Chitose : Critiques

Sans être parmi les auteurs de hentai les plus prolifiques, Seto Yuki est un mangaka dont la carrière dans ce registre dure depuis le début des années 2000, et qui a su se bâtir une belle réputation, que ce soit grâce à son dessin très soigné ou aux adaptations animées ayant affirmé la renommée de plusieurs de ses oeuvres: Stringendo, Accelerando, Stretta, Allargando...Il a pourtant fallu attendre longtemps pour découvrir cet artiste en langue française, via la publication par Hot Manga d'Allargando en février 2022. Et plus de trois ans et demi plus tard, l'éditeur a, pour notre plus grand plaisir, remis le couvert en sortant, à la toute fin du mois dernier, un autre ouvrage du maître !

Récit complet de plus de 200 pages, se composant de cinq chapitres, d'un épilogue et de deux petits bonus intégralement en couleurs, Chitose est parmi les travaux les plus récents de l'auteur: sorti au Japon en 2022 chez l'éditeur ti-net, il a initialement été prépublié là-bas dans le magazine Comic Mugen Tensei à partir de 2019.

Cette histoire nous immisce auprès de Keisuke Hori, un étudiant qui, depuis désormais longtemps, est éperdument amoureux de sa meilleure amie Chitose Nishina, dont il est quasiment inséparable depuis l'époque du collège. Ces deux-là sont très complices, se connaissent par coeur, si bien que Keisuke n'envisagerait jamais de vivre éloigné de sa bien-aimée, et que c'est même pour rester au plus près de celle-ci qu'il a intégré la même université qu'elle. Désormais, il guette timidement le bon moment pour enfin lui déclarer sa flamme, en espérant une réponse positive de la candide jeune femme. Mais quand ces deux-là intègrent le club d'art de la fac, tout risque de basculer: ils y font la connaissance de deux seuls autres membres, à savoir la ravissante et élégante Mika Hayashi, qui est dans leur classe, et son petit frère Takayuki, plus brut de décoffrage. Rapidement, Takayuki avoue à Keisuke que Chitose lui plaît bien, ce à quoi Keisuke ne rétorque rien, sa timidité le poussant à feindre l'indifférence à l'égard de son amie d'enfance. Hélas pour lui, suite à cela, il risque bien de voir lui échapper son amour de toujours... mais aussi, peut-être, d'en trouver un autre, plus coquin et charnel, en la personne de Mika qui, en tant que seule membre du quatuor déjà expérimentée en matière de sexe, va rapidement emmener ses trois camarades dans une avalanche de plaisirs où ils ont tout à découvrir...

Netorare sans en être vraiment un puisque Keisuke et Chitose ne sortent pas ensemble, ce manga voit surtout Seto Yuki jouer sur un parfum de découverte du sexe toujours plus prononcé, où chacun des quatre personnages s'abandonnent de plus en plus en cédant au pur plaisir de l'acte. Evidemment, il y a souvent une part d'immoralité sous-jacente dans cette situation: Keisuke finit vite par cocher avec l'irrésistible Mika alors qu'il en aime une autre, les ébats des personnages peuvent avoir lieu dans l'enceinte de la fac, les soeur et frère Hayashi n'ont pas de pudeur quand il s'agit de faire l'amour dans une même pièce voire de s'envoyer des photos pendant l'acte... Mais ce côté un peu immoral est vraiment là pour rendre les situation encore plus excitantes, et l'auteur s'applique à ne pas franchir certaines limites: il n'y a pas d'inceste, les relations sont consenties... mieux encore, Seto Yuki s'applique à rappeler l'essentialité de certaines choses comme le port de préservatifs et la pilule du lendemain en cas de dérapage, pour un résultat où la quête toujours plus intense de plaisir n'empêche donc pas le plus grand respect du/de la partenaire.

C'est donc dans une atmosphère de complicité totale et légèrement sulfureuse que l'on suit les ébats intimes de ces personnages, au travers d'un travail graphique de grande qualité, comme on pouvait s'y attendre de la part de cet auteur. Au-delà du côté bien membré des deux garçons et du charme fou des deux filles qui ont chacune leurs propres caractéristiques, Seto Yuki offre des designs intenses jusque dans les expressions faciales où la timidité et le plaisir contenu laissent de mieux en mieux place à un plaisir bien plus expressif. Et au fil de mises en scène très soignées, l'artiste sait tour à tour très bien mettre en évidence la beauté de ses héroïne, entre une Chitose aux formes généreuses sans être trop exagérées et aux expressions faciales douce, et une Mika craquante à souhait avec ses airs coquins, ses lunettes et sa silhouette plus fine. Les scènes de jouissance sont également bien travaillées en se faisant le symbole du plaisir mutuel pris par tous les personnages, puisque les orgasmes féminins sont autant mis en avant que les masculins.

Servi dans une édition très satisfaisante (présence de huit pages en couleurs sur papier glacé, bonne qualité de papier et d'impression, traduction efficace de Gwendoline Couturier, lettrage assez propre de Florian Morala, onomatopées qui ont bien été sous-titrées...), Chitose est donc un très bon cru hentai de cette fin d'année. Même si c'est logique vu que l'oeuvre porte son nom, peut-être regrettera-t-on juste un peu le fait que le récit finisse par se focaliser majoritairement sur Chitose, alors que Mika n'a absolument rien à lui envier en matière de charme, si bien que l'on n'aurait rien contre une suite. Mais l'essentiel est très largement et très bien accompli, et donne follement envie de voir d'autres oeuvres de l'auteur franchir enfin nos frontières.