Color Recipe Vol.1 - Actualité manga
Color Recipe Vol.1 - Manga

Color Recipe Vol.1 : Critiques

Color Recipe

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 20 Décembre 2023

Le parcours en France de la courte série en 2 tomes Color Recipe de la talentueuse Harada (One Room Angel, Happy Shitty Life, Yatamomo...) ne fut pas de tout repos. Lancée en France par Taifu Comics dès octobre 2017, l'oeuvre dut malheureusement être stoppée en nous laissant sur ce seul volume, en raison d'un changement d'éditeur pour la série au Japon, empêchant la sortie du deuxième tome en France. Après une attente de quelques années, Taifu Comics nous a fait le plaisir de relancer la série en France en octobre dernier, en sortant simultanément la nouvelle édition du tome 1 et le volume 2 jusqu-là inédit dans notre pays, le tout en devant suivre la nouvelle édition japonaise parue là-bas en mai-juin 2018.

Oeuvre élue meilleur Boy’s Love aux Chil Chil BL Awards 2016 et classée 3e au Kono BL ga Yabai 2017, Color Recipe nous immisce au sein d'un salon de coiffure où travaillent trois personnes: le patron M. Mikado qui a décidé d'ouvrir son propre salon de manière indépendante, une employée nommée Riku, et notre héros Shôkichi, un coiffeur aussi appliqué et sérieux dans son travail que peu à l'aise dans la communication avec les autres. Ce problème lui vaut d'ailleurs certaines petites mésaventures: parlant très peu pendant qu'il exerce, certain(e)e client(e)s se sentent peu à l'aise avec lui. C'est dans ce contexte que M. Mikado, peu de temps après avoir ouvert son salon, choisit d'embaucher Fukusuke, un coiffeur réputé car venant d'un prestigieux salon qu'il a préféré quitter, et qui est un peu tout le contraire de Shôkichi en termes de relations humaines: il a la tchatche facile, et nombre de client(e)s l'adorent. Une situation où Fukusuke, taquin, ne se prive pas pour faire des remarques à Shôkichi ! La relation de travail entre ces deux-là semble alors vouée à être tendue, mais peut-être que Fukusuke cache autre chose derrière son comportement avec Shôkichi...

Le moins que l'on puisse dire, c'est que Harada parvient très vite et très bien à installer ses personnages ainsi que leurs relations, et pas uniquement au sujet de ses deux personnages principaux. Tandis que l'on découvre en Mikado un patron passionné et bienveillant que Shôkichi admire par dessus tout (mais attention, pas de cliché sur les coiffeurs ici: Mikado est hétéro et marié, ce qui rend le récit plus réaliste), on entrevoit en Riku quelqu'un réservant ses quelques surprises, y compris en toute fin de volume, et ayant une façon de parler assez directe. L'essentiel vient toutefois, bien sûr, du rapport pour le moins tendu entre Shôkichi et Fukusuke, au moins pendant toute la première partie du tomes: en effet, entre un garçon très sérieux, assez premier degré (surtout quand on parle de Mikado) mais ayant du mal à parler aux autres, et un autre plus sociable et taquin, l'autrice joue très bien sur deux personnalités opposées mais peut-être, quelque part, complémentaires.

Sur ces bases, c'est une première partie de volume globalement assez légère et comique qui nous est proposée, ces deux principaux personnages devant apprendre à travailler ensemble, avec des hauts, des bas, voire des petites surprises pouvant déstabiliser Shô, notamment quand Fukusuke est amené à dormir chez lui après avoir raté son train. Néanmoins, et tout en soulignant régulièrement l'application des personnages dans leur travail de coiffeurs, Harada parvient à immiscer d'autres facettes plus inquiétantes, notamment dès lors qu'apparaît Kihara, un homme étant un bon client du salon, mais semblant un peu trop familier et collant avec Shôkichi... Tout en assombrissant quelque peu son récit autour des affres d'un stalker apparent, la mangaka parvient à dresser en Fukusuke un portrait peut-être plus bienveillant qu'on ne le pense, dès lors que celui-ci fait part à Shô des événements passés l'ayant poussé à s'intéresser à lui. Mais en réalité, la vérité est encore tout autre, et Harada saura surprendre comme il se doit dans une fin de tome rendant Fukusuke plus ambigu et étonnant que jamais, le mieux étant que plusieurs petits indices étaient présents auparavant pour nous laisser deviner la chose.

Sur le plan visuel, Harada est capable d'avoir un design de personnages tantôt un peu rond et mignon, tantôt plus fin et inquiétant, le tout sans jamais trahir le physique de ses héros, ce qui est un petit exploit. Au fil de la lecture, la dessinatrice régale plus d'une fois par son sens du découpage ou son soin accordé aux expressions, au regards et aux petits gestes, chose encore plus marquante lors des quelques petites montées de tension. Dans ces montées de tension, on inclut les quelques brèves scènes érotiques, superbement mise en scène avec quelques gros plans ou des cases longues. Enfin, certains contrastes noir/blanc sont très efficaces, et les trames sont bien souvent appliquées avec finesse afin d'apporter une richesse supplémentaire.

On redécouvre alors, avec un plaisir intact, un premier tome immersif, joliment dessiné, proposant des personnages réussis, et surtout surprenant dans sa manière de s'assombrir dans sa deuxième partie. Voila qui a de quoi donner follement envie d'enfin découvrir dans notre langue la suite et fin de cette histoire dans le deuxième volume ! Et côté édition, au-delà de la jaquette qui est différente, Taifu Comics est bien resté dans l'esprit de la première édition française avortée puisque l'on retrouve la bonne traduction d'Isabelle Eloy, les quatre premières pages en couleurs sur papier glacé (en revanche, les deux pages d'ouverture du chapitre 5, qui étaient en couleurs dans la première édition, ne le sont plus ici), ainsi qu'une bonne qualité de papier et d'impression.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs