Old Dog Vol.1 - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 18 Août 2017

En une toute petite poignée d'oeuvres,  Min-ho Choi est un artiste qui a su nous conquérir par la justesse de ses récits. Découvert en France aux éditions Akata avec l'écolo Moi, jardinier citadin et le subtil drame social Les Naufragés, l'auteur sud-coréen bénéficie également d'une belle réputation dans son pays d'origine, où il a gagné plusieurs pris et où il travaille également sur des oeuvres d'animation. Cette fois-ci, on le retrouve dans le label Asian District des éditions Kotoji, et pour l'occasion l'éditeur s'offre là sa première oeuvre venue de Corée.


Old Dog, c'est l'histoire d'un homme qui, bien des années après le décès de ses parents, revient sur les lieux où il a grandi : la ville de Séoul et ses alentours. Au fil de son parcours renaissent en lui de nombreux souvenirs, heureux ou malheureux, ainsi que certains regrets. En faisant le point, il pourra redonner une place à tout cela et se reconstruire lui-même.


On devine qu'Old Dog est à ce jour, parmi ce que l'on connaît de Min-ho Choi en France, son oeuvre la plus personnelle, car au vu des descriptions parfois très précises du passé, l'auteur a dû mettre beaucoup de lui ici. Et il le fait d'une très belle manière, à travers un récit savamment construit et brillamment illustré.


Ainsi, c'est à travers les pensées du personnage principal que nous découvrons tout. Tandis qu'il parcourt les terres où il a grandi, on suit au plus près ses pensées, présentées sobrement, mais avec force tant elles sonnent juste et l'on peut ainsi s'immiscer au plus profond de tout ce qu'il peut ressentir : les souvenirs heureux ou malheureux qui tiennent parfois à des détails, les rappels de petites joies liées à sa famille et des efforts qu'ont pu faire son père et sa mère avant qu'il ne les voie tomber peu à peu dans les affres de la vieillesse, les retours à son esprit de ce qu'il a pu vivre de bon et de moins bon avec son frère, ses profonds regrets liés à certaines choses difficiles comme la fin de vie de son père...


Tout cela, on le découvre de façon non linéaire, un peu dans le désordre parfois, selon ce qui revient en mémoire de l'homme. Un choix réaliste, dans la mesure où nous aussi, nos propres souvenirs sont rarement en ordre chronologique. Au lecteur, alors, de voir se reconstruire le parcours du personnage principal au fil des éléments qui reviennent à sa mémoire, et Choi, même s'il faut être attentif pour bien le suivre, ne nous perd jamais grâce à un procédé subtil, où il joue souvent sur une frontière un peu brouillée entre le présent et les souvenirs qui se mêlent lors des moments de transition entre les époques.


La couleur a également une importance capitale dans le récit. En premier lieu, l'artiste met à profit toute son expérience dans le domaine (que ce soit en BD ou en animation) pour offrir une colorisation subtile  venant apporter une atmosphère toute particulière à des décors souvent très réalistes à la base, car tirés de photos. Qui plus est, Choi a fait le choix malin de jouer entre les couleurs et le noir & blanc et nuance de gris/marron : le parcours du personnage dans le présent paraît presque terne de par son manque de couleurs, tandis que ses souvenirs s'avèrent souvent plus colorés. Habituellement on voit plutôt le contraire (le présent associé aux couleurs, et les flashbacks en noir & blanc), Choi inverse les choses, et cela fait sens dans la mesure où ça souligne bien l'importance qu'ont tous ces souvenirs et ce passé dans la construction de l'homme.


Au-delà de l'aspect personnel du titre où l'homme se dévoile, Old Dog est également un récit précieux concernant le portrait qu'il nous fait d'une part de la société coréenne. Porté par pas mal de notes de traduction très utiles pour mieux comprendre le contexte, le récit offre de nombreux détails sur des éléments de culture coréenne, mais aussi sur son histoire et sur son contexte social : la pauvreté, les événements étudiants qui y ont eu lieu...


Sur ce premier volume, Old Dog est un récit précieux, à la fois très dur parfois (surtout quand le personnage principal se rappelle de la fin de vie de son père, complètement affaibli et bien loin de ce qu'il a été), très beau dans son aspect personnel, et riche dans son portrait de société.


Kotoji offre une très belle édition en grand format, qui mérite facilement ses 16€ grâce à son impression en couleurs sur papier glacé. Kim Myung Yul offre une traduction très claire, et le travail d'adaptation de Koï Studio (où l'on retrouve le nom de Dominique Veret, qui a fait découvrir l'auteur en France aux éditions Akata) est très soigné.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction