Burning Hell - Actualité manga
Burning Hell - Manga

Burning Hell : Critiques

Burning Hell - Kami no Kuni

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 16 Novembre 2016

Dessinateur des séries Le Nouvel Angyo Onshi, Defense Devil et Area D, Yang Kyun-Il est assurément l'un des dessinateurs-phares du catalogue de Pika Edition. Et cette fois-ci, celui que l'on connaît aussi pour les dessins d'Island ou de March Story chez Panini nous revient avec un épais recueil de 280 pages, regroupant deux histoires de 4 chapitres chacune, et qui fut publié au Japon en 2015. On y retrouve au scénario Youn In-Wan, son vieux compère d'Island, du nouvel Angyo Onshi et de Defense Devil.

Première histoire du recueil, Burning Hell s'étend sur environ 110 pages et a été prépubliée au Japon dans le magazine Big Comic Spirits de Shogakukan en 2008, soit entre les séries Le Nouvel Angyo Onshi et Defense Devil.
Ce récit nous plonge à l'époque Edo. Une île déserte, qui par la suite a été oubliée des mémoires collectives, était alors réputée pour accueillir tous les pires criminels, abandonnés là à leur sort sans possibilité de s'échapper. Jû est un de ces criminels, et est sur le point d'être livré à lui-même sur cette île après avoir semé le chaos dans le Japon, ayant tué et bouffé plus d'un millier de personnes. Les personnes l'amenant en bateau n'ont pas le temps de lâcher l'animal que celui-ci brise à mains nues la caisse où il était enfermé et se met à tuer tout le monde, fendant même en deux un fusil avec un sabre grâce à sa puissance, tandis que le bateau repart très vite en laissant ce démon passer ses nerfs sur les pauvres hommes n'ayant pas eu le temps de remonter dans le navire.
Voici une introduction qui a au moins le mérite de donner tout de suite le ton : Burning sera un récit bourrin et plutôt décérébré, et ce n'est certainement pas l'autre personnage central de cette histoire qui montrera le contraire. L'autre, c'est Jû, un ancien docteur coréen qui est sur l'île depuis déjà suffisamment longtemps pour avoir eu le temps de tuer, d'autopsier et de "sculpter" tous les autres criminels présents sur ce petit bout de terre. Son kiff ? Laisser vivantes ses victimes pendant 2 semaines après leur avoir arraché la peau et déboîté les membres, le tout pour des raisons artistiques.
Vous l'aurez deviné, entre un cannibale et un "artiste" morbide, ce sont deux antihéros totaux et très psychopathes que les auteurs nous invitent à suivre, et leur rencontre ne peut que faire des étincelles puisqu'ils entament l'un contre l'autre un violent duel ! Mais résumer le récit à ce simple affrontement entre deux tarés serait une erreur, car viennent vite s'y mêler des histoires de pirates, de magie, d'immortalité et de jeune fille à protéger.
On ne va pas se mentir : Burning Hell vaut surtout le coup pour le divertissement bourrin qu'il propose, et de ce côté-là Yang Kyun-Il assure sans mal le divertissement avec un trait brut, mais aussi quelques essais artistiques comme des effets de pinceaux. Couplé à quelques excellentes choses côté décors et costumes (les paysages sauvages, la pierre branlante, le design du bateau, les dégaines des pirates...) et à quelques petites mises en scène classiques mais hyper cool (comme le dezoom au début quand la bateau sans va, ou quelques cases plus ou moins symétriques faisant ressortir à la fois la dualité et la complémentarité de ces deux hommes bourrins), son trait dense et nerveux assure le spectacle.
Par contre, côté scénario... On va dire que ça a au moins le mérite de ne pas se reposer uniquement sur la confrontation entre Jû et Han et que d'autres éléments viennent vite faire leur apparition, mais le scénariste semble faire un peu trop ce qu'il veut sans être 100% soucieux de la cohérence (par exemple concernant les problèmes de langage, importants au début, puis moins problématiques ensuite avec Catherine même s'ils sont toujours présents), et balance beaucoup trop vite ses thématiques autour du "roar" et des ambitions totalement superficielles du chef des pirates. Dites-vous donc bien qu'il faut avant tout prendre ce récit comme un divertissement bourrin porté par deux antihéros bien campés.

