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Sunny Sunny Ann ! : Critiques

Sunny Sunny Ann

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 03 Mai 2018

Entre le retour de séries cultes (Dragon Head, Priest), oeuvres de jeunesse de mangakas déjà connus (Atomic (s)trip d'Atsushi Kaneko, puis prochainement Blue Corner de Jirô Taniguchi et Zero de Taiyô Matsumoto), et "mangas d'auteur" éloignés des standards (Une douce odeur de café), la collection Graphic de Pika Edition continue de se développer joliment, autour d'oeuvres qui méritent toute notre attention. Et en ce début de mois, mai, la collection accueille un morceau de choix: le one-shot Sunny Sunny Ann!, publié au Japon en 2012 dans le magazine Morning des éditions Kôdansha, et qui a valu à sa jeune autrice (elle est née en 1986) Miki Yamamoto de remporter en 2013 le prestigieux Prix culturel Osamu Tezuka dans la catégorie "Jeune auteur". Avant ça, l'artiste avait déjà signé en 2011 le récit muet Bakudan ni Ribon, sa toute première oeuvre, qui lui avait valu plusieurs éloges dont celles du réalisateur Shunji Iwai, mais c'est bien Sunny Sunny Ann! qui lui a permis de connaître une certaine notoriété.


Sunny Sunny Ann!, c'est l'histoire d'Ann, une femme qui, au coeur des Etats-Unis, est aussi libre que le vent. Sa seule maison, c'est sa voiture, ce qui lui permet de voguer sur les routes comme elle le veut, et d'éviter de rester constamment fixée en un même lieu, elle qui ne supporte pas de voir trop longtemps le même paysage. Ainsi, elle n'a pas besoin de beaucoup d'argent pour vivre, et quand elle est à la dèche il lui suffit de s'improviser fille de joie.


Ici, on suit tout simplement Ann dans une sorte de "road trip" où l'on ressent constamment son indépendance et sa liberté. Ann préfère vivre dans sa voiture plutôt que dans une maison, elle évite les attaches et les conforts modernes étriqués (qui ne l'intéressent) afin de pouvoir aller où elle veut quand elle veut, elle aime plus que tout profiter d'un bon verre de vin appuyée contre le capot de sa caisse au milieu de nulle part... Et ne lui parlez pas de finir sa vie dans un cercueil, une petite boîte étroite: elle préfèrerait mille fois plus crever dans un coin en pleine nature et que son cadavre soit bouffé par des bêtes.


Ann a bien conscience de ne pas forcément être "quelqu'un de bien", ou en tout cas d'être quelqu'un qui ne rentre pas dans le moule de ce que la société juge bien. Et certains de ses actes pourront en effet apparaître répréhensibles, mais une chose est sûre: elle est totalement libre et ne se laisse pas faire, même quand sa manière de vivre lui amène des "contrecoups": ses meurs où elle couche avec certains hommes pour de l'argent lui valent d'être violée par deux jeunes, mais pas question pour elle de les laisser impunis, et sa revanche sera on ne peut plus radicale. C'est simple: si on tente de la "manipuler" (notamment des hommes, dont elle a appris à se méfier), elle répond, et si on s'en prend à elle, elle contre-attaque. Mais cela ne veut aucunement dire qu'elle n'accorde aucune importance aux autres, elle le prouvera au fil de ses différentes rencontres sur les routes, en redonnant le moral à un enfant avec la chanson Obladi Oblada des Beatles, en épaulant une jeune mariée mal vue par sa belle-famille, ou encore en accompagnant une fillette délaissée par sa mère et venant d'apprendre que son papa n'est pas son papa. Des événements qui sont aussi l'occasion pour Yamamoto d'exploiter de brèves visions un peu plus critiques du monde. Difficile de ne pas penser à un film comme Thelma et Louise à la lecture de ce récit d'émancipation.


Pour accompagner le tout, Yamamoto livre des planches savoureuses de par le sentiment de liberté qu'elles transmettent. Le trait non-conformiste, assez épais et jouant beaucoup sur les contours des corps et sur les perspectives a quelque chose de très voluptueux et libéré des contraintes, à l'image de l'héroïne. Les mouvements de la robe d'Ann au vent, ainsi que les assez nombreuses vues de dessus, font partie des éléments renforçant l'impression de liberté.


Servi dans une très bonne édition assez typique de la collection Graphic (mention spéciale à la traduction d'Aurélien Estager, très crédible dans le parler) Sunny Sunny Ann! est un excellent portrait de femme libre et de caractère, à ranger précieusement aux côtés de mangas d'autrices comme Kyôko Okazaki entre autres.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs