Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 17 Novembre 2011
« Touch of charm » vous dit quelque chose ? C’est normal, c’était le premier volume d’une série de plusieurs anecdotes autour d’un même univers, même si l’auteur se concentre sur d’autres protagonistes on n’oublie jamais le lien qui est fait à ses autres œuvres. Un concept à la CLAMP qu’on apprécie bien, puisqu’il témoigne de l’amour que l’auteur porte à l’univers qu’elle a créé et aux personnages qui y évoluent. Ce qui nous incite fortement à les aimer à notre tour. Ici c’est Yagisawa qui se pose en héros. C’est un séduisant employé d’une petite maison d’édition, homosexuel, mais ses histoires d’amour ne sont pas des réussites. Entre coucher avec un homme marié et son lourd passé derrière lui, que lui réserve l’avenir ? Sans doute de retrouver Subaru. Un homme qui sait tout de ses désirs en matière de sexe, qui connait son sombre passé et qui connait jusqu’à ses habitudes. Peut-être parce qu’ils se sont connus très jeunes, et que Subaru n’a cessé d’aimer et de rechercher Yagisawa pendant douze ans. Douze années à tenter d’oublier un passé qui lui revient en plein dans la figure. Arrivera-t-il à concilier vie privée et travail, puisque Subaru est l’écrivain qu’il supervise ? Surmontera-t-il pour lui les ombres du passé ? Autant que questions qui hantent notre lecture, nous guidant le long des rebondissements et des émotions de nos deux protagonistes.
La construction du récit, si elle est parfois maladroite, amène une sorte d’irréel qui nous touche beaucoup, parfois plus que le contenu. En effet, le passé de nos héros est disséminé à travers tout le manga par plusieurs pages qui se fondent dans le reste, parfois du point de vue de l’un, parfois de l’autre. On jongle entre les émotions des deux personnages principaux et cela nous fait du bien de tenter de comprendre les visions des choses de chacun. D’autant que ce lourd passé reste touchant, car exprimant un profond mal être chez les trois personnes concernées. On sent bien qu’il n’y a ni mal ni bien, car l’auteur nous fait découvrir successivement les différents états d’esprit de chacun à ce moment là. Profond malaise, amour tordu, honte, impulsions et envie, autant de mots qui définissent parfaitement ces petits instants qui étayent le présent et le rendent plus fort, plus juste. La douleur est parfaitement exprimée, tout comme peut l’être l’amour sous toutes ses formes, la quête désespérée de la personne aimée ou la culpabilité passée qui ressurgit parfois. Cependant, on garde un goût un peu amer dans la bouche puisque quand l’auteur semble vouloir les faire avancer ... on se perd dans des considérations encore trop floues ou tournées vers une période trop sombre. On aimerait plus de joie, un rayon de soleil dans leur quotidien quelque peu attristé par leurs caractères, et parsemé de nombreuses scènes de sexe qui ne font qu’appuyer ce côté « lutte à corps perdu » que l’on a parfois l’impression de lire de manière un peu trop prégnante.
Au niveau des graphismes, on se retrouve face à un dessin assez original dans le traité, avec beaucoup de traits brouillons qui font un ensemble à la fois soigné et désorganisé. Sous des dehors sages, les scènes érotiques sont plutôt bien représentées. Le reproche principal, c’est le manque de finesse parfois dans certaines situations, mais surtout le masque assez hermétique des protagonistes, qui empêche parfois de faire passer tout ce qu’il survient entre les deux amoureux. Des décors cependant assez conséquents, des personnages bien différenciés … Le tout reste agréable, malgré le petit défaut cité ci-dessus. On retrouve parfaitement la souffrance et la mélancolie constante de tous les personnages de l’auteur, mais c’est peut-être justement cela qui pèse parfois et rend la lecture un peu difficile. La joie se fait rare, les rires encore plus et il manque un peu de gaieté à ce titre, comme aux autres œuvres de l’auteur, même si ici Subaru en exprime un peu plus que Kei. Au niveau de l’édition de Taïfu, pas de grandes différences avec l’ordinaire : un travail plus que correct avec des pages suffisamment épaisses et ... une adaptation des onomatopées. Véritable plaisir à la lecture ! Un petit quelque chose de très agréable, donc, même si on reste avec un petit coup de mélancolie en bouche ...