Manga Interview de Pocket Chocolate
Nous l'avions déjà rencontré en 2014 pour qu'il nous parle de Crystal Sky of Yesterday et de ses travaux précédents (lire l'interview), et nous avons eu la chance, grâce aux éditions Kotoji, de le revoir à l'occasion de Japan Expo. Voici le compte-rendu de notre nouvelle interview de Pocket Chocolate, artiste chinois toujours aussi humble, accessible et intéressant, qui revint notamment sur ses dernières oeuvres en date : That moment, maybe, Une nuit calme et paisible, sans oublier la future adaptation animée de Crystal Sky of Yesterday !
That moment, maybe affiche les noms de Sunny Cao au scénario et de Kevin Wang pour l'histoire originale. Qui sont ces personnes pour vous ?
Pocket Chocolate : C'est mon équipe. Ils m'aident dans les corrections et la mise en page.
On retrouve dans cette œuvre des thématiques qui vous sont chères : les souvenirs du passé qui nous rattrapent pour semer en nous le doute, nous pousser à faire une mise au point sur nos regrets et sur notre avenir, pour au final encore mieux se forger dans notre entrée dans l'âge adulte...
L'histoire est née quand j'ai discuté avec un ami étudiant la psychologie. A cet instant, je me suis rendu compte qu'alors qu'on imagine le psychologue comme une personne assez détachée, en réalité il n'y a pas grand chose entre le psychologue et le patient, si bien qu'il peut y avoir de nombreux doutes y compris chez le psychologue. C'est ce qui m'a fait revenir vers mes anciens thèmes.
Avez-vous dû faire des recherches sur le travail de psychologue ?
Oui et non, car ma principale source a été cet ami avec qui j'ai ensuite beaucoup discuté, mais de façon naturelle, autour d'un café ou d'un repas. De la documentation très formelle, il n'y en a pas eu. Je me suis vraiment basé sur le ressenti de mon ami, que j'ai jugé comme une source beaucoup plus juste humainement.
A présent, j'ai beaucoup d'intérêt pour le milieu de la psychologie, notamment pour la notion de transfert que j'aborde dans mon oeuvre.
Quelle part de vous y a-t-il dans Li Shaokun, le personnage principal de That moment, maybe ?
Je dirais 30%. Cela correspond à sa part de doutes. Ces doutes, ce sont ceux que je ressens. Ca m'arrive très souvent d'avoir des choix à faire et de ne pas savoir lesquels faire. Mais une fois les choix faits, mon personnage est sûr de lui, et je pense être pareil.
A la lecture de l'oeuvre, on a plutôt le sentiment que Wen Xin représente le passé de Shaokun, et Fei Fei son avenir. Est-ce une volonté de votre part ?
Fei Fei serait plutôt son présent. Elle pourrait devenir son avenir, et c'est justement ça qui est un peu en doute.
Visuellement, That moment, maybe a un style de dessins un peu différent de Crystal Sky of Yesterday, peut-être un peu plus crayonné...
A chaque nouvelle oeuvre, j'essaie de changer un peu de style de dessins. Je ne suis jamais totalement satisfait de ce que j'ai fait avant, donc j'essaie à chaque fois d'apporter un renouveau.
Du coup, qu'est-ce qui a changé dans votre façon de dessiner ?
Dans Crystal Sky of Yesterday, ma précédente oeuvre, j'ai utilisé beaucoup de bleu, ce qui pour moi correspondait aux hésitations des personnages et à la tristesse de leur coeur. Avec That moment, maybe, j'ai choisi des couleurs un peu plus simples, un peu moins vives et imposantes.
L'utilisation des couleurs dans Crystal Sky of Yesterday se voulait assez symbolique. Par exemple, les moments où ça dégénère un peu sont un peu plus rouges et marqués par des contrastes. Dans That moment, maybe, les couleurs contrastent moins, sont moins vives, et j'ai voulu y apporter une impression de crayonné, d'esquisse.
Quels éléments de l'histoire de That moment, maybe étaient les plus difficiles à peaufiner, à rendre comme vous le vouliez ?
Je ne m'attendais pas à ce que ce soit aussi difficile de rendre les sentiments des personnages avec autant de nuances que je le souhaitais. Les aspects un peu plus « négatifs », notamment, étaient délicats car je m'inspirais de mon entourage.
Cet été est paru chez Kotoji votre nouveau livre, Une nuit calme et paisible, en collaboration rapprochée avec l'éditeur. Comment est née cette envie de collaborer au plus près avec Kotoji ?
C'est Pierre Sery, le patron de Kotoji, qui a proposé l'idée. Je n'avais jamais fait ça avant, et me suis dit que ça valait le coup d'essayer.
