Stop Hibari Kun Vol.1 - Actualité manga
Stop Hibari Kun Vol.1 - Manga

Stop Hibari Kun Vol.1 : Critiques

Stop !! Hibari Kun

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 07 Décembre 2018

Le nom de Hisashi Eguchi ne vous est peut-être pas inconnu, et ce serait normal. Jusqu'à présent surtout connu en France pour avoir conçu le character design du film Roujin Z, cet artiste un peu touche-à-tout, qui a aujourd'hui la soixantaine, est avant tout un mangaka de renom... mais dont les mangas furent, jusqu'à cette année, inédits dans notre pays, malgré la présence d'une niche de fans assez solide. Hé bien, ce manque assez important dans le paysage manga français est désormais réparé grâce au Lézard Noir, qui a décidé de publier l'un de ses plus importants succès ! Stop!! Hibari-kun! est une série qui fut initialement publiée au Japon de 1981 à fin 1983 dans le célèbre magazine Shônen Jump de Shûeisha avant d'être compilée en 4 tomes reliés. L'oeuvre a souvent été rééditée au Japon, et l'édition française, se calque sur l'une de ces rééditions: celle en 3 tomes sortie par Shôgakukan creative en 2009-2010.

En mettant en avant certains thèmes (comme le travestissement) de manière plus réaliste qu'auparavant, sous une patte visuelle moderne et assez pop pour l'époque (et qui, disons-le, a très bien vieilli), et avec un personnage central très séduisant, la série a marqué pas mal d'auteurs (comme Hiroyuki Asada, qui revendique beaucoup l'influence d'Eguchi) mais aussi de lecteurs (en suscitant même une vague de travestissements), et a intéressé certains psychologues. Elle a connu de mai 1983 à janvier 1984 une adaptation animée de 35 épisodes qui a contribué à faire sa renommée. Son personnage central, le travesti Hibari, garçon s'habillant en fille, fut même, à l'époque de la publication du manga, un personnage féminin extrêmement apprécié des lectrices japonaise, quand bien même la série fut publiée dans un magazine pour garçons. La raison ? Sans doute la manière qu'a Hibari de s'assumer, de savoir charmer tout en montrant du caractère et même beaucoup de force physique et intellectuelle.

Stop!! Hibari-kun!, c'est donc l'histoire de Kôsaku Sakamoto, un lycéen qui, conformément aux dernières volontés de sa mère qui vient de mourir, quitte sa campagne pour aller vivre chez Ibari Ôzora, un homme qu'elle a bien connue dans sa jeunesse. Une fois sur place, l'adolescent n'est pas au bout de ses surprises en découvrant que l'homme chez qui il va désormais habiter est le dirigeant d'un clan yakuza ! Qui plus est, en dehors des différents sbires, Ôzora possède 4 ravissantes filles... 4 ? Pas tout à fait. Car Hibari, qui a le même âge que notre héros, est en réalité un garçon ayant l'habitude de s'habiller en fille et de se faire passer pour l'une d'elles ! Hibari est censé être l'unique fils héritier du clan, mais il ne fait que désoler et tourner en bourrique son père. C'est le début d'une nouvelle vie mouvementée pour Kôsaku, d'autant plus que Hibari semble parfois avoir le béguin pour lui au point de beaucoup le coller.

Dès les premières pages qui offrent différents petits gags décalés et savoureux, Eguchi semble nous plonger dans une comédie à succès typique de son époque, à l'instar d'un Kimengumi par exemple Tout au long de ce premier volume de 270 pages, l'auteur va installer autour des principaux personnages une palette de visages secondaires hauts en couleurs, comme les sbires pas très malins du clan, Tatsu le spartiate et sa tête de poisson, la prof principale Hiromi Iwasaki qui s'invente des histoires, la peste Kaori Hanazono qui déteste Hibari, ou encore les membres du club de boxe comme Kaji ou le vieil entraîneur qui sont un peu fumés. Pouvant compter sur ces différents personnages bien campés dans leur genre, Eguchi a tout le loisir d'offrir pas mal de moments d'humour grâce à leurs personnalités parfois loufoques ou aux relations qu'ils entretiennent. Relations pouvant aller de la rivalité jusqu'à l'amour, et permettant de nombreuses interactions réussies, que ce soit au lycée, à la maison ou ailleurs.

L'auteur délivre alors un délicieux cocktail où il même des ingrédients de comédie romantique, de tranche de vie et d'humour farfelu... mais où l'ingrédient le plus épicé reste le personnage-phare, Hibari, qui perce les pages à chaque fois. Rendant fou son père qui le traite de tous les noms et en fait des attaques, faisant croire à tout le monde au lycée qu'il est bel et bien une fille (personne, sauf Kôsaku et la famille, ne sait que c'est un garçon), montrant un tel charme qu'il est même la fille la plus populaire et adorée de l'établissement scolaire, ne se laissant jamais démonter, étant doué en tout (y compris pour donner des coups de poing si besoin), taquinant Kôsaku avec malice, Hibari est un mix captivant de beauté, de charme, de force, qui brise à sa manière toutes les étiquettes, et qui séduit facilement. Fille ou garçon, on s'en fiche un peu: le personnage emmène tout le monde dans son sillage, et on comprend facilement ce qui en a fait une figure si populaire à l'époque de la publication japonaise du manga.

On appréciera également la manière dont l'auteur joue sur différents clichés et des petites parodies des récits masculins de l'époque, en reprenant à sa manière de bons vieux éléments du genre comme les yakuzas et la boxe, des choses censées être très viriles et qu'il tourne gentiment en dérision. les clins d'oeil, par exemple à Ashita no Joe ou à Masami Kurumada, sont assez nombreux. Enfin, on se régale en observant la manière dont, à plus d'une reprise, les personnages masculins, souvent un peu lourdauds ou bêtes, n'en mènent pas large face aux féminins, on pense bien sûr à Hibari, mais aussi par exemple à la petite Suzume qui, du haut de ses 10 ans, va montrer un sacré caractère à un moment.

En plus d'être parmi les premières séries d'Eguchi, l'oeuvre a été conçue au début des années 1980. Visuellement, ça se ressent donc: dans les designs des personnages, on a quelque chose d'assez ancré dans son époque. Mais l'ensemble a très, très bien vieilli, et on y voit le dessinateur poser des bases de son style qui. Un trait fin, une grande application pour offrir du charme aux personnages féminins et en particulier à Hibari qui séduit constamment, des influences pop art qui pointent le bout de leur nez jusqu'à devenir dans les années suivantes une marque de fabrique du mangaka. Au final, c'est assez intemporel et très agréable.

Avoir la chance d'enfin découvrir en français cette série assez importante et cet artiste excellent, c'est donc une aubaine, d'autant plus que Le Lézard Noir offre une très belle édition, sans jaquette, en grand format, avec un papier souple et sans transparence et une excellente traduction d'Aurélien Estager qui s'avère bien inspiré. On appréciera aussi la préface qui fait office d'excellente présentation, les assez nombreuses pages en couleur et en bichromie, et les différents petits bonus disséminés par l'auteur entre les chapitres.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs