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Avis sur Danganronpa V3: Killing Harmony

Voq

De Voq [678 Pts], le 11 Juin 2021 à 15h03

13/20

Seize étudiants, chacun ayant un talent « ultime », se retrouvent coincés ensemble et forcés par le proviseur Monokuma, fameux ours bipolaire, de participer à un « killing game » : arrivé au troisième volet, on connaît la formule. D'ailleurs, la structure ne bouge pas d'un iota : un prologue qui met les éléments en place, cinq chapitres de killing game auxquels s'ajoute un dernier où l'on perce les mystères du jeu et du monde qui l'entoure... et chaque phase de killing game se déroule à nouveau de la même façon : (1) dayly life, on explore les lieux et on fait plus ample connaissance ; (2) deadly life, l'un des participants a été tué, on récolte tous les indices susceptibles de mener à son meurtrier mais pour l'heure on ne réfléchit surtout pas plus loin (j'y reviendrai) ; (3) class trial, tous les survivants sont réunis en cercle et se disputent pour savoir qui a fait le coup.

Côté environnements, on se rapprocherait plutôt de l'école du premier Danganronpa, mais cette fois avec une partie « extérieure » afin d'éviter le simple copier-coller. En somme, plutôt que d'être enfermé dans un seul bâtiment, on dispose en plus du campus avec son dortoir séparé et autres locaux qui deviendront disponibles au fur et à mesure. Cela dit, l'idée est à double tranchant : en n'étant pas aussi cloîtré que dans Trigger Happy Havoc, on ne retrouve pas non plus son atmosphère anxiogène, sans pour autant bénéficier de l'exotisme du deuxième volet.
Signalons tout de même de petites pointes d'originalité, comme la végétation qui s'infiltre partout au début du jeu, participant au mystère global, ainsi que les nouvelles zones de chaque chapitre qui ne se déverrouillent plus automatiquement (étage par étage pour le 1, île par île pour le 2) mais nécessite l'utilisation d'objets sur les réceptacles adéquats. Que l'on aura sans peine repérés au préalable, aucune difficulté de ce point de vue, mais quelque part ça suffit à se sentir plus impliqué dans l'exploration.
Hormis cela, les lieux ne présentent rien de très nouveau quand on connaît les précédents opus et semblent surtout pensés pour les crimes qu'ils sont destinés à abriter (il est par exemple évident dès le début du chapitre 3 que l'on aura affaire à un meurtre en chambre close).

Côté personnages, c'est un peu le même constat : ça fonctionne, mais l'aspect découverte n'est plus là et sans vraiment démériter, le cast peine à se hisser au niveau des précédents. Pire, certains personnages paraissent bien peu convaincants en tant qu'Ultimate Students : que la magicienne ultime soit une grosse feignasse qui n'arrête pas de parler de vraie magie mais n'a pas l'air de savoir faire grand-chose, admettons, on peut lui accorder le bénéfice du doute ; que « the Ultimate Inventor » passe son temps à balancer des obscénités et se révèle complètement stupide dès qu'il s'agit d'élucider des crimes, d'accord, elle a malgré tout l'air de toucher sa bille en électronique ; en revanche, être entomologiste, ça suppose un chouïa plus que d'être amoureux des insectes, et devenir astronaute, ce n'est pas donné au premier idiot venu, aussi persévérant soit-il.
Petite surprise, plutôt que d'incarner un perso dont le seul talent est d'avoir été tiré au sort ou qui ne s'en souvient plus, on se lance dans l'aventure avec une pianiste, changement plutôt appréciable. Ce qui l'est moins, c'est de se retrouver affublé d'un soi-disant Ultimate Detective qui peine à additionner deux et deux (combien de fois j'ai eu envie de l'étrangler durant les class trials !), et au final, alors que Kokichi, le « Ultimate Supreme Leader », semble un peu pénible au début, il est à peu près le seul à mettre un peu de piment là-dedans. On a beau apprécier Maki, « The Ultimate Child Caregiver » qui cache un lourd secret, ou Tenko, praticante du « Neo-Aïkido » qui déteste les hommes, j'exagère à peine si je dis que sans Kokichi, on s'ennuierait à crever.
Quant aux « méchants », on retrouve l'inévitable Monokuma, accompagné cette fois de cinq Monokubs (sa progéniture, en quelque sorte) qui, s'ils n'ont pas le charme de l'original, s'en tirent autrement mieux que les insupportables cinq gosses du spin-off Danganronpa Another Episode: Ultra Despair Girls auxquels ils font penser quand on les rencontre.
Concernant les voix de tous ces personnages, notons qu'à l'instar du spin-off, Danganronpa V3 ne dispose que des doublages anglais alors que le 2 proposait également la version japonaise. Pas un vrai point noir, les voix anglaises sont de très bonne facture, mais ce choix de ne plus inclure la VO peut sembler étrange.


Maintenant, le plaisir de jouer à Danganronpa, ce n'est pas uniquement sympathiser avec des personnages pour les découvrir tués ou tueurs, c'est aussi et surtout mener l'enquête et lever les mystères qui entourent les crimes ainsi que la trame plus générale. Et là, le spoil étant à prohiber absolument, je vais me retenir de dévoiler des informations essentielles.