On sait que la 1ère partie de ce nouvel album se compose de deux histoires courtes. La 1ère des deux présente la relation entre deux lycéennes chinoises. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur sa conception ?
En Chine, il arrive souvent que des lycéennes deviennent vraiment très très proches. J'ai voulu apporter à cela une impression de beauté et de calme.
La 2ème histoire, I killed myself, montre une autre facette de votre talent scénaristique avec une histoire visiblement plus sombre et éloignée des romances pour lesquelles vous êtes reconnu. Pourquoi ce choix ? Cela a-t-il été difficile pour vous de vous essayer à un récit aussi différent ?
J'ai fait cette histoire en 2009, j'étais alors beaucoup plus jeune, et elle correspond beaucoup à ce que je ressentais à l'époque. Je me sentais très mal, moralement ce n'était pas terrible du tout. J'avais beaucoup de doute sur ma carrière, je me demandais pourquoi j'étais là, pourquoi je dessinais. Dans cette histoire je dessine aussi un personnage qui fait un choix.
Quand on est enfant, on a des rêves d'avenir, par exemple devenir sportif ou astronaute. En grandissant, une fois pleinement dans la société, on se rend compte que ce n'est pas forcément réalisable. Pour résumer, j'étais un peu dans cette situation, et du coup j'étais très anxieux quant à l'avenir.
Quand nous vous avons interviewé en 2014, vous nous aviez avoué être alors en train de concevoir une nouvelle version enrichie du Mont du Sud. Où en est ce projet désormais ?
Actuellement j'ai dû faire une pause sur ce projet pour me consacrer notamment à Une nuit calme et paisible, mais aussi parce que je suis en plein dans mon projet de dessin animé.
Un dessin animé ?
Il va y avoir une version animée de Crystal Sky of Yesterday. Je suis en plein travail dessus, voici quelques esquisses !
En théorie ça devrait sortir au printemps prochain. Ce sera un film d'animation.
Ce dessin animé va reprendre l'histoire du manhua ? Ou la compléter ?
Ce sera une sorte de préquelle du manhua, qui mettra en scène les mêmes personnages.
On vous sait très amateur de photographie. Comment est né votre intérêt pour cet art ? Qu'est-ce que vous y préférez ?
C'est justement en dessinant que ça m'est venu. Quand je dessine, je fais tout un travail sur la lumière, et j'avais besoin d'exemples photographiques. C'est à partir de là que la photographie m'a de plus en plus fasciné.
Quand je fais mes dessins, j'essaie de me rapprocher de l'art de la photographie.
Un grand merci à Pocket Chocolate, à son interprète Baptiste Gaussen, et aux éditions Kotoji.
That moment, maybe affiche les noms de Sunny Cao au scénario et de Kevin Wang pour l'histoire originale. Qui sont ces personnes pour vous ?
Pocket Chocolate : C'est mon équipe. Ils m'aident dans les corrections et la mise en page.
On retrouve dans cette œuvre des thématiques qui vous sont chères : les souvenirs du passé qui nous rattrapent pour semer en nous le doute, nous pousser à faire une mise au point sur nos regrets et sur notre avenir, pour au final encore mieux se forger dans notre entrée dans l'âge adulte...
L'histoire est née quand j'ai discuté avec un ami étudiant la psychologie. A cet instant, je me suis rendu compte qu'alors qu'on imagine le psychologue comme une personne assez détachée, en réalité il n'y a pas grand chose entre le psychologue et le patient, si bien qu'il peut y avoir de nombreux doutes y compris chez le psychologue. C'est ce qui m'a fait revenir vers mes anciens thèmes.
Avez-vous dû faire des recherches sur le travail de psychologue ?
Oui et non, car ma principale source a été cet ami avec qui j'ai ensuite beaucoup discuté, mais de façon naturelle, autour d'un café ou d'un repas. De la documentation très formelle, il n'y en a pas eu. Je me suis vraiment basé sur le ressenti de mon ami, que j'ai jugé comme une source beaucoup plus juste humainement.
A présent, j'ai beaucoup d'intérêt pour le milieu de la psychologie, notamment pour la notion de transfert que j'aborde dans mon oeuvre.
Quelle part de vous y a-t-il dans Li Shaokun, le personnage principal de That moment, maybe ?
Je dirais 30%. Cela correspond à sa part de doutes. Ces doutes, ce sont ceux que je ressens. Ca m'arrive très souvent d'avoir des choix à faire et de ne pas savoir lesquels faire. Mais une fois les choix faits, mon personnage est sûr de lui, et je pense être pareil.
A la lecture de l'oeuvre, on a plutôt le sentiment que Wen Xin représente le passé de Shaokun, et Fei Fei son avenir. Est-ce une volonté de votre part ?
Fei Fei serait plutôt son présent. Elle pourrait devenir son avenir, et c'est justement ça qui est un peu en doute.
Visuellement, That moment, maybe a un style de dessins un peu différent de Crystal Sky of Yesterday, peut-être un peu plus crayonné...
A chaque nouvelle oeuvre, j'essaie de changer un peu de style de dessins. Je ne suis jamais totalement satisfait de ce que j'ai fait avant, donc j'essaie à chaque fois d'apporter un renouveau.
Du coup, qu'est-ce qui a changé dans votre façon de dessiner ?
Dans Crystal Sky of Yesterday, ma précédente oeuvre, j'ai utilisé beaucoup de bleu, ce qui pour moi correspondait aux hésitations des personnages et à la tristesse de leur coeur. Avec That moment, maybe, j'ai choisi des couleurs un peu plus simples, un peu moins vives et imposantes.
L'utilisation des couleurs dans Crystal Sky of Yesterday se voulait assez symbolique. Par exemple, les moments où ça dégénère un peu sont un peu plus rouges et marqués par des contrastes. Dans That moment, maybe, les couleurs contrastent moins, sont moins vives, et j'ai voulu y apporter une impression de crayonné, d'esquisse.
Quels éléments de l'histoire de That moment, maybe étaient les plus difficiles à peaufiner, à rendre comme vous le vouliez ?
Je ne m'attendais pas à ce que ce soit aussi difficile de rendre les sentiments des personnages avec autant de nuances que je le souhaitais. Les aspects un peu plus « négatifs », notamment, étaient délicats car je m'inspirais de mon entourage.
Cet été est paru chez Kotoji votre nouveau livre, Une nuit calme et paisible, en collaboration rapprochée avec l'éditeur. Comment est née cette envie de collaborer au plus près avec Kotoji ?
C'est Pierre Sery, le patron de Kotoji, qui a proposé l'idée. Je n'avais jamais fait ça avant, et me suis dit que ça valait le coup d'essayer.
On sait que la 1ère partie de ce nouvel album se compose de deux histoires courtes. La 1ère des deux présente la relation entre deux lycéennes chinoises. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur sa conception ?
En Chine, il arrive souvent que des lycéennes deviennent vraiment très très proches. J'ai voulu apporter à cela une impression de beauté et de calme.
La 2ème histoire, I killed myself, montre une autre facette de votre talent scénaristique avec une histoire visiblement plus sombre et éloignée des romances pour lesquelles vous êtes reconnu. Pourquoi ce choix ? Cela a-t-il été difficile pour vous de vous essayer à un récit aussi différent ?
J'ai fait cette histoire en 2009, j'étais alors beaucoup plus jeune, et elle correspond beaucoup à ce que je ressentais à l'époque. Je me sentais très mal, moralement ce n'était pas terrible du tout. J'avais beaucoup de doute sur ma carrière, je me demandais pourquoi j'étais là, pourquoi je dessinais. Dans cette histoire je dessine aussi un personnage qui fait un choix.
Quand on est enfant, on a des rêves d'avenir, par exemple devenir sportif ou astronaute. En grandissant, une fois pleinement dans la société, on se rend compte que ce n'est pas forcément réalisable. Pour résumer, j'étais un peu dans cette situation, et du coup j'étais très anxieux quant à l'avenir.
Quand nous vous avons interviewé en 2014, vous nous aviez avoué être alors en train de concevoir une nouvelle version enrichie du Mont du Sud. Où en est ce projet désormais ?
Actuellement j'ai dû faire une pause sur ce projet pour me consacrer notamment à Une nuit calme et paisible, mais aussi parce que je suis en plein dans mon projet de dessin animé.
Un dessin animé ?
Il va y avoir une version animée de Crystal Sky of Yesterday. Je suis en plein travail dessus, voici quelques esquisses !
En théorie ça devrait sortir au printemps prochain. Ce sera un film d'animation.
Ce dessin animé va reprendre l'histoire du manhua ? Ou la compléter ?
Ce sera une sorte de préquelle du manhua, qui mettra en scène les mêmes personnages.
On vous sait très amateur de photographie. Comment est né votre intérêt pour cet art ? Qu'est-ce que vous y préférez ?
C'est justement en dessinant que ça m'est venu. Quand je dessine, je fais tout un travail sur la lumière, et j'avais besoin d'exemples photographiques. C'est à partir de là que la photographie m'a de plus en plus fasciné.
Quand je fais mes dessins, j'essaie de me rapprocher de l'art de la photographie.
Un grand merci à Pocket Chocolate, à son interprète Baptiste Gaussen, et aux éditions Kotoji.
De ProfesseurChips [169 Pts], le 31 Août 2016 à 11h23
Merci pour cette interview ! C'est toujours très intéressant pour les fans.