Star Wars - Etoiles Perdues Vol.1 - Manga

Star Wars - Etoiles Perdues Vol.1 : Critiques

Star Wars - Lost Stars

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 03 Mai 2022

Les mangas Star Wars n'ont pas forcément bonne presse. Ou plutôt, il serait plus juste de dire qu'ils sont globalement tombés dans l'oubli, quand bien même certains maîtres du manga de SF comme Kia Asamiya se trouvaient aux commandes. Adaptation surtout les premiers films, ceux-ci nous furent proposés aux éditions Delcourt et ravirent un petit cercle de lecteurs, avant d'être globalement oubliés.

Par la suite, Star Wars n'a eu droit qu'à peu de manga, jusqu'à assez récemment puisque Disney exploite davantage le filon côté pop-culture japonaise depuis une poignée d'années seulement. De notre côté, on attendait ces parutions chez nous, et c'est par le biais des éditions nobi nobi! que celles-ci nous parviennent. C'est donc le 4 mai, soit le jour dédié à Star Wars, que deux premières séries nous sont proposées, dont Etoiles Perdues.

A l'origine du titre, il y a le roman de Claudia Gray, paru en 2015 au moment de l'émergence de la postlogie de la saga cinématographique. Autrice de fantasy et de SF, l'écrivaine se dédie énormément à Star Wars ces dernières années, celle-ci ayant notamment signé le roman Leia : Princesse d'Alderaan en 2017 (qui a aussi fait l'objet d'une adaptation manga qu'on attend avec hâte) et s'occupe actuellement de romans en liens avec la Haute République, une ère se déroulant avant le prélogie et que Disney nourrit avec passion ces derniers temps.
Le manga tiré du roman Etoiles Perdues a vu le jour au Japon en 2017 sur l'application de lecture LINE, avant d'être compilé en trois volumes. L'adaptation est signée Yûsaku Komiyama, une mangaka qui n'a qu'une poignée d'œuvres à son actif mais qui semble impliquée dans les déclinaisons de licences appartenant à Disney, puisqu'elle signa le manga Avengers : Zombie Assemble en 2015, et participa à une anthologie dédiée à Star Wars en 2019.

Etoiles Perdues prend place durant la trilogie originale, pendant le conflit opposant l'Empire galactique à l'Alliance rebelle. Durant leur enfance, Thane Kyrell et Ciena Ree appartenaient à deux clans opposés, l'un pauvre et l'autre issu de la noblesse, se partageant sans plaisir aucun la planète Jelucan. L'avènement de l'Empire a néanmoins permis un partage plus juste des lieux, et c'est dans leurs rêves de contribuer à ce monde égalitaire que tout deux se sont engagés dans les rangs de l'Empire, quitte à subir la difficile formation permettant d'accéder aux hauts grades. Mais, des années plus tard, Thane a déserté son camp pour rejoindre les rebels. Convaincu de l'injustice que fait régner l'Empereur Palpatine, il aspire à une victoire de la Liberté, mais aussi à sauver Ciena qui demeure dans les rangs de l'ennemi.

Le manga tiré du roman de Claudia Gray part d'une idée particulièrement simple, jonglage entre drame et récit de guerre : Dans un conflit d'envergure, deux amis d'enfance se trouvent dans des camps opposés. La mécanique n'a rien de novateur mais, couplée à l'univers Star Wars, celle-ci peut tout à fait gagner en légitimité. Aussi, l'intelligence de ce récit est de ne pas se cantonner à cette relation sur son plan dramatique mais l'explorer à travers l'histoire créer par Georges Lucas. Plus qu'être amis d'enfance, Thane et Ciena ont grandi sur une planète divisée entre deux générations de colon, une vraie lutte des classes que l'Empire Galactique a résolu lors de son avénement. De fil en aiguille, la rivalité s'installe entre deux compères résolus à briller dans leur dévouement à l'armée impériale, un monde en apparence idyllique qui va vite montrer ses facettes les plus sombres, jusqu'à convaincre l'un des deux de rejoindre les forces rebelles.

