Palais des Assassins (le) Vol.1 : Critiques

Ansatsu Kôkyû - Ansatsu Nyokan Karin wa Yuttari Ikitai

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 10 Juin 2024

Chronique 2 :


Surfant sur le succès des "Carnets de l'apothicaire" (succès au point qu'il existe deux adaptations de la même œuvre), les intrigues de cour des grands empereurs d'Asie ont encore de belles heures devant elles! Ki-oon nous avait déjà agréablement surpris avec la série précitée lorsqu'elle est arrivée dans leur catalogue, ce n'est donc pas surprenant que "Le palais des assassins" se retrouve également du coté de Ki-oon...un titre à l'ambiance vraiment très proche de la première.
Issue de la plume Iori Tabasa, Le palais des assassins ne compte actuellement que quatre tomes au Japon, mais pourrait bien s'étendre sur de longues années tant l'univers se veut riche et propice à ce genre de récit.

Karin vient de rentrer au sein de la cour de l'empereur comme apprentie servante...elle rêve, comme bien des jeunes filles, de monter dans la hiérarchie pour devenir la suivante d'une courtisane...mais malgré sa bonne volonté évidente et sa gentillesse, Karin fait peur: elle est la fille du maître assassin de la cour, connue pour ses conspirations et les meurtres qu'il a perpétré directement ou indirectement! Pourtant Karin souhaite plus que tout rester loin de ce monde...contre l'avis de son père qui aimerait bien qu'elle lui serve d'informatrice au sein de la cour.
Et c'est bien malgré elle qu'elle va se retrouver au centre d'intrigues visant la mort du jeune empereur, assis sur le trône depuis la mort de plusieurs autres héritiers légitimes! Dans l'ombre, trois femmes puissantes semblent diriger des complots, et si elle ne demande rien, Karin a malgré tout été bien formée par son père et sait reconnaître des assassins ou des traces de poisons, et va protéger l'empereur avec ses capacités hors normes...tout en aspirant qu'à une vie tranquille!

Dès les premières pages, le parallèle avec "Les carnets de l’apothicaire" est assez évident, on pourrait même penser qu'on se situe dans le même univers, voire la même cour, et on s'attend à croiser Mao Mao à tout moment.
D'ailleurs dans un premier temps, on se demande comment la série va réussir à se démarquer: une jeune fille introduite au sein de la cour qui ne demande rien à personne et qui grâce à des connaissances qu'elle n'est pas censée posséder va aider à lutter contre des manigances et complots... Mais dès la première intervention de Karin, on comprend que cette dernière est assez éloignée au final de Mao Mao! Ses connaissances ne s’arrêtent pas aux poisons! Elle maîtrise aussi les lames et bien des façons de tuer, ce qu'elle n'hésitera pas à faire! Elle cache des "armes" un peu partout sur elle, bien que pour le commun des mortels ce qui lui permet de tuer aisément ne servirait pas à grand chose entre les mains de néophytes.

Et pourtant contrairement à ce que ce bref résumé pourrait laisser croire, nous ne sommes pas sur une série sombre et violente! Le ton est léger, l'humour est très présent, et fonctionne sans peine, sans forcer le trait! On a notamment un comique de répétition avec la pauvre Karin qui tente de s'intégrer et qui effraie bien malgré elle ses camarades qui interprètent tous ses gestes comme des tentatives d'intimidation, voire de meurtres. On peut cependant craindre que ce type de quiproquos finissent par lasser sur le long terme s'ils perdurent.

Ce premier tome s'intéresse, en toute logique à Karin, et donc laisse peu de place aux autres personnages. On y découvre toutefois des jeunes servantes comme elle qui tentent d'évoluer dans ce monde, toutes plus ou moins attachantes et qui apportent cette touche de normalité dans ce monde de vipères et de complots.
Mais aussi on fait la connaissance du jeune empereur qui lui non plus n'a rien demandé et semble subir les événements: il s'est retrouvé sur le trône bien trop jeune pour réaliser et diriger du fait de l'assassinat de ses demi-frères, et il est le pantin de sa grand mère, et mère du précédent empereur; de la première concubine de ce dernier; et de sa demi sœur, fille du précédent empereur!
Au milieu de ça, on a donc un jeune garçon attachant, bien trop gentil pour cet univers où règne les complots, qui va faire preuve de gentillesse envers Karin malgré sa condition de servante, ce qui va décider cette dernière à le protéger quoi qu'il arrive.

On a donc un premier opus totalement convaincant, qui séduira sans mal les amateurs des carnets de l'apothicaire, mais pas que. Et si le ton et l'univers entre les deux séries sont assez proches, on ne va pas se mentir, le titre de Iori Tabasa parvient malgré tout à apporter ses particularités et à proposer une autre approche des intrigues de cour.
Tout ceci est porté par un personnage principal attachant et amusant, qui sait se montrer redoutable quand il faut et un ton léger, quelque peu en décalage avec la thématique, ce qui fonctionne à merveille!

Le trait de l'auteur est assez proche des standards du genre mais particulièrement agréable. Et si là encore, même le dessin fait penser aux carnets de l'apothicaire, Iori Tabasa possède son propre coup de crayon et sait apporter des nuances appréciables et élégantes.

Sans surprise, Ki-oon continue son excellent travail d'adaptation en proposant un papier de qualité, englobé dans une couverture joliment travaillé, avec une excellente traduction qui se permet quelques explications sur les spécificités de l'époque.

Une série que je vais suivre avec délectation et qu'il me tarde de découvrir un peu plus.



Chronique 1 :


Si l'on voit arriver de temps à autre des mangas puisant leur inspiration dans l'Histoire des cours impériales japonaises ou chinoises, les éditions Ki-oon ont assurément su tirer le gros lot, depuis 2021, avec la série à succès Les Carnets de l'apothicaire, si bien qu'il n'y a rien d'étonnant à voir l'éditeur s'intéresser à une autre oeuvre ce déroulant dans le même type d'univers ! C'est donc le cas avec Le Palais des assassins, dont le premier volume est disponible en France depuis début février, et qui nous permet de retrouver la mangaka Tabasa Iori que l'on connaissait déjà pour la courte série Heroines Game sortie aux éditions Kana en 2019-2020. De son nom original "Ansatsu Kôkyû - Ansatsu Nyokan Karin wa Yuttari Ikitai", Le Palais des assassins suit son cours au Japon depuis 2021 dans les pages du magazine Gekkan! Spirits des éditions Shogakukan, et compte 4 volumes à l'heure où ces lignes sont écrites.

On plonge ici dans un lointain passé, au coeur de la cour impériale de l'ancien pays de Hokugi, où la situation est trouble: dans une cour gangrénée par les intrigues, le jeune Empereur actuel, Gyosei, a été intronisé à l'âge de seulement dix ans, suite aux assassinats successifs de ses deux demi-frères. Et au vu de son jeune âge, il va de soi que plus d'une personne ambitieuse compte l'exploiter, voire l'éliminer lui aussi. C'est dans ce contexte tourmenté que la jeune O Karin a décidé d'entrer comme apprentie servante au sein de la cour intérieure du palais, mue avant tout par un grand espoir: se faire des amies parmi les milliers de femmes peuplant le lieu ! En effet, la jeune fille souffre, depuis toujours, de n'avoir jamais pu lier d'amitiés, à cause de son statut de fille d'O Ko, un fonctionnaire diabolique, corrompu, craint de tous, qui tire les ficelles dans l'ombre pour accroître son pouvoir sur la cour, et qui a même appris toutes ses redoutables techniques d'assassinat à sa propre fille. Karin, elle, ne rêve que de mener une vie normale, entourée de bonnes copines... mais même parmi les autres apprenties servantes, son statut la précède, tout le monde la craint et l'évite, car tous sont persuadés qu'elle est envoyée là par son père à des fins sinistres, et la jeune fille n'est pas aidée par sa bouille et ses mimique que beaucoup trouvent sinistres avec ses contours d'yeux très noirs et ses dents pointues ! Encore et toujours esseulée, la pauvre Karin tâche de tenir bon, en espérant, un jour, pouvoir lever les malentendus et se rapprocher des autres. Elle ne pourrait alors pas imaginer que la première personne à lui accorder de la considération serait le jeune Empereur en personne, et qu'elle serait bientôt mêlée, un peu malgré elle, à des tentatives d'élimination du souverain et autres manigances où ses talents d'assassin pourraient se révéler utiles.

