Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 13 Novembre 2025
Libéré des griffes de la Sécurité Publique par Asa et quelques camarades, Denji ne souhaite désormais qu’une chose : retrouver Nayuta. Mais l’heure n’est pas à la précipitation, d’autant plus dans une ville aujourd’hui dévastée par les récents événements. Le garçon a admis avoir comme rêve de devenir Chainsaw Man pour des raisons bas de pantalon, mais à quoi bon ? Les doutes se multiplient en lui, d’autant plus quand il découvre la véritable nature des sentiments d’Asa que Yoru exprime de manière brutale…
Denji maintenant libre, c’est aux côtés d’un groupe improvisé de protagonistes que la quête du garçon se poursuit. Dans un cynisme toujours implacable, Tatsuki Fujimoto exprime les retombées des récents drames tout en guidant ces quelques figures vers leur prochaine destination en gardant en tête Nayuta comme objectif. Un enjeu qui n’est pas le seul : c’est de manière aussi surprenante qu’à l’accoutumée que l’auteur insère dans son récit les desseins libidineux du héros… mais pour mieux les déconstruire cette fois-ci. Si la lecture au premier degré du récit donne dans un graveleux qui prête à sourire, tout ce qui est développé autour de Denji n’a rien d’amusant. Au contraire : Fujimoto est conscient de la nature et de la profondeur de son personnage central, et les remises en question et dualités internes dépeintes dans cet opus n’en sont que plus fortes. De même, ses rapports avec Asa prennent une autre forme via une séquence très particulière, dérangeante malgré les sentiments qui s’expriment, prouvant la puissance de la narration du maître qui prend le premier rôle face aux élans de série B du récit.
Une première partie déjà forte dans ses ambiances et développements… avant que la deuxième moitié prenne le pas pour ne pas nous épargner. L’auteur nous l’a souvent prouvé dans la première grande partie de son manga, il manie les rebondissements chocs minutieusement préparés, apte à faire basculer l’intrigue vers un tumulte plein de sens. Le sort d’Aki, la mort de Power… Tant de séquences qui nous font encore souffrir, et un écueil avec lequel l’auteur renoue pour créer un renversement captivant de bout en bout. Celui-ci ne sert pas à créer de l’action et à faire revenir une entité donc les apparitions ont désormais du sens, mais est aussi utilisé pour jouer avec les mécaniques de l’univers, exploiter les enjeux du deuxième cycle du manga, et même développement un discours d’un ordre politique qui s’intègre très bien à ce tumulte. Un fond indéniablement riche dans un spectacle à couper le souffre, notamment sur les dernières pages où les mots sont absents, et où la narration suffit à conter cet affrontement viscéral, presque désespéré.
À l’approche de son vingtième tome, Chainsaw Man reste une lecture puissante et une œuvre aussi aboutie que maîtrisée par son auteur. Tatsuki Fujimoto continue de livrer un shônen d’action sans pareil, où la série B est un véritable voile qui cache un récit riche en sensibilité, en nuances et en personnalité.
22/10/2025