Pour ce qui est du killing game, les crimes sont toujours aussi ingénieux, et leur résolution comporte toujours cette part d'inattendu qui y jette une lumière différente, capable dans certains cas de nous rendre le tueur plus sympathique que la victime. À ce titre, la fin du chapitre 1 apporte vraiment une idée neuve à la série (idée qui aurait pu être exploitée davantage dans la suite, mais admettons).
Cela dit, certaines de ces révélations peuvent paraître un peu grosses. Voire très grosses (n'est-ce pas Kirumi ?).
Et surtout, j'en viens au vrai gros problème du jeu à mes yeux :

Il y avait quelques longueurs dans les phases de procès de Danganronpa 1, que je pardonnais facilement. Je trouvais celles du 2 déjà plus gênantes... Mais alors ici, ça prend des proportions hallucinantes : on passe littéralement des heures durant les class trials à pinailler sur des détails, faire des détours invraisemblables ou à réfuter les âneries débitées par les crétins de la bande, pour aboutir à des conclusions qui sont absolument évidentes dès la phase d'enquête. De ce point de vue, la phase de class trial du chapitre 2 est une véritable torture, à en couper l'envie de jouer : à l'exception de l'identité du meurtrier pour laquelle on n'avait pas forcément de certitude, et du mobile du crime (exposé après la fin du procès, d'ailleurs), on n'apprend pour ainsi dire RIEN, et pourtant on passe des heures à faire du surplace quant au déroulement du crime. Non, en fait c'est même pire que de faire du surplace : pour donner un exemple, à la question de l'heure la mort, si on répond correctement la première fois on nous compte faux et il faut encore ergoter pendant des plombes avant d'arriver à la conclusion qui nous était refusée plus tôt ! (Par contre sauter sans problème d'une hauteur de 4 ou 5 mètres, ça va, ça n'interpelle personne...)
Bon, je dois reconnaître, c'est le pire qu'on rencontre, et d'assez loin, mais les autres chapitres ne manquent pas non plus de moments qui donnent envie de hurler avec ces débats qui traînent indéfiniment.
Sérieusement, Killing Harmony nécessite une cinquantaine d'heures pour voir le bout (et plus pour les bonus post-game), on aurait pu retirer celles passées à enfoncer des portes ouvertes, les joueurs n'auraient tout de même pas eu à se plaindre d'un jeu trop court. Il suffirait pourtant de pouvoir tirer des conclusions préliminaires durant les phases d'enquête plutôt que de juste relever les indices sans réfléchir deux secondes à comment ils se connectent : ça étofferait les phases Deadly Life un peu maigres en l'état, en contrepartie ça allégerait les Class Trials lourdingues, le jeu gagnerait en fluidité et en dynamisme. Je ne sais pas, je trouve ça complètement aberrant d'avoir un défaut qui se retrouve amplifié au fil des épisodes plutôt que de le voir remédié...

Bref, arrêtons un peu de voir les choses en noir et penchons-nous plutôt sur la trame de fond. Danganronpa 1 et 2 avaient mis en place un certain univers, dans lequel s'inscrivait encore Another Episode. Pour ce qu'on en apprend au fil de l'aventure, ce V3 semble partir dans une direction différente, tout en s'efforçant d'inclure les anciens événements... un lien qui paraît à la fois ténu et plutôt superflu, après tout rien n'empêchait de repartir sur de nouvelles bases.
Mais !
Pour les vraies révélations, c'est dans le dernier chapitre que ça se passe. Passons sur la limite de temps intenable et inutile de sa phase d'enquête (si le compte à rebours est écoulé, on reprend à la dernière pièce où l'on était arrivé avec du rab de temps), c'est surtout l'occasion de visiter des secteurs auparavant inaccessibles et d'en apprendre plus sur certains personnages qui avaient laissé planer le mystère après leur mort... Puis vient le Class Trial ultime, où l'on va avoir le fin mot de l'histoire.
Et là, je ne vais évidemment pas dévoiler le pot aux roses, mais je peux dire que c'est autrement plus inattendu que la décevante fin de Goodbye Despair qui était à la fois prévisible et convenue. Non seulement ça, mais en plus ces révélations remettent en perspective ce qui pouvait auparavant passer pour des faiblesses scénaristiques. Le seul élément que l'on voyait venir là-dedans est dû au fait que dans ce genre de jeu, un personnage qui survit jusqu'au bout mais qui n'a servi à rien jusque-là, c'est forcément louche, mais ça n'enlève rien à la surprise que nous réserve tout le reste. J'aime aussi beaucoup le fait qu'à l'instar de Trigger Happy Havoc, on n'ait pas de vraie certitude, qu'on termine le jeu avec un doute quant à ce qu'on vient de découvrir.

Enfin voilà, ce chapitre final n'excuse pas tout, Killing Harmony reste en partie plombé par ses longueurs. Néanmoins, il permet non seulement de terminer le jeu sur une note d'inattendu franchement bienvenue, mais aussi d'apporter une conclusion à la trilogie d'autant plus pertinente qu'elle est en décalage avec les précédents volets.

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