Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 27 Juin 2025
Après Todo et Monai, c'est au tour de Takeo Hattori de s'éteindre, au bout d'un combat où il utilisa ses deux sabres d'une façon qui est restée dans les annales, en se confrontant à lui seul à une trentaine de soldats du Shinsengumi pour permettre à ses quatre acolytes encore en vie de s'enfuir. Tout en espérant revoir Shinohara qui a pris un chemin différent, les trois autres survivants Tomiyama, Kano et Suzuki arrivent jusqu'au fief de Satsuma où ils espèrent obtenir l'asile. Mais après ça, quelle voie prendront chacun de ces hommes, ainsi que leurs ennemis ?
C'est tout la questions à laquelle les auteurs tâchent de répondre au fil de ce troisième et dernier volume d'Abura. A l'heure où la bataille d'Aburano Koji, donnant son nom à la série, touche à sa fin en ayant été soigneusement décortiquée dans les deux premiers volumes pour en faire ressortir toute la dureté, tout l'héroïsme et toute l'importance historique, l'heure est venue de mesurer, sur plusieurs années, les conséquences de cet événement sur des personnages qui, plus encore, sont pris dans l'inévitable marche de la grande Histoire.
Dans la mesure où la série se focalisait avant tout sur l'incident d'Aburano Koji, certains des nombreux aspects de ce dernier tome pourraient paraître un peu rapides, d'autant plus que cette fois-ci il manque peut-être quelques notes de l'éditeur pour mieux décortiquer le contexte historique auprès d'un lectorat qui le connaîtrait mal. Mais il reste que le scénariste Number 8 s'applique suffisamment à aborder de nombreux détails historiques tantôt de premier plan comme l'incident de Sumizome ou la capitale bataille de Toba-Fushimi, tantôt secondaires mais quand même importants comme l'émergence des fusils Gewehr et Jäger, dans un souci d'immersion et de documentation toujours assez prononcé. Et ces développements sont amplement suffisants pour ensuite nous permettre de voir si, à une ère où le Japon connaît de nombreux changements rendant bientôt caduques les querelles d'autrefois, les différents personnages choisiront la vengeance jusqu'au bout ou le pardon malgré tout, s'ils opteront pour la mort en se fiant à leur honneur de samouraï ou la vie comme a souhaité le leur dicter Takeo Hattori avant de succomber pour les sauver. Des quatre survivants d'Aburano Koji jusqu'à leurs autres alliés du Goryo Eji, en passant par les membres du Shinsengumi comme Isami Kondo, Toshizo Hijikata, Sanosuke Harada ou encore Shinpachi Nagakura, les mangakas savent très bien mettre en avant leurs personnages, quelle que soit la voie qu'ils vont prendre, le tout dans une rigueur historique aussi fiable que possible. Avec rigueur et sans jugement. En mettant simplement en avant, au bout du compte, le fait qu'ils ont été compagnons à une période particulièrement trouble et chaotique de l'Histoire du Japon.
Au bout du compte, et en ajoutant en plus les assez nombreuses pages bonus où les auteurs reviennent un peu sur leurs recherches graphiques et sur leur documentation, ont peut dire qu'Abura accomplit très bien son rôle. Au scénario, Number 8 mène très bien les choses en abordant rigoureusement et sous un angle précis (le cas des membres du Goryo Eji à partir de leur mortel conflit avec le Shinsengumi) tout un morceau d'Histoire essentiel de son pays, tandis qu'au dessin Sakuzo Baku livre une prestation impressionnante et intense, donnant follement envie de revoir ce dessinateur sur de potentielles futures oeuvres.