Si le récit débute lors des événements de L'Empire contre-attaque, à savoir l'offensive de l'Empire sur la base rebelle de la planète Hoth, celui-ci dévie répidement jusqu'à développer tout un flashback narrant la jeunesse des deux protagonistes et leurs premiers pas dans les rang des forces impériales. De l'alchimie forte entre eux jusqu'aux tensions qui s'installeront, le lecteur assiste à cette montée de ce drame humain au même titre que certains personnages découvrent la vraie nature du camp auquel ils ont voué allégeance. C'est là qu'entre en jeu l'une des audaces de cette histoire, celle de nuancer un poil l'Empire et de montrer quelques uns des bienfaits apportés à la galaxie, avant d'être rééquilibré en rappelant le climat de terreur perpétré par le camp de l'Empereur Palpatine. C'est audacieux tout en restant juste et en n'éclipsant jamais l'intrigue centrale, tout en prenant en légitimité selon les connaissances du lecteur en termes de Star Wars. Reste que découvrir un Grand Moff Tarkin aux airs doux et paternalistes surprendra, tant cela tranche avec l'aura qu'il dégage dans Un Nouvel Espoir.
Le piège de ce premier tome sera donc de n'être qu'un récit quelconque pour quelqu'un qui s'en servirait de porte d'entrée vers l'univers, là où un lecteur ayant vu au moins les 6 premiers films appréciera les quelques nuances faites.

Les débuts d'Etoiles Perdues, derrière une idée de base on ne peut plus classiques, se tiennent largement et promettent deux prochains opus prenants par leurs enjeux humains. L'autre piège évité par l'œuvre vient aussi de son focus sur les deux personnages principaux, tandis que les héros de la saga Skywalker ne font qu'office de caméo. On s'amusera, d'ailleurs, de certains choix graphiques pour les représenter (ce bon vieux Han ayant physiquement rajeuni de quinze années sous le trait de Yusaku Komiyama), tandis que la présentation de certaines scènes cultes sous un autre point de vue créera une dose très maîtrisée de fan-service. Est-ce que, par la suite, Luke, Leia et Han trouveront une place plus forte dans cette aventure ? Rien d'impossible, mais la manœuvre serait risquée puisqu'en parallèle de ces événements sont censés avoir lieu ceux du cinquième épisode cinéma.

Et parce que Star Wars n'a pas été adapté en manga si souvent que ça, il convient de s'intéresser à l'esthétique proposée par la mangaka. L'artiste a un style plutôt expressif et passe-partout qui sied bien à l'univers. Elle montre une certaine aisance lors des quelques moments d'action, là où le long récit de Thane et Ciena profite plutôt d'une narration épurée. Et visuellement, l'autrice a bien saisi les architectures qui façonnent l'univers, aussi elle retranscrit avec justesse les différents lieux, que ce soit l'intérieur de l'Etoile de la mort où l'académie impériale de Coruscant qui nous renvoie très bien aux environnements de la prélogies. Le manga n'a pas été confié à n'importe qui, Yusaku Komiyama s'imprégnant des esthétiques de la saga, et ça se ressent.

Côté édition, nobi nobi! nous livre une bien jolie copie, via un beau pavé au format page mais à la couverture ravissante par son papier mate ou sa jolie dorure à chaud. Confiée au studio Makma, assez spécialiste des licences de pop-culture américaine, l'adaptation graphique est totalement dans les codes de Star Wars, donnant bien la sensation que le manga fait partie intégrante de cet univers, plus qu'il ne soit qu'un simple produit dérivé. Anne-Sophie Thévenon livre, de son côté, une traduction de très bonne facture, montrant aussi sa petite maîtrise de l'univers, de ses codes et de ses tons.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
15 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs