Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 27 Février 2025
La rédaction de Vibes est en pleine ébullition avec l’arrivée d’un nouveau rédacteur en chef, Kyoichi Aikawa. Ancien de la revue, qui s’est forgé le mérité d’avoir redressé à lui seul le magazine shônen Bump de l’éditeur, ce dernier assure son retour d’une main de fer et projette la future ascension de Vibes avec le retour de la publication des Pivs et la nouvelle série de Takemi, mangaka qui a justement fait le succès de Bump. Mais tandis qu’un retour aussi hâtif de Nakata ne semble pas faire l’unanimité, Kokoro va faire face à un certain mur avec le mangaka Takemi, qui semble n’avoir d’oreille que pour le directeur éditorial…
Si la majeure partie des volumes de Réimp’ ! se construisent autour de différentes histoires qui mettent en exergue les nombreuses facettes du monde de l’édition (et, plus globalement, du livre), ce quinzième opus de la série se consacre à une seule même intrigue liée au changement de directeur éditorial du magazine Vibes. Autre fait surprenant : il est assez inédit de voir un personnage clairement défini comme mauvais, voire comme un antagoniste ! Certes, Yasui a déjà fait figure d’opposition à Kokoro de par sa vision axée sur la réussite plus que sur l’art, mais il proposait des nuances qui ne sont pas si évidentes chez Aikawa, ce nouveau personnage qui s’attire très rapidement notre mépris et qui met l’héroïne face à une situation inédite.
Il y a donc une forme de tension tout le long du volume, avec comme enjeu central la nouvelle série que doit proposer Takemi, nouveau personnage mangaka de la série, en collaboration avec Kokoro et sous la supervision (ou devrait-on dire la "manipulation") du nouveau directeur éditorial. C’est un ton inédit, mais qui rend un volume plus intense que de coutume, le lecteur ayant surtout l’envie de voir les manigances d’Aikawa se résoudre plus que découvrir l’envers du décor. Pourtant, malgré un scénario plus dramatique que d’habitude, Naoko Mazda continue de dresser le portrait du monde éditorial du manga au sens large, en se recentrant ici sur la rédaction de Vibes, en s’intéressant à plusieurs directions possibles de magazines, en se questionnant sur l’équilibre que doit entretenir une revue entre ses visions mercantiles et artistiques, le tout en décortiquant l’état d’esprit d’un mangaka à succès dans le shônen, mais qui peine à calibrer son art pour un lectorat différent. Loin d’une banale confrontation face à un éditeur que l’on peut juger mauvais, ce quinzième tome propose une histoire d’une grande densité, ce qui nous fait d’autant plus regretter la fin de l’œuvre dans cinq petits volumes.
Et si nous avons relevé le côté plus manichéen de cet Aikawa, force est de constater que l’autrice parvient tout de même à épaissir le personnage, à lui donner du relief dans les dernières pages du tome, et même à « légitimer » son existence au regard d’une industrie toujours plus sévère et méritocratique. Un vrai petit tour de force qui justifie bien la mise en retrait temporaire de Nakata qui pourrait bien nous revenir sous un prisme différent : celui d’une amourette ! Un petit renouveau pour Réimp’ !, donc, ce qui nous fera attendre la suite avec encore plus d’impatience que d’habitude.