Saturn Return Vol.10 : Critiques

Au fil d'un neuvième et avant-dernier volume d'une intensité et d'une richesse remarquables, en plus d'avoir encore confirmé la brillante construction scénaristique de l'oeuvre, le plus gros de l'affaire autour du défunt Aoi et de Ritsuko Kaji a enfin été levé en révélant avant tout l'instabilité et la détresse de l'écrivaine, dont le plagiat ne fait plus aucune doute et qui s'était enfermée dans une spirale de mensonges. Alors qu'un an est désormais passé depuis la mort d'Aoi, et que six mois se sont écoulés depuis que la romancière plagiaire a quitté l'hôpital, cette dernière purge actuellement une peine de prison ferme d'un an pour vol,en laissant son éditeur Koide un peu perdu: il a beau avoir encore envie de tirer les vers du nez à Ritsuko qui semble encore renfermer en elle certaines choses, il se laisse aller depuis que sa folle et mouvementée enquête s'est achevée, vivote en se cachant derrière madame Akiba, et cela pourrait à la fois lui nuire dans son travail et dans sa relation avec Maki qui affirme qu'elle a besoin de plus de piment dans sa vie...

Fort logiquement, dans ce dixième et ultime opus, Akane Torikai place alors, avant tout, ses personnages face à une question essentielle: que doivent-ils faire, à présent, pour réussir à tourner la page face au souvenir d'Aoi et à tout ce qui s'est passé ces derniers mois ? Bien sûr, si Ritsuko et Koide restent centraux ici (que fera-t-elle une fois sortie de prison, et trouvera-t-il comment sortir de sa torpeur ? ), la mangaka est très loin de se limiter à ces deux-là: Emi, Saho, Michiru... Bien d'autres figures ont aussi leurs tourments à franchir, leur deuil à faire. Et bien souvent,ceci ne peut avoir lieu qu'avec l'aide du temps qui passe, comme nous le montreront ces 170 dernières pages se déroulant sur une assez longue période.

Avec ses qualités d'écriture habituelles, Torikai sonde plutôt bien (même si c'est rapide dans certains cas) les facettes de ses personnages jusqu'au bout, esquisse soigneusement les changements à-même de s'opérer en eux, tout en restant réaliste car il va de soi que rien ne peut changer si facilement. Cette constatation nous amenant petit à petit jusqu'à une conclusion assez douce-amère, pas foncièrement pessimiste mais également très loin d'être enjolivée et ayant sa part de cynisme, ce qui en somme est parfaitement dans le ton de l'oeuvre.

Et bien sûr, au fil de ce tome, Torikai continue de questionner sur beaucoup de sujets ayant animé sa série: les mensonges, les faux-semblants, le mariage, la rédemption, le pardon, les rapports hommes-femmes, la société du travail, l'existence, et évidemment le statut d'auteur et le rôle des histoires. On sent vraiment que la mangaka a mis beaucoup d'elle-même dans cette série majeure de sa carrière, et cela contribue beaucoup à rendre, jusque dans les derniers instants, Saturn Return très crédible, fort et pertinent.