Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 27 Mars 2023
Avec le lancement de Golden Guy il y a quelques mois, les éditions Mangetsu semblent vouloir accorder une belle place au genre underground, certes présent chez nous, mais peut-être encore trop peu visible. Ainsi, l'éditeur s'est penché sur Mighty Mothers, manga d'Eiji Karasuyama (que nous connaissons pour être le dessinateur de Lesson of the Evil), en cours depuis 2021 dans la revue Manga Goraku des éditions Nihon Bungeisha. Un beau terreau à mangas underground justement, le magazine accueillant Golden Guy, mais ayant aussi proposé Monkey Peak, Gift +/- et Inspecteur Kurokochi, entre autres.
Comme d'autres mères célibataires, Akane Honjô serait prête à tout pour son enfant. La journée, la jeune femme occupe un petit boulot de caissière, tâche qu'elle assume non sans une certaine maladresse. Le soir venu, c'est une autre casquette qu'elle porte, celle d'un agent de la nuit qui se bat contre le crime visant les ordinaires citoyens et les plus démunis. Et elle n'est pas seule, puisque ses collègues de mission assument la même tâche de l'ombre...
C'est sur ces bases simples que débute Mighty Mothers, manga qui nous propose de suivre une poignée d'agents qui, la nuit venue, combattent quelques organisations criminelles pour en sauver les innocentes victimes. Un pitch qui se résume en quelques mots, et qui trouve son audace dans la nature de ces mercenaires : des mères célibataires, toutes puissantes, donnant au manga son titre. Découpé en deux segments distincts, ce premier opus prend d'abord un format classique pour présenter, à tour de rôle, ces trois guerrières de la nuit, de jeunes femmes habiles pour cacher leurs talents secrets dans la vie de tous les jours. Une phase de présentation on ne peut plus ordinaire, mais qui remplit son office, avant que ce premier volet passe à quelque chose de plus construit, réunissant ces trois protagonistes pour les confronter à une menace commune, qui prendra même une certaine ampleur au fil de la lecture, jusqu'à abouti à un cliffhanger plutôt réussi.
Dans ce récit où des justicières à la double vie passent à l'action, c'est justement le sens du spectacle du mangaka qu'on s'attend à apprécier. À ce titre, Mighty Mothers coche les cases de ce que l'on peut attendre de ce type d'œuvre, proposant un déroulé bien segmenté, habilement rythmé, ne perdant pas de vue son optique de divertissement, et parlant à son lectorat par un milieu criminel bien sale et sans scrupule, de manière à ce que le lecteur apprécie les massacres perpétrés par ces mamans toutes-puissantes, en guise de punition. Si l'ensemble pouvait devenir répétitif au bout de quelques chapitres à peine, son découpage en deux grandes parties permet d'éviter le piège, de même de l'entrée en scène d'une adversaire redoutable, certes très clichée dans son caractère d'ennemie aux élans psychopathe, mais qui trouve sa place dans ce type de récits. Par cette figure, le mangaka confirme sa volonté de créer un casting féminin, reléguant les hommes au rang de sous-fifres et autres basses besognes. Le titre n'a pas spécialement une volonté féministe, ses thèmes sociétaux étant vraiment timides, mais apporte une esthétique appréciable.
Mighty Mothers montre donc des bases stables, sans fioritures, et de quoi ravir les amateurs d'action et de mangas underground. A voir ce que la série donnera sur la durée, Eiji Karasuma donnant lieu à une lecture sympathique dans son genre.