Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 22 Août 2018
Critique 2
Grâce aux investigations d'Emma, notre trio principal sait désormais que les traceurs sont implantés dans les enfants dès leur plus jeune âge derrière l'oreille, ne laissant alors aucune trace après cicatrisation. Mais à force de réflexion, ils en déduisent aussi que ces fameux traceurs ont leur limite... Il leur faudra évidemment trouver un moyen de neutraliser ce système au moment de leur évasion, mais avant d'en arriver là ils ont encore beaucoup de choses à préparer, à commencer par l'entraînement de leurs petits frères et petites soeurs, y compris les plus jeunes, s'ils veulent que tous aient une chance de s'échapper en même temps qu'eux. C'est ainsi que, sans rien leur dire, ils entament un entraînement pour tous, sous couvert de jeu. Et plus tard encore, il leur faudra forcément révéler la cruelle vérité à leurs jeunes camarades... Mais beaucoup de questions subsistent. Peuvent-ils vraiment échapper à la vigilance de l'ambitieuse soeur Krone, qui apport des ennuis supplémentaires à ceux de Maman ? Et parmi leurs jeunes camarades, peuvent-ils vraiment se fier à tout le monde ?
Dans la première partie de ce deuxième volume de The Promised Neverland, les choses sont surtout marquées par le jeu-entraînement, dans lequel s'invite la redoutable Krone. Même si l'on sait bien que les enjeux de cette "chasse à l'enfant" ne sont pas graves dans l'immédiat, les auteurs y installent sans difficulté une certaine tension, tant ce passage donne un bon aperçu de toute la dangerosité de Krone, dont les capacités physiques sont étonnantes, voire effrayantes... sans oublier son sens de l'observation, puisqu'elle cerne vite certaines "faiblesses" de nos jeunes héros. Emma et les autres ont-ils la moindre chance face à elle ? Peuvent-ils la berner ?
A l'issue de ce passage prenant, les questions et avancées se bousculent forcément. La discordance entre Maman et Krone est visible, cela pourrait devenir un avantage pour nos héros, et dans tous les cas il faudra trouver un moyen de neutraliser les deux femmes adultes au moment de l'évasion... Les petites avancées se poursuivent alors bien en vue du grand jour de l'évasion, mais il reste beaucoup de choses à régler, et celle occupant une bonne partie du volume est d'une importance capitale: y aurait-il une taupe parmi les enfants ? Quelqu'un qui donnera sciemment à Maman des informations, et qui tiendrait nos héros à l'oeil ? Au vu du comportement de Maman, tout porte à croire que oui, et démasquer le mouchard devient alors une priorité. Et sur ce point, le scénariste joue très bien son coup en nous amenant sur quelques pistes différentes pour, au final, mieux nous surprendre. Ça fonctionne très bien, d'autant plus que ça redistribue pas mal de choses concernant les avancées pour l'évasion et, surtout, concernant un personnage en particulier (on ne dira pas qui).
Quant à la toute fin du volume, elle amène encore une nouvelle piste qui aura sans nul doute son importance pour l'avenir de nos héros. Car après l'évasion (s'ils arrivent à s'évader...), il leur faudra aussi songer à l'avance à leur survie dans un monde extérieur dont ils ne connaissent rien et qui est sûrement rempli de démons...
Dans tout ceci, la petite frustration de ce deuxième opus pourrait venir du manque de nouvelles choses sur l'univers global, que ce soit concernant la ferme ou au niveau du monde extérieur, que le scénariste, cette fois-ci, laisse plus en retrait. Mais c'est pour mieux se concentrer sur le reste, et de ce côté-là Kaiu Shirai ne déçoit pas en conservant une cohérence et un souci du détail exemplaires dans les événements. Par exemple, les petites mains tendres de Maman sur le visage des enfants prennent un tout autre sens, maintenant qu'on sait que les traceurs sont situés derrière leur oreille. Et les ambitions personnelles de Krone pour doubler Maman deviennent également un excellent facteur de tension, quand elle prend à parti Gilda. Mais ce qui reste le plus bluffant reste sûrement la faculté d'analyse et d'observation de nos trois héros surdoués, qui cherchent bel et bien à penser à tout avec minutie et cohérence. Sur ce point, c'est Norman qui attire le plus le regard, de par ses raisonnements pointus où il prend aussi garde à ne pas éveiller les soupçons. Le moindre faux pas pourrait être fatal, et de ce côté-là Kaiu Shirai fait vraiment attention à tout, tout en sachant entretenir le parfum de danger, notamment via quelques petits climax bien sentis (même si moins présents que dans le volume 1). Emma, elle, reste une héroïne attachante grâce à sa volonté et à son profond désir de sauver tous les enfants, même si cela paraît être le choix le moins rationnel. Mais à côté, le troisième visage du trio n'en finit pas d'étonner lui aussi: Ray prend une autre ampleur et, surtout, pose un nouveau problème, tant il semble opposé à l'idée de sauver tous les enfants, beaucoup d'entre eux pouvant être des boulets dans la fuite. Pour de multiples raisons que l'on va éviter de dévoiler ici, le brun de la bande apparaît plus nuancé, ni tout blanc, ni tout noir, et il a sans aucun doute encore des choses à dévoiler.