Deuxième histoire du recueil, s'étalant sur 160 pages, Kingdom of Gods (Kami no Kuni en version originale) fut prépubliée dans le magazine Gekkan ! Spirits de Shôgakukan en 2014, donc après la fin de March Story et en parallèle d'Area D. En plus de Youn In-wan à la coordination de l'histoire, on trouve au scénario Kim Eun-Hee, qui a notamment planché sur les scénarios de plusieurs dramas coréens (3days, Ghost, Sign...).
Ici, nous suivons le périple d'Imun et de Jeha. Le premier est le jeune prince d’un royaume ravagé par de longues années de guerre et de famine, et traqué par un groupe d’assassins qui a décimé sa garde rapprochée. Le deuxième est un brigand que le prince a croisé et à qui il a demandé de le protéger en échange d'une forte somme. Poursuivis par les assassins, tous deux cherchent à atteindre la cité de Jurhon au fin fond des montagnes, mais ils ne sont pas au bout de leurs surprises, car une autre menace, bien plus irréelle que les assassins, ne va pas tarder à apparaître face à eux avec effroi...
En 160 pages, les auteurs développent un univers dont on ressent de plus en plus le chaos et la terreur ambiants, où le royaume est réellement dans une crise très sombre, obligeant les plus miséreux à se nourrir de cadavres humains pour espérer survivre, où ce cannibalisme ou le brigandage sont les seules solutions pour les plus pauvres avec ce que ça implique de perte d'humanité, et où même les enfants ne sont pas du tout épargnés. Un mélange d'aventure et d'horreur qui ne fait que se confirmer avec l'incursion d'un registre inattendu ici, surfant avec réussite sur le thème des morts-vivants. Comment est née cette étrange maladie faisant revenir les morts à la vie ? A-t-elle un rapport avec les attaques visant le jeune prince et avec les objectifs des assassins ? Comment espérer rendre sa beauté à ce royaume en perdition et espérer vaincre la maladie ? Autant de questions auxquelles, globalement, nous avons les réponses, pour un résultat pas déplaisant que l'on aurait aimé pouvoir suivre encore plus longtemps. D'autant que le développement des deux personnages principaux reste lui aussi plutôt convaincant, entre ce jeune prince souhaitant assumer avec humanité et dignité ses futures fonctions, et ce brigand cachant plus d'un secret et camouflant peut-être une certaine bonté derrière sa soif d'argent apparente.
Pour porter ce récit, la patte du dessinateur est impeccable. Il s'agit à ce jour de l'un de ses plus récents travaux, et cela se ressent d'autant plus juste après avoir lu la première histoire. Yang Kyung-Il y délivre à nouveau nombre de planches alliant densité, tension et brutalité, surtout quand les morts-vivants débarquent pour croquer de la viande, et le dynamisme de son découpage entretient constamment l'intensité. En plus des qualités vues sur la première histoire, on trouve en plus quelques effets un peu crayonnés, ainsi que beaucoup plus de travail sur les nuances de gris. Certains décors (bâtiments, vues montagneuses...) s'en trouvent plus riches et sublimes.

On en arrive alors au principal défaut de ce recueil : aucune des deux histoires n'a réellement de fin. La conclusion de Burning Hell est beaucoup trop ouverte, si bien qu'on a le sentiment que l'oeuvre était peut-être destinée à être plus longue, mais qu'elle ne 'as eu le succès escompté. Plusieurs pistes y sont lancées, mais elles ne seront sans doute jamais développées. La fin de Kingdom of Gods, elle, a le mérite d'apporter une réponse ou un semblant de réponse aux différents mystères, mais elle sonne plus comme un début d'aventure que comme une réelle conclusion... Dans les deux cas, c'est frustrant, et il faudra passer outre ce problème pour découvrir un recueil toutefois très agréable à parcourir. Assez bancal et inachevé côté scénarios (surtout concernant la première histoire, la deuxième développant quand même un univers plus prometteur), mais souvent impressionnant côté visuels, et capable d'installer de vraies ambiances.

On notera la traduction de qualité de Julien Favereau, qui offre un ensemble bien vivant.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
14 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs