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Ciné-Asie Chronique ciné asie - Détective Dee II - La Légende du dragon des mers

Jeudi, 28 Mai 2015 à 10h00

Dans la Chine antique, l’impératrice Wu règne sur la dynastie Tang aux côtés de l’empereur Gaozong. Elle envoie sa flotte vers l’empire Baekje, un allié, afin de combattre contre le royaume Buyeo. Mais les navires sont attaqués par une créature géante et mystérieuse surgissant de l'océan. C'est ainsi que naît la légende du dragon des mers parmi les habitants de Luoyang, la capitale orientale. Il se trouve que le jeune Détective Dee y est justement muté, avec pour ambition de servir la loi. De fil en anguille, et grâce au soutien du Détective Yuchi, Dee pourrait bien lever le voile sur la créature.



Derrière son appellation Détective Dee II : La Légende du dragon des mers, le film est en fait une préquelle à Détective Dee : Le Mystère de la flamme fantôme. Attention donc au titre français : les marketeux peu inspirés ont sans doute estimé que rajouter un « deux » pourrait booster les ventes, là où le titre international était beaucoup plus clair quant au contenu de l’œuvre (Young Detective Dee : Rise of Sea Dragon). Se déroulant donc AVANT le premier Détective Dee, le film est sorti dans les salles françaises en août 2014 puis en décembre en DVD et Blu-ray.



Réalisé par Tsui Hark (pour ceux qui ne connaissent pas, jetez-vous sur les « Il était une fois en Chine », « Le festin chinois », « The Blade »...et une fois que vous aurez terminé, vous pourrez aussi apprécier « Seven Swords »), ce Détective Dee II a mis un an à nous parvenir. En tant que préquelle, le réalisateur a dû faire rajeunir son casting : les rôles de Dee et Shatuo Zhong, initialement occupés par les vieux briscards (enfin, pas si vieux que ça non plus) Andy Lau et Tony Leung Ka-Fai, reviennent ici à des nouveaux venus, Mark Chao et Gengxin Lin. Il n'y a que Carina Lau – c'est bien connu, la beauté féminine n'a pas d'âge – qui reste fidèle au poste, campant l'impératrice Wu.



Pas de problème pour ceux qui n'ont pas vu le premier : comme dit auparavant, on a ici affaire à une préquelle, et il n'y a strictement aucun clin d'oeil... C'est d'ailleurs un peu dommage. Mais le plus décevant n'est pas là. Détective Dee, c'est un héros de roman policier chinois, apparaissant dans plusieurs séries écrites par Robert van Gulik, Eleanor Cooney, Daniel Altieri ou encore Frédéric Lenormand, et inspiré d'un célèbre enquêteur ayant réellement existé, Di Renjie. Dans le premier film, on avait affaire à un Dee impertinent, rebelle, malicieux, incarné avec justesse par Andy Lau. L'intérêt de Détective Dee II aurait donc dû être d'observer l'essor de ce personnage haut en couleur lors de sa jeunesse, à travers une enquête inédite. Sauf que le Dee présent dans cette préquelle est d'une fadeur sans nom. Alors bien sûr, le jeune enquêteur faisant ses armes, il apparaît logique qu'il ne soit pas encore parvenu totalement à maturité... mais cela excuse-t-il un personnage aussi cliché, si peu travaillé, et desservi par l'interprétation terne de Mark Chao, idole à midinettes ? Bref, ce Dee jeune n'a pas la carrure du Dee plus expérimenté vu dans l'opus n°1. Problème : si le personnage de Dee ne passionne pas, on peut dire la même chose du scénario, loin d'être aussi palpitant que dans Le Mystère de la flamme fantôme.



On est pourtant dans l'action dès le début, avec des navires de guerre concassés par une force jaillissant de l'eau. Le scénariste n'a pas cédé à la facilité, l'enquête menée par Dee ne commençant pas directement par l'étude de la tragédie maritime, mais par tout autre chose : le rapt manqué d'une fille de joie dont le succès ne faiblit pas, mais que l'impératrice jalouse. Oui, il n'y a pas de lien apparent entre cette tentative d'enlèvement et un monstre marin. Dee en trouvera un. Cependant, les débuts de l'enquête sont totalement à la rue. La façon dont Dee devine les origines de son futur protégé est par exemple totalement tirée par les cheveux. Le tout finira par déboucher sur un complot de plus grande envergure, mais loin d'être prenant donc. Le plus embêtant, c'est que le film tente à un moment de se donner des airs d'un Sherlock Holmes de Guy Ritchie – c'est d'autant plus surprenant que Le Mystère de la flamme fantôme ne faisait pas ça ! – avec une insistance grotesque sur les effets de ralenti pour filmer des attaques physiques précisément portées, ou la même insistance sur les indices trouvés lors des énigmes à résoudre. Inconstant, il finit par abandonner très vite cet aspect en revenant à des choses plus classiques, et pour tout dire, plus à sa hauteur, car on ne peut pas dire que les plagiats des numéros de Robert Downey Jr soient une réussite.


Même mauvais son de cloche sur le recours abusif aux effets spéciaux numériques. Tsui Hark use, qu'écris-je, abuse de ceux-ci pour un résultat extrêmement inégal. Si les plans larges sur la capitale et certains décors sont chouettes et assez impressionnants, il faut l'avouer, que dire du gâchis observé dans quasiment toutes les scènes d'action (et il y en a !), dans lesquelles toutes les bonnes idées sont neutralisées par des effets omniprésents, mais si peu réussis ! Le pire reste sans doute les armes de jet, au design et à la trajectoire plus qu'improbables. Il y a aussi le fameux dragon des mers, laid au possible. Un Kraken vivant dans les Caraïbes (si vous voyez c'que jveux dire) n'en ferait qu'une bouchée (numérique). L'abus de mauvais effets spéciaux est d'autant plus regrettable que, les films de Tsui Hark s'étant toujours fait remarquer par leur style virevoltant, les chorégraphies sont plutôt réussies, mais très vite dénaturées par des éléments informaesthétiques (oui, c'est nouveau, ça vient de sortir). Ce Détective Dee II montre à quel point beaucoup de réalisateurs hongkongais sont désormais trop friands de ce type d'effets dès qu'ils ont un bon budget, le résultat étant plus que perfectible. C'était déjà un petit défaut du premier Détective Dee...mais ici cela devient carrément rédhibitoire à l'appréciation de beaucoup de scènes !



Ajoutez à tous les égarements de la mise en scène des personnages manquant de profondeur (le disciple pas à l'aise avec les femmes mille fois vu, au secours), beaucoup de situations qui sentent le réchauffé (le rival de Dee qui finit par l'aider, des amoureux transis), des explications scénaristiques très tardives qui cassent le rythme (plus d'une heure pour savoir pourquoi la nana cristallise autant l'attention !... et j'en passe des meilleures...), dans un film qui ne tient pas la longueur, et vous obtenez une grosse déception.

Il reste heureusement quelques motifs de satisfaction, comme cette bataille au fond d'un gouffre, les combattants accrochés aux parois, bien filmée, originale, entretenant le suspense. Il y a aussi l'humour scato sympa (ah, quel drôle de remède tout de même), même si les scènes les plus drôles apparaissent lors du générique de fin... En dépit de l'abus de numérique, on ne peut pas nier la beauté de la grande majorité des décors et des costumes. Tsui Hark va même jusqu'à glisser de nouveau dans son récit quelques allusions sur les manipulations entreprises par le régime de l'impératrice Wu, la corruption des hauts fonctionnaires au service de l'Empire, l'injustice vécue par des populations isolées... mais l'ensemble demeure franchement gentillet et n'aura très certainement pas inquiété le régime policé actuel, là où le premier opus pouvait au contraire contenir un ton plus tranchant, notamment avec sa fin ambiguë. En bref, tout ce que cette préquelle fait, elle le fait moins bien que l'opus 1. Et de toute façon, nul besoin de comparaison pour trouver cette Légende du dragon des mers trop faiblarde.



Notons une édition DVD assez soignée, avec un making-of d'une trentaine de minutes découpé en plusieurs parties à thème (personnages masculins, décors et costumes, combats, personnages, aspects techniques).

Oscillant entre la banalité (scénario, personnages), et le surfait (mise en scène minée par une bouillie d'effets numériques), Détective Dee II se laisse regarder, mais n'a pas de charme, pas de génie. Sans vouloir jouer la carte du « c'était mieux avant », il nous fait regretter le temps des « Il était une fois en Chine », certes imparfaits au niveau du montage, mais plus attrayants, car plus « artisanaux » (quelques câbles et le talent des artistes martiaux faisaient l'affaire) ou de la rigueur extrême d'un « The Blade ». Ce n'est donc pas avec cette préquelle que Tsui Hark retrouvera les sommets de son art.

L'avis du chroniqueur
RogueAerith

Jeudi, 28 Mai 2015
11 20

commentaires

saqura

De saqura [4377 Pts], le 30 Mai 2015 à 11h23

tu a raison

Bobmorlet

De Bobmorlet [5629 Pts], le 29 Mai 2015 à 21h06

Un bon résumé du film.

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