Pour porter tout ça, l'efficacité des planches de Posuka Demizu reste évidente, surtout dans la mise en scène soignée et dans le dynamisme permanent que dégagent ses personnages si souvent en mouvement. Les décors sont un peu plus en retrait, mais restent très présents, et l'artiste parvient encore à y dévoiler quelques belles idées de design.
Après la surprise du premier tome et l'installation d'un univers qui peut être très prenant et d'une aventure stimulante, ce deuxième tome n'a aucun mal à confirmer les qualités d'un récit très bien rythmé. Les personnages se développent assez, certains comme Gilda ou Don gagnent en présence, le Kaiu Shirai pense à tout dans les détails, et Posuka Demizu assure largement dans ses planches pleines de mouvements et à la mise en scène soignée.
Critique 1
Emma, Norman et Rey ont décidé de s'enfuir de l'orphelinat plutôt que d'être livré en pâture à des monstres comme du bétail. Mais ils ne partiront pas seuls et prendront leurs frères et sœurs avec eux. Pour qu'ils ne soient pas des freins lors de l'évasion, le trio organise un entraînement sous forme de grande séance de jeu du loup. C'est alors que Soeur Krone, au courant de la présence d'éléments dissidents chez les enfants, s'en mêle et va découvrir que l'élevage de Maman est bien de première qualité...
Après une introduction plus que réussie pour l’œuvre de Kaiu Shirai et Posuka Demizu, The Promised Neverland aborde le vif du sujet : la planification de l'évasion. Cette suite y va pourtant tout en douceur d'un certain point de vue : pas d'expérimentation d'évasion comme on peut trouver dans des titres tels que Prisonnier Riku, mais tout un amas de réflexions qui contribuent à un immense combat psychologique entre différents personnages. La grande partie du jeu du loup en début de volume est un excellent exemple, cette séquence brillante d'une intensité si bien qu'on ressent l'opposition entre notre trio vedette et sœur Krone, adversaire remarquablement rendu effrayant grâce au coup de crayon et à la mise en scène brillante de Posuka Demizu.
Mais le tome va beaucoup plus loin que simplement confronter les trois enfants aux gérantes de l'orphelinat. Entre trahisons, agents doubles et espions, ce deuxième volet propose son lot de rebondissements qui viennent complexifier toute cette joute psychologique entre les différentes « factions ». Il serait plus que délicat d'entrer dans les détails, The Promised Neverland étant typiquement le genre de série où toute parole un peu trop explicite dévoile un élément d'un volume, mais cette dimension nouvelle apporte une intensité qui était alors minime dans le premier opus. En plus de présenter de nouveaux personnages, cette suite nous retourne le cerveau et nous fait douter de tout le monde à tout moment. Fort heureusement pour nos nerfs, elle se termine à un moment particulièrement habile, sans nous laisser sur un trop grand cliffhanger, mais en piquant suffisamment l'intérêt du lecteur pour avoir envie de lire la suite. De toute façon, les fins de chapitres étant toujours intenses, il sera difficile pour un volume de se conclure sans que le lecteur veuille se tirer les cheveux.
Finalement, c'est l'univers global de la série que ce second tome met un peu de côté. Pas de grandes révélations sur le monde entourant l'orphelinat ni sur les fameux monstres qui dégustent les enfants comme de la viande fraîche, bien que quelques pistes soient données pour situer la place de Grace Field House dans le monde de The Promised Neverland. Mais chaque chose en son temps, ce deuxième volume étant si dense qu'on ne peut tenir rigueur aux auteurs de se concentrer avant tout sur le plan d'évasion de nos trois petites têtes blondes.
On notera que sur ce second volume, un bandeau publicitaire affiche les soutiens de Eiichirô Oda et Osamu Akimoto, deux grands mangaka de l'écurie Shônen Jump qui ont déjà vu dans la série de Kaiu Shirai et Demizu Posuka un titre incontournable... L'avenir confirmera ou non cette impression de notre côté, mais, pour l'instant, rarement une série se sera montrée aussi intense dès ses premiers volumes.