Comment ne pas t'aimer Vol.1 - Actualité manga

Comment ne pas t'aimer Vol.1 : Critiques

Aisazu ni ha Irarenai

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 26 Juin 2013

Actif sur le marché de l'animation depuis déjà plusieurs années, Black Box étend ses activités à l'édition de manga, et nous propose en guise de premier titre une oeuvre pour le moins assez osée, car éloignée de la majeure partie de la production. Un shôjo old school d'une auteure jusque là inconnue en France : Comment ne pas t'aimer de Masako Yoshi, publié au Japon dans la première moitié des années 80.

Originaire de Toyama où elle a toujours vécu sans besoin au sein du foyer familial, Ayumi Fujita décide de quitter ce dernier et de louer un studio dans une pension dans le cadre de ses études à l'université Shunzan de Yokohama. Pour elle, c'est tout simplement le début d'une nouvelle vie, où les problèmes et bonheurs de la vie estudiantine vont très vite se mêler à ses premiers émois amoureux...

Sous son titre qui pourrait faire penser à n'importe quel shôjo d'amourette lycéenne, Comment ne pas t'aimer se démaque pourtant très vite, ne serait-ce que par le statut d'étudiante de son héroïne, Ayumi, jeune femme qui a toujours vécu dans le cocon familial, et qui a alors tout à découvrir de la vie étudiante. C'est d'ailleurs ce qu'elle va faire : bien accueillie par ses propriétaires, un couple de personnages âgées qui aiment la prendre pour leur fils décédé (son look de garçon manqué aidant), Ayumi découvre ensuite les deux autres locataires de la pension : Asami, jolie et très sociable blondinette bien décidée à profiter de ses années universitaires, et la plus froide Ikuko, qui s'est un peu retrouvée là sans avoir le choix, la faute à son échec aux examens d'entrée d'une université de Tôkyô. Puis ce sont deux autres voisins et camarades de cours qui se présentent : le dénommé Hirai, garçon plutôt aisé, très sociable et très intéressé par les filles, ainsi que Kazuyuki Narushima, jeune homme plus posé.

C'est ensemble que cette fine équipe va évoluer, au gré de leurs petites rixes, mésaventures et ébullitions amoureuses. On voit donc, évidemment, poindre des sentiments, Ayumi tombant vite amoureuse de Narushima alors que ce dernier refuse en bloc cet amour... Pour quelle raison, et pourra-t-il changer ? Quant à Hirai, il jette lui-même son dévolu sur notre héroïne, alors même qu'Asami n'arrête pas de lui courir après, pour un résultat parfois très comique.
Ces petites histoires d'amour entremêlées se voient arriver de loin, de même que leurs petits rebondissements (la raison pour laquelle Narushima repousse Ayumi est très classique, par exemple), certains caractères peuvent irriter par moments (surtout au début l'aspect un brin insipide d'Asami, qui cherche à mettre tous les garçons dans sa poche), on regrettera aussi qu'Ikuko ne soit pas plus présente. Et pourtant, le tout sonne très juste, car Masako Yoshi adopte une simplicité de ton vraiment bienvenue. Il n'y a pas de grands chambardements, les choses évoluent au compte-goutte, au fil des jours, finalement de façon réaliste et posée, les personnages sont amenés à changer petit à petit en se côtoyant les uns les autres, chacun pouvant tirer quelques leçons des autres. D'autant que ce n'est pas la franchise qui leur manque, ce qui là aussi crée quelques petits gags bien huilés.

Surtout, la mangaka enrobe parfaitement le tout dans un quotidien estudiantin qui sonne juste. Car dès lors qu'Ayumi démarre sa vie d'étudiante, elle doit faire face à tous ces petits tracas propres à cette période de la vie que nous avons tous vécue : les cours et relations avec les autres qui peuvent évoluer dans n'importe quelle direction, les repas très succincts et répétitifs à cause du manque d'argent (nous avons les pâtes, les Japonais ont les râmen instantanés), les fêtes alcoolisées entre amis (et tout a vite fait de devenir prétexte à la fête !), l'absence des parents parfois un petit peu pesante, la joie toute bête à l'achat de ses premiers appareils ménagers, la recherche d'un petit job... Masako Yoshi n'oublie aucun de ces petits tracas qui font la vie d'étudiant, on ressent même chez elle une petite pointe autobiographique et nostalgique tant les choses sont dépeintes par un oeil avisé et bienveillant. Et en réalité, les sentiments, qui ne prennent jamais trop de place, ne sont qu'une composante parmi d'autres de cette vie d'étudiant.

Au bout du compte, on se retrouve donc surtout avec une chronique estudiantine très bien croquée, qui s'écoule de façon claire, logique et paisible, au gré de ce qui arrive aux différents personnages. La peinture quotidienne elle-même est plutôt posée, mais la mangaka parvient à grandement dynamiser le tout en rendant ses personnages très vivants, en tête Ayumi, dont la franchise et l'envie de progresser, malgré ses nombreuses maladresses dans tous les domaines, en font une héroïne amusante et attachante. Les personnages sont tous bien différents dans leur caractère et leur comportement, et l'humour est très présent, passe facilement à travers les petites extravagances des personnages et par les dessins frais, simples et sans artifices, le tout rappelant des auteurs comme Mitsuru Adachi ou Rumiko Takahashi : ainsi, le couple de vieillards assez insouciants est un régal et rappelle beaucoup les personnes âgées croquées par Mitsuru Adachi (jusque dans leur langage à base de "papy" "mamy"), tandis que le vicieux Hirai et la un brin délurée Asami rappellent un peu certains protagonistes de Maison Ikkoku. De même, Narushima, beau brin un peu plus torturé, est dans la veine d'un Yusaku Godai de Maison Ikkoku, jusque dans son look sur certains dessins. On a de l'humour simple et un ton très vivant, qui coulent de source en se basant tranquillement sur des personnages bien campés sans en faire trop.

Oeuvre d'époque, ancrée dans un Japon du début des années 80 un brin nostalgique, Comment ne pas t'aimer, de par son ton simple et frais, a très bien vieilli et nous croque une tranche de vie qui, elle, est finalement intemporelle : celle d'étudiants qui font leurs premiers pas dans la vie adulte et ont encore une infinité de choses à découvrir, au gré des petits tracas et petits bonheurs de cette période si particulière de la vie.

Du côté de l'édition, cette toute première copie de Black Box dans le domaine du manga n'est pas dénuée de défauts, mais est globalement plaisante. Sous le grand format et la couverture sans jaquette se cachent une traduction vivante, un papier de bonne qualité, et des onomatopées traduites. Quant à l'avant-propos de l'éditeur, il met plutôt bien dans le bain. Par contre, et on mettra ça sur le compte du premier essai, la police et l'incursion des textes dans les bulles s'avèrent trop basiques, l'impression souffre régulièrement d'un curieux petit effet de flou (pas excessivement gênant, mais ça reste dommage), et les marges blanches autour des planches sont étrangement grandes (pour faire simple, supprimez les marges, et vous avez un format seinen standard).


Koiwai


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs