Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 13 Juin 2025
Alors que le trio Dai Miyamoto Momentum poursuit avec succès sa tournée des clubs de la Nouvelle-Orléans, Dai suscite l'intérêt d'un producteur qui l'incite à participer au concert en ville d'un célèbre quartet new-yorkais en tant que guest. L'opportunité est belle pour accroître encore un peu plus sa notoriété, mais le leader du quartet a des exigences très strictes: pratiquant un jazz certes de qualité mais très calibré, il refuse tout débordement et calcule la durée de ses concerts à la minute, si bien qu'aucune improvisation n'est autorisée... et c'est d'autant plus le cas cette fois-ci pour notre héros qui n'est qu'un invité. Mais Dai ayant une vision et une pratique du jazz radicalement opposées à ça, saura-t-il se contenir et rester dans les clous ? Ou, au contraire, ne pourra-t-il pas s'empêcher de s'enflammer et de laisser s'exprimer sa passion et son envie de jouer, au risque de s'attirer les foudres du leader du groupe ? Quand on connaît Dai, la réponse apparaît assez évidente: ne perdant rien de sa personnalité ni de sa façon de jouer en toutes circonstances, notre héros captive à nouveau par sa passion et par sa manière de mettre en valeur le jazz en tant que musique de l'instant et de l'émotion. Il reste ainsi toujours fidèle à lui-même... et pourtant, s'il souhaite aller plus loin, peut-être devra-t-il pourtant apprendre à évoluer.
C'est cet enjeu qui, après des scènes d'adieux très réussies à La Nouvelle-Orléans, va être l'élément majeur de l'étape suivante du voyage de nos héros, dès lors qu'ils posent leurs bagages à Miami où c'est un public radicalement différent et difficile à cerner qui les attend. Après quelques moments de détente dans cet état très touristique et ensoleillé, ils découvrent dans les clubs de jazz un public globalement riche et, surtout, hétéroclite entre les habitués et les touristes de passage. Face à eux, Dai peine à percer, sent le public peu réceptif à sa manière de jouer, si bien qu'une évolution est nécessaire. Et cette évolution, elle pourrait bien passer par l'arrivée d'un nouveau membre dans le groupe sous l'impulsion de Zod: Joe Harding, un contrebassiste au premier abord très négatif avec son allure de loque, son allure pas du tout propre et surtout son alcoolisme poussé. Pourtant, cet homme, une fois qu'il a son instrument en main, pourrait bien surprendre et susciter l'admiration de nos héros, et avoir un impact fort sur Dai: véritable génie semblant ne faire qu'un avec sa contrebasse, Joe, derrière une personnalité mine de rien bien affirmée, va bel et bien pousser Dai à se calquer sur son rythme et à évoluer, pour un résultat saisissant où, comme toujours, Shinichi Ishizuka sait faire ressentir en profondeur la musique dans ses représentations graphiques.
Bien que, une nouvelle fois, on pourra se dire que le destin place décidément facilement Dai face à des rencontres très profitables au bon moment, l'oeuvre ne perd ainsi rien en rythme, et l'auteur ne laisse jamais son héros faillir bien longtemps afin de ne jamais briser l'aspect si emballant et irrésistible de son parcours. Surtout, on sent ici une nette évolution chez Dai, évolution qui pourrait bien passer aussi sur un plan autre que la musique, via ses retrouvailles avec une certaine connaissance qu'il avait laissée à Portland... Forcément, toutes ces perspectives nous mettent l'eau à la bouche en vue du 9e opus, voué à conclure cette troisième grande partie de la saga Blue Giant !