Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 29 Mai 2012
Soyons clairs de suite et dans les plus brefs délais. Sherlock Holmes et le Dr Watson, tels qu’ils sont écrits dans l’œuvre originale de Sir Conan Doyle, sont fait pour faire naitre les sous-entendus et les questions. La nature même de Holmes présuppose sa bisexualité latente puisque, même s’il semble amoureux d’Irène Adler, il ne peut s’empêcher ... certaines pensées. Cela est présent partout, dans toute l’œuvre de Doyle. Sa curiosité des choses, son amour du raffinement et de l’intelligence le poussent indubitablement à vouloir s’approprier Watson, son ami. Et c’est lorsque ce dernier quittera leur amitié exclusive pour une femme qu’Holmes réalise à quel point il est jaloux de cet état de fait. A cause d’un amour non avoué, d’un sens de la possessivité très poussé ? Ce n’est pas vraiment clair, toujours est-il que ce côté ambigu fait partie du personnage original et qu’il serait ridicule de le nier. Bien, et donc ce premier tome de la version coréenne des aventures de Sherlock Holmes ne déroge pas à la règle. Sous-entendus il y a, dans quelques très rares remarques ou regards. Mais strictement rien de plus, du moins pour l’instant et il serait très surprenant d’en découvrir plus par la suite. Ce n’est que cette ambiance un peu incertaine autour d’Holmes qui est rendue ici, avec brio et la légèreté nécessaire au titre. Point donc d’exagérations mal vues ou dérivées d’un esprit un peu tordu, que nenni. Seulement une version fidèle de ces deux personnages mythiques.
L’histoire, qui en a besoin, dans les grandes lignes ? On a ici simplement besoin de savoir que l’on se situe à l’aube du mariage entre Watson et sa belle, et que l’auteur nous plonge dans une intrigue autour d’un mariage, justement. Une mariée qui disparait sans raison, voilà bien quelque chose d’étrange ... L’auteur nous entraine doucement mais sûrement vers la vérité, avec la lenteur nécessaire à un premier tome qui nous emmène ainsi doucement dans son univers. On découvre avec calme et plaisir l’ambiance crée. Tout à fait fidèle à l’époque, que ce soit par les costumes ou les décors ... Seuls quelques anachronismes se sont glissés dans le discours d’Holmes ou de Watson, histoire d’ajouter un petit humour qui marche aussi très bien quand ils partent dans un débat sur le contenu d’une bulle de narration ... Un peu d’humour qui aurait pu nous déstabiliser mais qui, bien dosé, réussit plutôt bien son œuvre. Les personnages à présent. Comme dit plus haut, Holmes est très bien rendu dans son côté ambigu et dans l’intelligence, le cynisme, l’égoïsme et la hauteur dont il fait preuve au quotidien. Mais aussi dans sa fragilité, dans sa folie manifeste qui pointe alors que personne ne la comprend. Chaque don a sa répartie, et on sent qu’Holmes pèse un fardeau au quotidien, quelque chose qui l’enchaine et le fragilise sans cesse. Watson est tout à fait dévoué, attentif et perspicace quand il le faut. En d’autres termes, nos deux héros se complètent parfaitement et recréent à merveille le duo connu et reconnu sur de très diverses adaptations.
Seul le trait pourrait influencer un lecteur néophyte à croire au yaoi, ce qui n’est encore une fois vraiment pas le cas. Evidemment, des corps longilignes et des visages expressifs tout en étant d’une finesse peu masculine ... L’esthétisme londonien masculin vu par une femme. Mais ce n’est pas pour autant choquant et désagréable, au contraire ! Nombres de supports ont toujours représentés Holmes comme un bel homme, aux traits fins et acérés. Ici il est donc très bien représenté, avec ses joues un peu creuses. Si le dessin en lui-même souffre parfois de certains défauts, notamment avec quelques parties du visage, l’ensemble est satisfaisant. Il manque de décors mais la richesse des costumes nous le fait oublier, tout comme la beauté des personnages qui sont véritablement esthétiques et facilitent la lecture. L’auteur s’amuse aussi à nous plonger jusqu’au bout dans son univers pourtant collant bien à la réalité, par des bonus ou un humour qui lui sont propres. On a hâte de voir ce que le tome deux nous réserve, surtout si l’on revient dans le passé pour approfondir les liens entre nos deux amis qui semblent se connaitre depuis toujours ... Bref, un très bon premier tome qui se place incontestablement parmi les bonnes surprises du manga coréen ...