Sous un ciel nouveau - Actualité manga
Sous un ciel nouveau - Manga

Sous un ciel nouveau : Critiques

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 13 Avril 2018

Après la collection Kids avec Momo et le messager du Soleil, c'est la collection Latitudes qui accueille la deuxième création originale Ki-oon de 2018 avec le recueil Sous un ciel nouveau.


A la base, tout, y compris la collaboration entre Kei Fujii (scénario) et Cocoro Hirai (dessin), est né du premier chapitre de l'histoire qui offre son nom au recueil. En 2007, sa publication sur internet fut un vrai phénomène au Japon avec plus d'un million de vues en 4 jours, si bien qu'un éditeur professionnel, Mag Garden, a proposé aux 2 auteurs d'en tirer un ouvrage dès 2008, ouvrage pour lequel le 2ème chapitre de Sous un ciel nouveau a été écrit. Puis le recueil a fait partie en 2017 de la sélection du prix Japan Media Arts Festival, et a été repéré par Ki-oon. Notons que l'édition française proposée par Ki-oon diffère largement de l'édition japonaise sortie par Mag Garden en 2008: seuls les chapitres 1 et 2, soit l'ensemble de l'histoire originelle de Sous un ciel nouveau, sont identiques.


Au programme, 4 récits, dont 3 en un chapitre, l'exception étant, comme vous l'avez déjà compris, Sous un ciel nouveau, qui s'étire sur 3 chapitres: les 2 chapitres initiaux qui ouvrent le recueil, puis un 3ème chapitre qui le referme et qui fut conçu quelque temps plus tard.


Dans l'histoire donnant son nom au livre (plus de 120 pages en additionnant les 3 chapitres), on suit la vie bouleversée d'un couple de personnes âgées. Tous deux ont toujours habité en province, lui a été marin pendant des décennies et passe encore du temps sur les mers à bord de son bateau malgré la retraite, et elle continue de tenir son petit café. Tous deux sont grands-parents, mais ont rarement l'occasion de voir leur fils, leur belle-fille et leurs deux petits-enfants, vivant à Tokyo... du moins, jusqu'à ce qu'un terrible accident survienne en emportant la vie du fils Ryûta et de son épouse, laissant alors les deux petits-enfants sans parents. En plus de s'occuper des deux enfants, le couple âgé, au-delà de la tristesse du deuil, décidé de respecter l'ultime volonté de leur fils: reprendre la gestion de son café-restaurant tokyoïte. Laissant derrière eux leurs racines, leur campagne où ils ont toujours vécu, les voici dans la capitale, tentant de garder à flot ce petit resto à la clientèle fidèle.


Dans l'histoire "le gant de base-ball de maman" (20 pages), on suit les tourments de Naoto, un petit garçon dont le père n'est plus là, et qui ne peut alors pas s'entraîner comme il se doit au base-ball qu'il aime tant. Sa mère, qui l'élève seule et lui demande forcément certains sacrifices, sent bien qu'il envie les autres enfants. Que pourra-t-elle faire pour adoucir la solitude de son enfant ?


Dans "Un bel enfant" (une grosse trentaine de pages), on suit Yayoi, une jeune femme ni laide ni jolie, écumant les agences matrimoniales sans succès... jusqu'au jour où elle pense avoir rencontré le bon homme. Il l’a abordée à la bibliothèque, parâit charmant, gentil, élégant... Elle en tombe sincèrement amoureuse. Mais son "prince charmant" et futur mari pourrait bien cacher certaines choses... Profite-t-il d'elle ?


Enfin, dans "La dernière leçon" (là aussi, une grosse trentaine de pages), on assiste aux ultimes exploits sportifs de deux amis d'enfance, Ito et Abe. Alors qu'ils sont tous deux à la croisée des chemins dans leur carrière de sportifs, ils se remémorent un passage précis de leur enfance, qu'ils avaient un peu oublié: un cours d’Histoire marquant et étonnant, qui avait pour but de leur inculquer une chose précise : la vie est courte et passe très vite... surtout à l'échelle de l'Histoire de la planète !


Les différents récits écrits par Kei Fujii ont tous une vocation réaliste et humaine, et à ce titre ils sont tous portés par la patte impeccable de la dessinatrice Cocoro Hirai. Celle-ci livre des planches souvent assez denses, qui brillent avant tout pour le design réaliste très abouti des personnages. Ceux-ci ont une réelle profondeur quel que soit l'angle de vue, possèdent un important sens du détail quand nécessaires (par exemple, le travail sur les rides du couple âge de la première histoire est excellent), sont expressifs sans en faire trop... De même, il y a un grand soin dans les décors, tout aussi réalistes, et dans la plupart des angles de vue qui s'avèrent assez diversifiés et sont rarement choisis au hasard. Hirai n'a pas un trait typé "manga classique": elle avoue lire très peu de mangas classiques, revendique son profond attrait pour Katsuhiro Otomo et pour la BD franco-belge (notamment Blacksad), et ça se ressent assez.


Les récits, eux, sont des moments de vie tous marqués par une chose: ils montrent les personnages à un moment où leur vie bascule, où ils prennent une décision très importante, se transforment, changent, et Kei Fujii avoue que c'est quelque chose qui lui tenait à coeur. A chaque histoire on voit qu'il n'y a pas d'âge pour que notre vie bascule, et qu'elle peut basculer de bien des manières. Mais tous les personnages cherchent à rester fort et à avancer, dans une atmosphère toujours crédible, naturellement sensible sans avoir de jouer sur de grosses ficelles, car tout simplement humaine. Ces histoires savent être poignantes sans être larmoyantes, il y a une certaine retenue même dans certains moments particulièrement tragiques, tout comme il y a de réels espoirs dans les avancées des personnages. Le coté positif se ressent aussi dans la façon qu'à Fujii de rapprocher les gens : par exemple les provinciaux et les Tokyoïtes, les personnes âgées et les gens plus jeunes... Bien sûr, ça se voit aussi via l'amour familial ou l'amitié des personnages. L'auteur, sans doute pour renforcer le réalisme, aime aussi jouer sur un petit portrait de la société moderne : concurrence de l'autre restaurant dans la 1ère histoire où le patron a peu de scrupules pour faire grimper son entreprise, problèmes financiers liés aux frais d'hôpitaux, et des choses plus personnelles comme la vieillesse, la maladie, la mort, les familles monoparentales, les considérations autour du mariage.


Sous un ciel nouveau est un très beau recueil, qui vaut assurément le coup pour les amateurs de moments de vie réalistes et assez humains.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs