C'est une belle journée pour un labyrinthe - Actualité manga
C'est une belle journée pour un labyrinthe - Manga

C'est une belle journée pour un labyrinthe : Critiques

Meikyû Biyori

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 23 Avril 2024

Mangaka désormais vétéran (sa carrière dure depuis le tout début des années 1990) et qui a acquis une assez solide réputation au fil du temps (notamment pour la finesse de ses dessins), Akihito Yoshitomi reste pourtant un mangaka assez peu publié en France, mais la donne semble vouée à changer à partir de cette année 2024: tandis que les éditions Noeve Grafx ont lancé en janvier dernier Aujourd'hui le futur, l'une de ses nombreuses oeuvres à tendance yuri, de leur côté les éditions Mangetsu ont affirmé leur désir d'explorer la bibliographie de l'auteur sur la longueur, et cela commence dès ce mois d'avril avec la sortie du one-shot C'est une belle journée pour un labyrinthe !. Derrière ce nom français se cache Meikyû Biyori (littéralement "La météo du Labyrinthe"), une oeuvre d'environ 200 pages dont les 19 courts (voire très courts) chapitres furent initialement prépubliés au Japon à rythme tranquille, entre 2018 et fin 2022, dans les pages du magazine Nemuki+ d'Asahi Shimbun (magazine dont proviennent aussi pas mal de récits de Junji Ito, entre autres).

Hinata, 14 ans, est bonne nageuse, souvent étourdie en oubliant pas mal de trucs (y compris sa culotte), et aime faire du gringue à Airi. Airi, 13 ans, est une adolescente à lunettes qui, derrière ses airs sérieux, semble cacher autant que possibles ses sentiments pour Sho. Kaho, 12 ans, est souvent bêtement surnommée "Kaka" par Hinata. Et Mari, 11 ans, est une enfant studieuse, mais tend à avoir des goûts de vieille malgré son jeune âge. En plus d'être d'inséparables amies, ces quatre jeunes filles ont un autre point commun: elles vivent toutes dans un monde souterrain mystérieux où elles n'ont jamais connu la lumière du jour et que des machines errantes et autonomes reconstruisent sans cesse, donnant ainsi lieu à un agencement aussi riche que labyrinthique. Qu'est donc ce monde souterrain ? Quel est l'état du monde extérieur ? Et que veut la rumeur comme quoi des kidnappeurs, présent dans ces lieux, feraient disparaître quiconque les voit ?

Autant le dire clairement d'emblée: n'attendez absolument rien du scénario de cette oeuvre, car même si Akihito Yoshitomi balance vite fait des semblants de réponses à ces questions en toute fin de tome sur à peine quelques cases, la construction d'un univers scénaristiquement poussé n'est aucunement le leitmotiv de l'auteur ici.

En effet, c'est tout autre chose qui l'intéresse, à savoir mettre en scène les petites péripéties de jeunes héroïnes qui n'ont quasiment qu'un seul crédo: se faire un jeu de tout ! En effet, avec elles, tout est prétexte à l'amusement: avions en papier, concours de poses sexy ou de costumes de Halloween, promenade à la mer, jeux sous une simili-pluie... sans oublier les interrogations très régulières avec Sho et Yûta, adolescents autoproclamés cartographes des recoins les plus désertés et méconnus de la ville-labyrinthe souterraine. A chaque chapitre, une nouvelle situation est proposée, celles-ci s'étendant parfois sur plus d'un chapitre. Et même si la brièveté des chapitres donne généralement lieu à des situations très peu poussées (certaines relevant vraiment juste de l'anecdote), même si les personnages n'ont aucune profondeur et sont même traités de façon un peu inégale (notamment Kaho, bien moins en vue et moins caractérisée que les autres), il y a de quoi se laisser assez facilement entraîner par ce qui s'apparente finalement à une simple petite lecture rafraichissante.

Pour mettre en valeur ça, Akihito Yoshitomi peut compter sur un travail graphique souvent très bon. Oh, bien sûr, on retrouve le goût caractéristique du mangaka pour les jolies jeunes filles aux traits fins, avec quelques accents yuri quasiment inévitables chez lui, ce qui plaira ou non même si l'auteur ne franchit jamais de limites de mauvais goût. mais on préfèrera retenir tout ce que lui permet son concept de ville souterraine labyrinthique en termes de décors et de designs, et de ce côté-là c'est vraiment foisonnant: omniprésents, les fonds sont souvent très riches et dépaysants à leur manières, entre les machines errantes de tous types, les différentes structures reconstruites, les vues parfois vertigineuse où l'on regarde nos héroïnes se promener sur des tuyaux et autres éléments en suspension... C'est alors, en quelque sorte, un véritable petit voyage bourré de petites idées graphiques que nous propose l'artiste, en donnant presque à son manga des petites allures d'artbook d'illustrations en noir et blanc quand il s'adonne à certaines pleines pages ou doubles-pages.

C'est une belle journée pour un labyrinthe ! s'avère donc être une tranche de vie assez sympathique, bien qu'un peu anecdotique. Derrière un scénario-prétexte qui frôle le néant et des saynètes qui malheureusement ne sont jamais très poussées, il faut surtout profiter du gros travail visuel du mangaka, où les petites péripéties insouciantes de ces jeunes filles au coeur d'un monde souterrain graphiquement très riche ont quelque chose d'assez rafraichissant.

Côté édition, pour un prix de 9,95€, l'éditeur propose une édition malheureusement dépourvue de pages en couleurs mais très satisfaisante pour le reste: le grand format est idéal pour profiter de la richesse visuelle de l'auteur, la jaquette reste fidèle à l'originale japonaise tout en s'offrant un logo-titre fort bien travaillé par Tom "spAde" Bertrand, le papier souple et suffisamment opaque permet une très bonne qualité d'impression, le travail d'adaptation graphique et de lettrage par Corinne Luijten est très soigné, et la traduction signée Sara Correia est claire.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
13.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs