Monstre et la bête (le) Vol.1 - Actualité manga
Monstre et la bête (le) Vol.1 - Manga

Monstre et la bête (le) Vol.1 : Critiques

Bakemono to Kedamono

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 02 Juin 2020

Régulièrement soucieuses de nous faire découvrir de nouvelles mangakas dans le vaste registre du boy's love, les éditions Taifu Comics ont lancé, dans les tous derniers jours du mois de mai, Le Monstre & la Bête. De son nom original Bakemono to Kedamono (le titre français est donc une traduction littérale), l'oeuvre suit tranquillement son cours au Japon depuis 2017 dans le magazine Asuka Ciel des éditions Kadokawa avec actuellement 3 tomes au compteur, et il s'agit de la toute première (et unique à ce jour) série de Renji (ou Renji Range), une autrice qui a également participé en 2019 à Mister and Little Girl Anthology, une anthologie collective d'histoires courtes catégorisées seinen.

Ici, nous voici plongés dans un monde aux petits accents de fantasy. Dans une forêt pullulant de démons vit Kavo: géant, très musclé avec un corps beaucoup plus imposant que celui d'un humain, la peau brune, affublé d'une très longue tignasse cachant son visage apparemment hideux, il est rejeté par tout le monde, depuis toujours, dès lors qu'on voit sa tête et son allure effrayantes. Ce "monstre", pourtant, finit un jour par sauver dans sa forêt un homme d'âge mûr semblant sur le point d'être agressé sexuellement par trois autres hommes. En réalité, celui qui se fait appeler Liam n'était aucunement agressé, et s'adonnait à l'un des nombreux petits jeux sexuels qu'il adore. Mais il n'en tient pas du tout rigueur à Kavo, le remercie même... et, surtout, ne se montre aucunement effrayé en voyant son horrible visage. Le mystérieux et facétieux homme, devant traverser la forêt jusqu'à un petite ville voisine de celle-ci, propose alors à Kavo de lui servir de guide. Et tandis que Liam présente petit à petit un coeur de bête et une bonne part de mystère, le coeur pur du monstre semble irrémédiablement attiré par celui qui l'a sans peur...

La première chose qui marque est bien la patte visuelle tout à fait séduisante de la mangaka, celle-ci offrant un style très fin, y compris pour ses décors assez profonds mais toujours clairs car non surchargés, un aspect bien appuyé par la finesse des trames et leurs différences de clarté. C'est surtout valable pour la forêt ses arbres, mais la ville bénéficie aussi d'un soin suffisant. Mais c'est essentiellement dans le design de ses deux personnages principaux que la dessinatrice séduit. Ainsi, Liam répond physiquement à tous les standards d'un dandy d'âge mûr: aspect posé, style élégant, silhouette élancée, côté avenant et séducteur, visage fin et presque noble avec ce sourire doux et ses sourcils levés... Un style qui n'est pas sans rappeler la (trop rare en France) mangaka Natsume Ono, autrice de Gente, Ristorante Paradiso et Goyô, et ayant elle aussi dessiné plus d'une fois des hommes d'âge mûr. A ses côtés, Kavo impose sans mal sa silhouette colossale et profite d'un style tout aussi soigné, avec sa peau brune bien rendue par les trames, son corps musclé, ses cornes, et sa longue tignasse cachant cachant un visage hideux que l'on n'entreverra brièvement qu'à de rares reprises (on voit surtout de vastes dents pointues dans une large bouche). Une nature monstrueuse qui, à l'instar de Liam, ne nous effraie pas, les trames bien définies évitant à Kavo de paraître trop sombre et de s'attacher facilement à lui derrière l'apparence.

Car évidemment, chacun des deux héros s'annonce très prometteur, et Kavo, derrière son allure de monstre, n'a rien de tel. Bien au contraire, il est pur, très pur, que ce soit dans sa méconnaissance du monde humain qui le rejette (du coup, dans la ville il commet forcément des petites bévues), et surtout dans ce qu'il se met à ressentir pour Liam. Des sentiments simples (il a envie de rester avec lui, envie de le protéger...) sur lesquels il peine d'abord à mettre un nom, un peu comme un ado maladroit découvrant tout juste l'amour... Mais devant lui, celui dont il se prend d'affection, derrière ses allures de dandy mature, pourrait bien être plus "bête" que lui. Déjà, parce que Liam s'adonne à des pratiques très libertines (avec des femmes et des hommes) dont il ne pourrait se passer et qu'il semble donc totalement "open" sur le plan sexuel au risque de blesser les sentiments purs du monstre. Mais aussi parce que l'homme n'hésite jamais à dire les choses sans détours, semble très libre également dans les autres types de relations humaines comme l'amitié ou l'attachement en ne s'attachant justement pas à grand chose. Et, enfin, car très vite il ne fait aucun doute qu'il cache des choses, en changeant de noms, en étant poursuivi par d'autres personnes, voire en étant accusé d'avoir fait souffrir du monde... Que cache-t-il ? Cette part du récit devrait sans nul doute s'intensifier dès le prochain tome, au vu de la fin de ce premier opus.

Pour l'heure, on se contente surtout de suivre le début du périple de ces deux héros atypiques et formant un duo étonnant, et on apprend petit à petit à les découvrir et à voir apparaître les pointes de mystère tandis que la mangaka régale par son immersion graphique. Il n'y a plus qu'à attendre de voir ce que donnera cette intrigue une fois qu'elle sera devenue plus intense, mais dans l'immédiat Renji nous offre un premier volume très facilement captivant et intrigant.

Du côté de l'édition, la jaquette française se veut très proche de l'originale japonaise, et à l'intérieur on a droit à une première page en couleurs, à un papier souple et sans transparence, à une bonne qualité d'impression, et à une traduction soignée d'Isabelle Eloy. Soulignons enfin le très bon travail sur le choix des polices, celles-ci étant différentes selon que c'est Liam ou Kavo qui parle, un choix faisant subtilement ressortir la nature inhumaine (et donc la voix sans doute différente) de ce dernier.
   

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.25 20
Note de la rédaction