Insomnia Vol.1 : Critiques

Quelques mois après la sortie de Hurlements, la collection horrifique des éditions Black box accueille un nouveau titre de Masaya Hokazono, Insomnia, et il s'agit à nouveau d'un ensemble d'histoires courtes qui, pendant deux tomes, vont voir le mangaka aborder divers thèmes devenus pour la plupart des standards du genre : fantômes, ovnis...

Dans ce premier recueil composé d'histoires allant de seulement quelques pages à une vingtaine, ce sont essentiellement les esprits et entités immatérielles qui hantent les pages, et sur ce point Hokazono parvient à délivrer des choses assez diverses : mystérieuse forme humaine visible comme une tâche sur un mur et prenant vie quand on peint sur elle avec du sang, fantômes apparaissant un peu partout en pleine nuit et semblant fixés sur leur lieu de mort, étrange créature aux allures cadavériques dont il ne vaut mieux pas croiser le regard, bande d'humains décharnés prenant pour cible les rares passants pouvant les voir pour les emmener dans leur monde, étrange silhouette non-identifiée apparaissant soudainement... Mais même si les cas sont plutôt diversifiés, le mangaka a tendance à souvent se reposer sur le fait que ces créatures ne soient visibles que par certaines personnes, ce qui finit à force par atténuer cette variété.

Dans ce tome surtout axé sur les esprits, Hokazono apporte quelques cas un peu à part, comme dans l'histoire sur les extraterrestres, mais offre aussi quelques variantes plus originales, à commencer par le récit mettant en scène une femme certes hideuse et étrange, mais cuisinant tellement bien que le héros ne peut s'empêcher de rester auprès d'elle. De même, le mangaka prend plaisir à varier les ambiances par moments, certains récits prêtant volontiers à sourire, que cela soit parce qu'une situation s'avère presque ubuesque, ou parce qu'elle est ponctuée d'une petite pointe de cynisme assez délicieuse. Sur ce dernier point, on pense évidemment au récit centré sur une inquiétante page internet, ou aux quelques histoires où Masaya Hokazono s'amuse à se mettre lui-même en scène.

Du côté des points qui pourraient rebuter quelque peu certains lecteurs, il y a le coup de crayon de l'auteur : Hokazono n'a jamais été un très grand dessinateur, et cela se ressent souvent, surtout sur ses personnages humains qui sont assez lisses et parfois inégaux côté visages. L'artiste se rattrape néanmoins sur la représentation de certaines créatures qui bénéficient d'un design soigné et peu ragoûtant (les corps décharnés de l'histoire "Propagation", la tête improbable de la cuisinière, la grosse femme difforme dans le train...), et sur une bonne gestion des événements qui fait que malgré la brièveté des récits, on est souvent satisfait. Même si cette brièveté empêche les différentes histoires d'aller loin, il faut donc reconnaître à Masaya Hokazono un certain talent pour narrer des histoires courtes.

Comme beaucoup de recueils, Insomnia est un peu inégal, mais il y a dans ce premier volume de quoi passer quelques sympathiques instants d'angoisse. C'est le genre de lecture regorgeant de ces petits récits horrifiques que l'on va adorer se raconter en soirée entre amis...