Sur ce premier volume, l'oeuvre suit un schéma somme toute très simple, où Karin se retrouve déjà mêlée à quelques manigances visant en premier lieu l'Empereur, manigances qu'elle va vite et bien faire capoter dans l'ombre en n'hésitant pas à se servir des techniques d'assassin que son odieux père lui a apprises. Ces premières affaires sont très vite vues et sont même légèrement simplistes par moments, à l'image d'une petite incohérence: si Karin sait imiter le cri des oiseaux pour les contrôler, elle aurait tout à fait pu se contenter de faire ça pour faire revenir dès le départ le volatile de Choko, au lieu d'échouer en escaladant des arbres. Néanmoins, elles sont d'emblée assez prenantes et immersives, pour trois raisons en particulier.

Tout d'abord, les pointes d'humour que l'autrice apporte autour de son héroïne un peu décalée, capable d'être une assassin hors-pair alors que, dans le fond, elle veut simplement et naïvement mener une vie normale et avoir des amies. Forcément, au vu de l'identité de son père et de sa tête un peu sinistre (même si en vrai, perso, je la trouve choupi tout plein), elle tend à effrayer naturellement tout son entourage, qui imagine souvent qu'elle prépare des sales coups alors qu'il n'en est rien du tout. Cette part d'humour un peu vache fonctionne plutôt bien pour le moment, même s'il risque de devenir très vite répétitif si Tabasa Iori ne le fait pas évoluer.

Ensuite, la patte visuelle de la dessinatrice, tout à fait plaisante. Si l'on a déjà parlé du design réussi de Karin, évoquons aussi le soin accordé aux autres designs assez élégants, aux costumes d'époque, et bien sûr au cadre même du palais dans ses extérieurs comme dans ses intérieurs. L'ensemble est soigné, très propre, à la fois clair et assez riche, si bien qu'on a tous les ingrédient graphiques pour se laisser happer.

Enfin, les différents enrichissements qui ont lieu petit à petit, au fil de l'apprentissage de Karin pour devenir servante, de ses errances dans la cour et des premières affaires auxquelles elle se retrouve mêlée. On découvre nombre de personnages plus ou moins intrigants, manipulateurs et ambitieux, on cerne facilement l'isolement dans lequel se retrouve le jeune Empereur, on entrevoit de manière suffisamment intéressante certaines rivalités entre dames de la cour ainsi que des choses comme la hiérarchie parmi les servantes et les différents offices...

A l'arrivée, on a affaire à un premier volume qui accomplit bien son rôle de mise en place, en étant porté notamment par une héroïne plaisante à suivre et par un travail visuel immersif. Il faut juste espérer que Tabasa Iori parviendra rapidement à tirer parti de ce qu'elle installe afin de proposer des manigances plus consistantes, mais dans l'immédiat le contrat est rempli !

Côté édition, c'est satisfaisant. A l'extérieur, on a une jaquette à la fois sobre, fidèle à l'originale japonaise, et dotée d'un logo-titre soignée, bien lisible et bien incrusté. A à l'intérieur, on a droit à une bonne qualité d'impression sur un papier assez souple et opaque, à un lettrage très propre de Clair Obscur, et à une traduction efficace de la part de Djamel Rabahi.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Erkael

16 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
15.25 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs