Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 15 Avril 2024
Sorti au Japon en 2016 aux éditions Akaneshinsha sous le titre "Tokubetsu na Mainichi" (dont le titre français a un sens très proche) et en France en en août 2022 chez Hot Manga, Ces jours précieux est le tout premier livre relié professionnel de Shouji Shibasaki (ou Syouzi Shibasaki). Cet auteur discret, peu prolifique depuis ses débuts il y a une douzaine d'années, a d'abord officié dans le hentai, avant d'être remarqué pour son dessin de jeunes filles très doux et mignon et d'avoir ainsi l'occasion de se lancer, à partir de 2016, dans des mangas plus grand public, que ce soit avec Love Live! - School Idol Diary - Second Season (basé sur l'anime éponyme et toujours en cours à l'heure où ces lignes sont écrites), ou la tranche de vie au format yonkoma et achevée en deux tomes Hatsuharu ga saku, ces deux séries restant inédites en France à ce jour.
Ce recueil X d'environ 200 pages regroupe sept histoires courtes qui ont pour points communs d'avoir toutes été prépubliées au Japon dans le magazine Comic Koh, et de toutes mettre en scène des situations vanilla où de jeunes couples d'étudiants déjà bien établis s'adonnent à l'acte avec amour. Les situations de ces couples restent suffisamment variées pour ne pas se répéter d'une histoire à l'autre: entre des binômes qui ont déjà eu des relations et qui en ajoutent une de plus à leur palmarès avec tendresse, une jeune fille qui a peur de passer à l'acte avant d'être aiguillée par ses copines et de comprendre que ça fera plaisir à la fois à son bien-aimé et à elle-même, ou encore une demoiselle qui prend les devants pour aller toujours plus loin avec son chéri (alors que lui se veut plus sérieux), chaque récit trouve son charme propre, mais les principales qualités de cet ouvrage se situent sûrement encore ailleurs et concernent trois points.
Tout d'abord, le soin avec lequel Shibasaki amène chaque situation de sexe. La plupart des histoires étant assez longues (la plus courte totalise 22 pages), le mangaka a le temps de développer avec soin, à chaque fois, tout un petit contexte, voire un petit background pour ses personnages, quitte à ce que les planches coquines soient aussi nombreuses voire parfois moins nombreuses que les planches s'intéressant à ces jeunes gens, ce qui amène vite et bien une immersion accrue et un certain attachement à eux.
Ensuite, le rendu des scènes de sexe, qui sont particulièrement jolies: entremêlant maladresses de jeune couple, grande complicité, beaucoup tendresse et plaisir mutuel, Shibasaki soigne chaque ébat pour faire ressortir la beauté de chaque relation: ça prend soin de bien faire les préliminaires, ça se soucie beaucoup de l'autre (les mecs utilisent des préservatifs et ne veulent jamais brusquer leur partenaire, chacun(e) veut que l'autre ressente aussi du plaisir, les jouissances féminines ne sont pas oubliées), ça s'embrasse avec beaucoup d'affection et d'osmose, ça ne jouit pas de façon abondante et exagérée comme on le voit souvent dans ce type de production... ce qui est un vrai plaisir à observer, d'autant plus que l'auteur soigne également bien la diversité de ses angles de vue.
Et enfin, le dessin en lui-même: en plus de décors assez soignés quand il le faut, on appréciera surtout les designs. En effet, en plus d'être toutes assez différentes, les jeunes héroïnes ont toutes des proportions on ne peut plus réalistes, sans poitrines ou expressions exagérées, ce qui est assez rare pour être signalé. Qui plus est, les contours très doux des dessins de l'auteur les rendent assurément mignonnes à souhait, ce qui colle fort bien avec la volonté de Shibasaki de proposer des histoires tendres et crédibles. Et bien sûr, il en est tout autant pour les personnages masculins.
A l'arrivée, il y a facilement de quoi se laisser conquérir par Ces jours précieux, recueil hentai dont les histoires séduisent beaucoup pour leur réalisme, pour leur immersion, et surtout pour toute la tendresse et la complicité qui ressort chez chacun des attachants couples présentés. Une jolie pioche, qui nous ferait presque regretter que Shouji Shibasaki ne soit pas plus actif dans le domaine !
Côté édition française, à défaut d'avoir des pages en couleurs, on a une copie soignée: la douce jaquette donne d'emblée une bonne idée de la tonalité du contenu, le papier ainsi que l'impression sont de bonne qualité, le lettrage de Florian Morala est assez propre, et la traduction effectuée par Yves Bohmler est convaincante.