien le moment où Dracula se dévoile dans une scène magistrale dont on ne sait percevoir le réel ou le fantasme jusqu'à son dénouement. L'esthétique que nous dévoile Sakamoto est merveilleuse, fascinante, mais aussi angoissante et dérangeante. Son art a indéniablement franchi un nouveau cap, et l'auteur s'en sert pour sublimer la myriade d'émotions de sa réinvention du mythe de Dracula.
Et outre l'expérience narrative, ce deuxième opus croque plus frontalement l'intrigue du récit, en insistant notamment sur la menace du compte de Dracula, ses capacités surnaturelles et le danger qu'il constitue pour les habitants de Whitby. Un traitement rendu efficace grâce à l'absence totale de l'antagoniste, si ce n'est dans les moments évoqués plus tôt, qui renforcent son caractère insaisissable tout en laissant une empreinte indélébile chez le lecteur et les personnages. Des personnages en constante progression, d'ailleurs, tant ceux-ci se fréquentent, s'allient et se confrontent grâce aux (ou à cause des) séquelles laissées par la créature ennemie, véritable prédateur qui a suffisamment métamorphosé Luke/Lucy pour en faire un élément de dissonance au sein du groupe. Dès lors, l'inquiétude est constamment palpable, et chacun doit prendre ses responsabilités dans ce combat émergent. La progression permet donc aux différents personnages de s'affirmer, et à l'auteur de peaufiner son discours sur les portraits jugés marginaux à l'époque. Tout porte à croire que le récit n'est pas seulement celui de jeunes gens qui se confrontent à un monstre. Ou plutôt, le casting se réunit pour faire face à une créature encore plus terrifiante que celle de Dracula : la société. En sortant des bonnes mœurs, ils font office de parias et devront assumer leur différence dans un combat qui pourrait mettre leurs vies en jeu. Le sous-texte prend donc davantage de force, notamment par l'omniprésence de l'homosexualité de certains personnages en filigrane, donnant une autre couche de densité à cette suite.
Indéniablement, #DRCL midnight children demeure un récit qui ne pourra pas faire l'unanimité tant l'expérience narrative proposée par Shin'ichi Sakamoto et ses propositions visuelles sortent des clous. Pourtant, force est de reconnaître que la maître manie déjà très bien son style et son œuvre. Pour peu qu'on adhère à la proposition, le récit est déjà monstrueusement passionnant et immersif.