Critique de la série manga
Publiée le Vendredi, 26 Février 2016
Otoumi et Yukari se connaissent depuis le lycée, quand la petite amie d’Otoumi présenta ce dernier à son meilleur ami Yukari. Depuis, ils ont liés une forte relation d’amitié qui perdura quelques temps avant que les contraintes ne les empêchent de se voir bien souvent. Ainsi, si les deux jeunes gens sont montés en même temps sur la capitale pour leurs études ou pour travailler, ils n’ont pas vraiment le temps de se voir plus qu’une fois par mois et encore, dans les bons moments. En effet, Otoumi rédige une thèse qui lui prend beaucoup de temps surtout en ce moment où il est sur la clôture de son travail, tandis que Yukari cumule plusieurs petits boulots pour arriver à survivre et économiser. Ce qui lui rend d’ailleurs la vie compliquée, l’obligeant même à se séparer de sa petite amie par manque de temps et d’implication. Ce qui n’a pas vraiment l’air de l’affecter particulièrement ... Les deux jeunes gens vont essayer de se rapprocher un peu, s’interrogeant sur les pensées que chacun accorde à l’autre alors qu’ils sont supposés être bons amis. Qu’est ce qui les relie ainsi, pourquoi pensent-ils préférentiellement l’un à l’autre ? Et tout se complique un peu plus lorsqu’Otoumi retrouve un ancien camarade d’études dans son travail, qui lui avait déclaré sa flamme quelques années auparavant. Le jeune homme, curieux et s’interrogeant un peu trop sur ses émotions, va l’embrasser et de là, commencer à comprendre certaines choses. Le principal avantage de cette courte série en trois volumes, c’est que les chapitres donnent tour à tour la parole à Yukari puis Otoumi. Cela nous permet alors de comprendre les deux points de vue et les interrogations de chaque protagoniste.
Il est alors passionnant de voir comment le temps passe pour eux, et les rapproche très doucement, ce qui fait beaucoup plus réaliste. Dommage cependant que la chronologie soit un peu malmenée, si bien que l’on ne situe pas forcément toujours bien où l’on est ou plutôt quand l’on est par rapport au tout début de l’histoire. Au fil des rencontres, des coups de téléphone, des impulsions et des jalousies mutuelles voilà que nos deux héros se révèlent peu à peu, dans une progression somme toute logique de leurs émotions, qui évoluent naturellement vers une dimension supplémentaire après tant d’années de partage et de complicité. Beaucoup d’idées nous évoqueront des choses sans doute déjà vécues, et c’est ce qui rend le travail de l’auteur intéressant : elle s’adresse véritablement à ses lecteurs par des héros qui peuvent leur ressembler. Une ambiance douce amère qui permet de développer lentement les sentiments de chacun. La frustration et la peur d’Otoumi qu’il a de se tromper, la résolution grandissante de Yajima qui semble se comprendre de plus en plus. On est directement emportés dans un tourbillon d’émotions à la fois justes et incertaines, qui se perdent dans les doutes des personnages. On apprécie beaucoup cette atmosphère un peu tendue ou tout peut se passer sans qu’il ne se passe rien ... Et pourtant, les deux jeunes gens commencent à se découvrir physiquement. Ils échangent des sensations, des ressentis par les caresses et les baisers. Ceux-ci viennent avant l’expression pure et dure des sentiments, et même avant leur compréhension pour Yajima qui se croyait hétéro. Et ce n’est pas un mal, parce que c’est aussi comme cela que tout peut se mettre en place entre deux adultes qui se découvrent et se cherchent. La relation physique étaye et appuie la découverte de l’amour, ce qui permet une évolution en douceur
On connait déjà le trait de l’auteur par son autre œuvre sortie en France « Pure heart -Junjou », et les remarques sont globalement les mêmes. Les traits des personnages s’adaptent bien au côté plus adulte de l’histoire, puisqu’ils paraissent matures et posés, parfois d’ailleurs un peu trop et leurs expressions manquent un peu de naturel et de spontanéité. On regrette le fait que certains protagonistes (notamment féminins) se ressemblent un peu trop, mais dans l’ensemble on arrive parfaitement à retrouver qui est qui. Pas trop pointus quoique proches de la perfection, les visages et les corps adoptent de bonnes proportions et positions dans la mise en page, peu dynamique conformément au rythme du récit. Enfin, les arrières plans sont un peu négligés mais la douceur des graphismes dans leur ensemble nous fait oublier ce détail. L’édition de Taïfu est correcte, malgré quelques pages un peu transparentes du fait du manque de décor et l’habituelle déception concernant les onomatopées. Pourtant, la traduction est agréable et la page couleur tout autant. On ferme le manga avec un petit regret, tant l’histoire nous a plu et s’est améliorée de tome en tome. D’abord un peu sceptique, nous voilà conquis par le talent de l’auteur qui conclut en beauté sa série. Rien à redire, si ce n’est la frustration de ne pas en avoir plus, bien que tout se termine comme il en convient, sans nous laisser insatisfaits. Pari réussi pour l’auteur qui parvient à jouer de la sensualité pour en faire une arme au service des émotions, dans une narration juste et réaliste. Jalousie, doutes, confiance, flash-back, émotion et sexe ... Tout est là pour le plus grand plaisir des lecteurs.