Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 08 Janvier 2025
38 mois ! C'est le temps qui s'est écoulé depuis la sortie française du 6e et antépénultième volume de Tant que nous serons ensemble, tranche de vie sensible et délicate de Yuki Akaneda abordant avec subtilité un gros tabou. La série étant désormais achevée au Japon depuis presque deux ans (le 8e et dernier opus étant sorti là-bas en février 2023, il reste difficile de savoir précisément pourquoi l'attente fut si longue, même si l'on imagine les raisons. Mais au moins, la conclusion de l'oeuvre en France est enfin là, les éditions Akata ayant eu l'excellente idée de publier simultanément les deux derniers tomes en ce tout début d'année 2025, après un report de quelques semaines puisqu'ils étaient initialement prévus en fin d'année dernière. Et puis, voila qui a de quoi entretenir l'espoir de voir un jour la suite des rares autres mangas en difficulté chez l'éditeur, comme les si délirants et excellents Mitochon Armageddon et Desperate Housecat.
Malgré la très, très longue attente de plus de trois ans, on replonge étonnamment facilement, via un septième volume à la jaquette somptueuse, dans l'histoire compliquée d'Akira et Keiichi, frère et soeur liés par des sentiments interdits et ayant tout lâché pour partir vivre ensemble là où personne ne les connaît. Peu de temps après le festival, Kei a trouvé un nouveau travail en CDI chez M. Den. Quant à Akira, elle s'apprête au contraire à quitter son emploi actuel. La jeune femme semble troublée par ce que son "prétendant" Kotaro lui a dit, comme quoi il aurait vu Kei embrasser une autre femme, et malgré sa peur de voir son frère s'éloigner d'elle elle tient le coup. Du moins, jusqu'à ce qu'une certaine rencontre brise quelque chose en elle, dans une représentation graphique symbolique très marquante. Et si, depuis tout ce temps, elle étouffait trop ce grand frère dont tout le monde dit qu'il ne sait rien faire tout seul ?
C'est en premier lieu sur la base de cette interrogation douloureuse d'Akira que, au fil de ce volume, la mangaka sonde beaucoup les tourments intérieurs de son héroïne, à travers une narration introspective qui fait souvent mouche, notamment quand certaines répliques a priori anodines lui font forcément mal au vu de l'amour tabou qui est le sien. Mais le volume est très loin de se limiter à ça puisque, même si Akira et Kei veulent tout fuir de leur passé pour vivre ensemble comme un couple, ce passé ne peut que finir par les rattraper, car ils ont bâti des liens qui ne peuvent s'effacer facilement. Bien sûr, il y a les inévitables liens familiaux, en particulier ici à travers Naomi, leur mère, à qui il arrive certaines choses difficiles, et dont on découvrira même comme, autrefois, elle a elle-même dû se confronter à ses propres parents pour mener comme elle le souhaitait sa propre vie. Mais il y a aussi tous les autres liens récents (comme Kotaro, donc on entreverra là aussi, très vite, une confrontation à ses parents) et, surtout, de longue date. Et si l'on attendra de voir ce qui attend Gô, ici c'est avant tout Tamaki qui brille, tant elle ne lâche rien pour retrouver la trace de son amie de toujours. Et dans ce tome la mettant joliment en avant, on peut vraiment dire que Tamaki est une amie en or, en souhaitant pousser Akira à arrêter de tout prendre sur elle depuis toujours sans rien dire, et surtout en ne jugeant à aucun moment sa précieuse amie.
A l'issue de ce tome, il est encore difficile de voir comment la série pourra s'achever, et c'est tant mieux. Dans l'immédiat, une chose est sûre: globalement, Yuki Akaneda continue très bien de sonder ses personnages, leurs tourments intérieurs et leurs liens, ce qui nous donne pleinement confiance pour l'issue de cette histoire délicate dans le prochain volume.